Les États-Unis, toujours les plus forts ?

Les États-Unis, toujours les plus forts ?

Depuis une quarantaine d’années, l’économie américaine résiste mieux aux chocs que l’économie européenne, grâce à une moindre dépendance aux importations énergétiques, à un marché plus homogène, et à une domination dans les secteurs de pointe.

Les États-Unis résistent mieux aux chocs que la zone euro

Après les crises de 1990/1992, 2000/2001, 2008/2009 et 2020/2021, les Etats-Unis ont rebondi plus vite et plus fort que l’Europe. L’écart de PIB entre les deux zones économiques se construit au début des cycles économiques. Les Etats-Unis mettent deux fois moins de temps que les Européens pour revenir au plein emploi. De crise en crise, l’Europe semble de moins en moins agile pour les surmonter. Les stigmates des crises de 2008/2009 et de 2011/2013 n’avaient été effacés qu’en 2019, et encore n’était-ce pas le cas pour certains pays comme l’Italie, l’Espagne, la Grèce, voire la France.

Le pétrole et le gaz de schiste ont modifié la donne

Une des premières explications de la résilience américaine provient de sa faible dépendance à l’énergie importée. Après avoir connu une forte augmentation des importations de gaz et de pétrole dans les années 1980/2000, les Etats-Unis sont redevenus exportateurs nets depuis 2015. La montée en puissance du pétrole et du gaz de schiste a modifié la donne. En 2022, la balance commerciale énergétique est déficitaire de 4 % du PIB pour la zone euro quand elle est excédentaire de 0,5 % du PIB pour les Etats-Unis. Ces derniers sont moins sensibles que les Européens aux augmentations de prix du pétrole.

La forte rentabilité des entreprises aux Etats-Unis contribue à des crises plus courtes qu’en Europe. Le redressement des profits des entreprises y est beaucoup plus rapide après une récession. L’économie américaine se caractérise par une flexibilité plus grande des salaires réels et le redressement plus rapide de la productivité. Il en résulte un redressement plus rapide aussi de l’emploi, de l’investissement, donc de l’activité. Après impôts et intérêts, avant dividendes, les profits des entreprises américaines s’élevaient à 18 % du PIB en 2021, contre 14 % au sein de la zone euro.

Des gains de productivité plus importants

En période de reprise, la progression de l’investissement est toujours plus forte aux Etats-Unis qu’en Europe. Il en est de même pour les créations d’emplois. L’économie américaine en raison de son positionnement dans les hautes technologies génère des gains de productivité plus importants que celle de la zone euro. Depuis 1985, les gains de productivité se sont accrus de 95 % aux Etats-Unis contre 40 % au sein de la zone euro. La divergence des courbes est intervenue à partir des années 1995/2000 lors de la première révolution digitale.

Les gains de productivité sont relativement étales en Europe depuis une dizaine d’années quand ils ont continué à augmenter aux Etats-Unis. La présence de gains de productivité rend la soutenabilité des dettes plus aisée aux Etats-Unis à la différence de l’Europe. Cette dernière est confrontée périodiquement à ce problème (1992-1995, 2010-2014).

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Le dollar américain est une valeur refuge qui s’apprécie durant les crises

L’atout du dollar

L’économie américaine supporte plus facilement des taux d’intérêt plus élevés qui sont également un gage de bonne orientation de l’épargne et de bonne rémunération de la prise de risque. Les Etats-Unis exploitent les atouts que leur procure le dollar qui est la première monnaie mondiale tant pour les échanges que pour les réserves de devises. Le dollar demeure une valeur refuge qui s’apprécie durant les crises (2000-2002, 2008-2009, 2020-2022). Ce rôle d’actif refuge permet aux Etats- Unis d’éviter les crises de balance des paiements et limite les poussées d’inflation dues à la dépréciation du change. Les Etats- Unis peuvent financer une partie de la croissance grâce à l’épargne étrangère qui y est investie.

Une terre d’accueil pour les investissements et les talents internationaux

Les Etats-Unis restent une terre d’accueil pour les investissements mais aussi pour les talents internationaux, ce qui accentue leur domination en matière de technologie. Dans les secteurs des technologies de l’information et de la communication, de la santé ainsi que dans celui de la défense, les Etats-Unis demeurent en pointe et constituent la référence.

Les dernières crises ont accentué la dépendance des Etats dans ces secteurs. Pour contrecarrer les facteurs déclinistes, l’Europe doit impérativement résoudre son problème de dépendance énergétique et enregistrer des gains de productivité, ce qui suppose un effort conséquent en matière d’investissement.

Le renforcement de l’euro serait souhaitable mais passe par une mutualisation accrue des dettes de la zone euro avec la mise en place de marchés financiers plus intégrés, en lieu et place des marchés nationaux segmentés.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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