Longtemps l’expatriation a rimé avec grands cadres envoyés soit à la conquête d’un marché soit pour prendre en charge une unité de production, dans tous les cas au service d’une grande entreprise. Autre situation qui fut longtemps courante, c’est l’expatriation fiscale… On en paie toujours les a priori. Mais aujourd’hui, l’expatriation c’est aussi et surtout des Français, de tous les jours, qui quittent la France soit par amour, soit par opportunité professionnelle au niveau local, soit pour créer leur entreprise. Aujourd’hui, on s’intéresse à cette dernière catégorie, les expatriés – entrepreneurs.
La French Touch
Il fut une époque, à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème, où le savoir-faire industriel français a véritablement conquis le monde. De Ferdinand de Lesseps à Gustave Eiffel, les réalisations françaises ont étonné le monde. Renouer avec cette vision globalisée de l’entrepreneuriat est non seulement possible mais vital pour l’avenir économique de notre pays. Les entrepreneurs français ont un savoir-faire exceptionnel dans tous les domaines. Forts de leurs atouts, il sont de plus en plus nombreux à sortir du pré carré. La mobilité est un état d’esprit que les Français sont en train d’acquérir. Elle suppose de revenir aux fondamentaux de l’entrepreneuriat comme l’optimisme, le volontarisme et l’envie de repousser les horizons.
Ainsi s’étendre en dehors des frontières françaises peut être une occasion de saisir de nouvelles opportunités. Le marché international est particulièrement réceptif aux offres des entreprises françaises. La French Touch est reconnue à travers le monde.
Dans une enquête conduite en avril 2020 par le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF), 37 % de ces entreprises à l’étranger revendiquent la marque France et 52 % utilisent le savoir-faire français dans le domaine de la propriété intellectuelle. On les retrouve le plus souvent dans le consulting et l’audit, l’alimentation, les boissons (vins et spiritueux), l’informatique, ou l’hôtellerie-restauration.
Des institutions au service des créateurs d’entreprises
L’Etat français tente depuis des années de combler le déficit abyssal du Commerce extérieur, pour cela il a mis en place tout un écosystème pour accompagner les futurs entrepreneurs expatriés français qui travailleront avec l’hexagone.
Team France Export
Structurée autour de Business France, des régions, des Chambres de Commerce et d’Industrie et de Bpifrance, la Team France Export propose aux entreprises désireuses de se développer sur les marchés étrangers un ensemble complet de solutions, de la préparation à la projection à l’international.
Ce dispositif repose sur une logique d’efficacité et de continuité du service public, depuis les Régions françaises, dans lesquelles sont constitués des « guichets uniques de l’export » qui orientent les entreprises vers les solutions répondant à leurs besoins, jusqu’aux marchés étrangers où un « correspondant unique Team France Export » leur apporte les prestations d’accompagnement adaptées.
La Team France Export repose sur 13 guichets uniques régionaux, où 250 conseillers spécialistes de l’export apportent aux entreprises un conseil de proximité. À l’étranger, la Team France Export s’appuie sur un réseau de 750 conseillers répartis dans 65 pays.
Les conseillers au commerce extérieur
Les conseillers du Commerce extérieur de la France (CCE) mettent bénévolement leur expérience au service du développement de la France. Ils exercent au quotidien des actions concrètes en partenariat avec les acteurs publics et privés ayant un rôle dans la promotion et l’appui à l’internationalisation des entreprises françaises. Nommés par le Premier ministre, les CCE sont investis par les pouvoirs publics de quatre missions.
Ils sont plus de 4500 femmes et hommes d’entreprise et experts de l’international au service du développement de la France depuis plus de 120 ans. Ils sont présents dans toutes les régions de France et dans plus de 150 pays.
Business France
Business France, agence nationale au service de l’internationalisation de l’économie française, accompagne les entreprises pour qu’elles réussissent à l’export. Elle prépare les entreprises ou les entrepreneurs en les mettant en relation avec des partenaires commerciaux sur les marchés cibles afin de favoriser la création de courants d’affaires et de pérenniser les exportations.
Mais Business France assure, aussi, la veille de l’image et de l’attractivité économique de la France à l’international. L’agence propose et met en oeuvre une stratégie de promotion de la France, de ses territoires, entreprises et talents, et anime des réseaux d’influence sur le plan économique et international.
Enfin, Business France assure la gestion du programme « Volontariat International en Entreprises » (V.I.E). Ce dernier permet aux entreprises françaises de confier des missions professionnelles à l’étranger (commerciales, techniques, ingénierie, marketing, finance, etc.) à de jeunes talents durant une période modulable de 6 à 24 mois.
Proparco
Filiale du groupe AFD dédiée au secteur privé, Proparco intervient depuis 45 ans pour promouvoir un développement durable en matière économique, sociale et environnementale.
Proparco participe au financement et à l’accompagnement d’entreprises et d’établissements financiers en Afrique, en Asie, en Amérique latine ou encore au Moyen-Orient. Son action se concentre sur les secteurs clés du développement : les infrastructures avec un focus sur les énergies renouvelables, l’agro-industrie, les institutions financières, la santé, l’éducation… Ses interventions visent à renforcer la contribution des acteurs privés à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), adoptés par la communauté internationale en 2015.
Dans ce but, Proparco finance des sociétés dont l’activité participe à la création d’emplois et de revenus décents, à la fourniture de biens et de services essentiels, ainsi qu’à la lutte contre le changement climatique.
Les Chambres de Commerce et d’Industrie à l’international
Fondée en 1907, CCI France International regroupe et anime 119 Chambres de Commerce et d’Industrie Françaises à l’International (CCI FI) dans 94 pays. CCI France International représente le réseau des 119 CCI FI auprès des pouvoirs publics , des CCI de France, des entreprises, des collectivités territoriales en France.
Son rôle consiste ainsi à informer les CCI FI, favoriser la coopération et le transfert de savoir-faire entre elles. Elle assure également la formation des collaborateurs du réseau et la diffusion de bonnes pratiques professionnelles.
Les freins au succès des expatriés
S’il existe des organismes pour soutenir les Français au départ de France pour mettre en place des filières d’exportation depuis l’hexagone, une fois l’entreprise créée sur un sol étranger, les difficultés apparaissent.
En effet, actuellement, il n’existe aucun label certifiant l’utilisation d’un savoir-faire français ou l’origine national d’un entrepreneur. Clairement, il est difficile pour un Français de faire valoir son acquis en France.
Pire, car comme pour toute entreprise le nerf de la guerre, surtout au lancement, c’est la trésorerie, les entreprises fondées en dehors du territoire nationale sont exclues de fait de tout soutien financier émanant de l’Etat français (hors Proparco). Une logique qui peut se comprendre, au premier abord, car pourquoi les contribuables français devraient financer, à travers l’impôt, des sociétés qui paieront leurs taxes, charges sociales dans un pays tiers ? Pourtant, ce sont des entreprises qui vendent la marque France, qui font rayonner notre culture et notre savoir-faire. Et aujourd’hui, pour renforcer l’influence de notre pays tout en favorisant sa prospérité, on ne peut plus uniquement compter sur notre diplomatie.
2 propositions de loi
Une situation qui fut criante au cours de la pandémie. En effet, rares sont les Etats à avoir soutenu comme la France leurs entreprises pendant les confinements liés à la Covid-19. Ainsi selon un rapport d’une délégation sénatoriale, 30 % des patrons français résidant hors de France sont rentrés au pays au cours de la crise sanitaire.
Made by French
Pour y remédier, le Sénat réfléchit depuis plusieurs années à un dispositif. Cette réflexion s’est traduite dans une proposition de loi de la sénatrice des Français de l’étranger, Evelyne Renaud-Garabedian (ASFE-LR). Adopté en première lecture au Sénat, ce texte ouvre la voix à la création d’un label « Made by French ».
Selon la sénatrice, grâce à ce statut, les entrepreneurs français à l’étranger pourront, si le texte est adopté, grâce au soutien des CCI, accéder aux mêmes outils financiers que les filiales de groupes français. À la fois auprès de Bpifrance avec des outils d’assurance prospection par exemple, ou auprès de banques françaises installées à l’étranger avec le financement de leur activité.
Entrepreneur français à l’étranger
Du côté de la majorité présidentielle, Anne Genetet (députée de la XIème circonscription des Français de l’étranger) et Stéphane Vojetta (député de la Vème circonscription des Français de l’étranger) ont déposé une proposition de loi pour créer un label « Entrepreneur français à l’étranger » en mars 2021.
Ce label serait attribué à toute entreprise ayant une gouvernance de nationalité majoritairement française ou un actionnariat de nationalité majoritairement française ou possédant un partenariat privilégié avec une entreprise de nationalité française. Là aussi, ce statut permettrait d’accéder à des dispositifs financiers ou d’accompagnement.
Mais dans les deux cas, Bercy ne semble pas particulièrement enclin à ouvrir les vannes d’un financement de sociétés de droit étranger. Affaires à suivre…
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