Le Fonds de défense approuvé, mais sans veto pour le Parlement

Les eurodéputés ont donné leur feu vert au Fonds européen de défense, en  renonçant à tout droit de regard sur le programme.

Le 18 avril, 328 élus ont voté pour le Fonds européen de la défense (FED), 231 ont voté contre et 19 se sont abstenus. Le FED financera des projets de recherche. Bien que la somme exacte ne puisse être donnée avant l’approbation formelle du prochain cadre financier pluriannuel, il devrait recevoir 13 milliards d’euros.

Le but de ce nouvel outil est de renforcer l’industrie de la défense européenne et de limiter les doublons dans les dépenses en cofinançant les recherches avec les États membres.

« Grâce au FED, nous empêcherons le gaspillage de l’argent du contribuable sur des doublons, mais, plus important, nous renforcerons aussi la sécurité en Europe et créerons de nouveaux emplois dans l’industrie de la défense », se félicite le rapporteur, le conservateur polonais Zdzisław Krasnodebski.

Le rôle du Parlement fait débat

Le Fonds a beau avoir été approuvé par une claire majorité, les eurodéputés ont tenté de l’agrémenter d’une série d’amendements réinstaurant des propositions rejetées durant les négociations.

Un certain nombre d’élus regrettaient en effet les concessions consenties par le Parlement en ce qui concerne son droit de regard sur l’utilisation des fonds. La circulation de lettres à ce sujet avant le vote indique que si les négociations sont officiellement terminées, l’assemblée européenne est toujours divisée sur son rôle dans le FED, puisque le Parlement ne disposera d’aucun droit de veto.

Lors d’un débat houleux la veille du vote, les rapporteurs du dossier ont qualifié ses critiques de « pacifistes qui tentent de mettre en péril l’avenir de notre industrie et la sécurité de nos citoyens ». « Nous avons remporté la bataille pour assurer un Fonds européen de la défense commun et fort, malgré les obstacles levés par nos opposants idéologiques », estime Françoise Grossetête, élue Les Républicains (PPE).

Pour sa part, Zdzisław Krasnodebski souligne que le fonds n’a pas pour but de « militariser l’Europe », mais « de soutenir la recherche et le développement d’armes ».

Coûteux doublons

Tout comme la commissaire à l’industrie, Elżbieta Bieńkowska, le conservateur polonais insiste sur le fait que le FED a pour vocation de compléter l’OTAN, et non d’entrer en concurrence avec l’alliance, contrairement à ce qu’ont avancé certains détracteurs. Le FED est un outil de coopération dans l’industrie de la défense, « ni plus ni moins », assure Elżbieta Bieńkowska.

Reinhard Bütikofer, rapporteur fictif et porte-parole du groupe des Verts/ALE sur la défense, a voté contre un fonds qui « ne respecte pas sa propre promesse » de réduire les coûts engendrés par la duplication.

Selon les chiffres publiés le mois dernier par la Commission, l’absence de coopération au sein de la défense coûte à l’UE entre 25 et 100 milliards d’euros par an.

« Pour que l’Europe soit assurée de pouvoir défendre ses citoyens, nous devons avoir les technologies et équipements de pointe dans des domaines tels que l’intelligence artificielle, les drones, la communication satellite et les systèmes de renseignements », avait estimé le mois dernier Elżbieta Bieńkowska. « Avec les investissements européens que nous mettons en route, nous passons des idées aux projets concrets, nous renforçons la compétitivité de notre industrie. »

Les projets de recherche collaborative dans le domaine de la défense devront impliquer au moins trois États membres, et l’UE cofinancera la recherche avec les gouvernements nationaux. Le programme couvrira également le développement de prototypes d’armes, à condition que les États membres concernés s’engagent à acquérir le produit final.

Pour Reinhard Bütikofer, l’accord obtenu risque toutefois d’« encourager les exportations d’armes vers des régimes autoritaires », car il n’existe aucun contrôle commun des exportations au niveau européen.

Pas de robots tueurs

L’une des pierres d’achoppement des négociations avait été la possibilité d’utiliser le fonds pour la mise au point d’armes controversées. L’accord exclut finalement les armes autonomes létales – les robots tueurs – et de systèmes d’armes interdits par le droit international, comme les mines terrestres ou les armes nucléaires, chimiques et biologiques.

Le rapporteur fictif du S&D, Edward Martin, estime cependant que ces restrictions sont insuffisantes. « Nous ne pouvons pas nous contenter de faire référence au droit international, parce que le droit international est ambigu », souligne-t-il. « Nous devons dresser nous-mêmes la liste des types d’armes dans lesquelles nous ne voulons pas que l’Europe investisse. »

L’accord doit maintenant être approuvé par le Conseil des ministres. À l’automne, le nouveau Parlement négociera la partie financière de l’accord.

Alexandra Brzozowski

Un article publié sur le site de notre partenaire

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