Les droits de douane de Donald Trump

Les droits de douane de Donald Trump

Donald Trump estime que la Chine, l’Union européenne, le Mexique et de nombreux autres pays tirent avantage, sans contrepartie, de la croissance américaine. En 2023, le déficit commercial des États-Unis atteignait plus de 275 milliards de dollars avec la Chine, 200 milliards avec l’Union européenne, 160 milliards avec le Mexique, 105 milliards avec le Vietnam et 75 milliards avec le Canada. Jugeant ces échanges inégaux, Donald Trump a promis l’instauration de droits de douane majorés sur l’ensemble des importations. Il espère ainsi accroître les recettes publiques, favoriser l’économie américaine et obtenir des concessions de la part des pays exportateurs. Cependant, l’histoire le démontre, les mesures protectionnistes ont rarement produit les effets escomptés. Elles contribuent à l’inflation, réduisent la concurrence et freinent la croissance.

Les recettes issues des droits de douane sont souvent moins importantes qu’espérées, et les importations, faute de solutions de substitution, restent à des niveaux élevés. En règle générale, la majoration des tarifs douaniers provoque des mesures de rétorsion pesant sur les exportations. Néanmoins, depuis la première révolution industrielle, dans les années 1750, le protectionnisme a toujours eu des adeptes, aux États-Unis comme ailleurs, notamment en France. Un grand nombre d’investisseurs estiment ou espèrent que les propositions de Donald Trump, qui reviendraient à remettre en question tous les accords d’allègement des droits de douane conclus depuis 1944, ne seront probablement pas mises en œuvre dans leur intégralité. L’application d’une majoration universelle de 10 ou 20 % aurait des effets anti-économiques importants, pouvant entraîner une baisse des valeurs boursières.

Donald Trump essaiera d’obtenir des concessions de la part des Européens, des Japonais ou des Chinois sur des marchés que ces derniers protègent. Les discussions risquent d’être difficiles, compte tenu du contexte économique et social.

 « Tout pays qui enregistre un excèdent commercial avec les Etats Unis trompe l’Oncle Sam » 

En Europe, les demandes d’ouverture pourraient concerner l’agriculture et les loisirs. Parmi les pays visés par le futur Président figurent non seulement la Chine, mais aussi l’Union européenne, le Vietnam et le Mexique. Pour lui, « tout pays qui enregistre un excédent commercial important avec les États-Unis trompe l’Oncle Sam ». S’il décidait l’instauration de droits de douane de 60 % sur les importations chinoises, ces dernières pourraient potentiellement diminuer de moitié, faisant perdre un point de pourcentage au PIB chinois dans un contexte de croissance déjà timide. Certes, les entreprises chinoises pourraient contourner ces droits en assemblant leurs produits dans des pays voisins comme le Vietnam, le Cambodge ou la Malaisie. Cependant, ces pays pourraient à leur tour être pénalisés par des droits de douane majorés.

Donald Trump signe les déclarations imposant des droits de douane sur l’acier et l’aluminium, dans le bureau Ovale de la Maison Blanche, à Washington, le 8 mars 2018. ©MANDEL NGAN / AFP
Donald Trump signe les déclarations imposant des droits de douane sur l’acier et l’aluminium, dans le bureau Ovale de la Maison Blanche, à Washington, le 8 mars 2018. ©MANDEL NGAN / AFP

Donald Trump a également menacé d’imposer des droits de douane de 25 % sur la plupart des produits mexicains, les voitures étant soumises à des taxes encore plus élevées. La valeur des exportations de biens du Mexique vers les États-Unis équivalait, en 2023, à 27 % de son PIB, contre moins de 3 % pour la Chine. Le Mexique dispose de moins de solutions de repli que la Chine, plus des quatre cinquièmes de ses exportations étant destinées à son voisin d’Amérique du Nord.

Une baisse du commerce international, un effet dépressif sur la croissance mondiale

Avec un excédent commercial de biens d’environ 200 milliards de dollars avec les États-Unis, l’Union européenne est également dans le collimateur de la future administration républicaine. La banque Goldman Sachs prévoit que les nouveaux droits de douane pourraient réduire de 0,5 point le PIB européen, l’Allemagne étant la plus concernée par cette baisse potentielle. La liste des pays pouvant être touchés par les mesures protectionnistes américaines est longue : le Vietnam, le Canada, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud, la Suisse, Taïwan et la Thaïlande. Tous ces pays enregistrent des excédents commerciaux supérieurs à plusieurs dizaines de milliards de dollars.

Une application généralisée des droits de douane par la première puissance économique mondiale entraînerait une baisse du commerce international et aurait un effet dépressif sur la croissance mondiale. Certains alliés des États-Unis, qui n’ont pas d’excédent commercial flagrant avec eux, comme le Royaume-Uni, pourraient, néanmoins, obtenir des exemptions. Certaines multinationales pourraient, ainsi, accélérer leurs efforts de délocalisation pour s’implanter dans des pays disposant d’accords commerciaux avantageux avec les États-Unis.

Donald Trump envisage des droits de douane majorés pour réduire les déficits commerciaux des États-Unis, ciblant Chine, UE, Mexique et d’autres. Une politique protectionniste aux effets incertains sur l’économie mondiale.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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