L’étrange ministère (des Affaires étrangères).

L’étrange ministère (des Affaires étrangères).

Parfois, on le croit vermoulu sous des ors pas très brillants. Parfois il est la caricature d’une bureaucratie lointaine. Récemment encore, tels élus se plaignaient des oukases et du mépris dans lesquels ils étaient tenus. Bien des compatriotes peinent à obtenir les renseignements dont ils ont besoin, ne serait-ce que pour répondre aux formulaires qu’on leur réclame pour faire valoir leurs droits.

Le meilleur possible ?

Globalement, pourtant, quels que soient les agacements, les Français de l’étranger notent favorablement leur ministère. C’est ce qui apparait dans les enquêtes et les consultations réalisées régulièrement par lesfrancais.press, y compris pendant la crise du Covid. Tout n’est pas parfait, soit, mais où est la perfection dans le meilleur des mondes possible, qui n’est toujours un monde paisible? 

Parfois, on s’agace aussi des déclarations ministérielles, pas toujours suivies d’effets, ou ces rodomontades et autres leçons données au reste du monde.

On a lu ainsi avec étonnement une déclaration du ministre des Affaires étrangères enjoignant aux Talibans de « respecter les droits de l’homme » et « particulièrement ceux des femmes » s’ils voulaient une reconnaissance officielle. Ils en tremblent. Cette exigence, on se garderait bien de l’étendre à d’autres pays trop amis pour savoir l’apprécier. D’autant que l’on parle déjà aux Talibans. Enfin, il faut bien que la parole de la France reste fidèle à ses principes.

L’action dans la crise

Et puis il y a l’action. Surtout en cas de crise. C’est à ce moment là que l’on a besoin des diplomates. C’était le cas à Kaboul ces derniers jours. Avec les moyens militaires, la France a réussi à faire sortir plus de 3000 personnes depuis le 15 août. Elle en avait déjà exfiltré 1500 auparavant, parce qu’elle anticipait « la possibilité » d’une crise. Il a fallu prévenir discuter, négocier, masquer, protéger, etc.

On a vu un ambassadeur en première ligne. Ou plutôt en seconde, car avant la première ligne il y avait ses collaborateurs. Ce fut le cas au Venezuela ou à Madagascar, à Haïti, dans d’autres circonstances. Avec lui donc, tous les services, et au-delà, toute la communauté française, et tout le réseau du ministère derrière, en coordination avec le ministère des armées. Sans l’appui des soldats, quelle diplomatie ?

Le pont aérien mis en place par la France a été un succès. Bravo.

Mais il reste beaucoup d’amis de la France en Afghanistan, et beaucoup d’Afghans en danger. Et un monde en plein chaos. L’histoire n’est pas finie. 

Cet étrange ministère qu’est le ministère des Affaires étrangères, capable du meilleur comme du pire, de la plus grande perspicacité comme du plus grand aveuglement, de la plus grande discrétion comme de la plus provocante arrogance, a joué son rôle dans cette crise, à tous les niveaux, avec tous les interlocuteurs possibles. A croire que l’excellence française se révèle dans les crises. Hélas donc, mais bravo.

Laurent Dominati

A. ambassadeur de France

A. député de Paris

Président de la société éditrice du site « Lesfrancais.press »

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