Le lancement historique de la fusée SpaceX a poussé le directeur d’Arianespace, l’équivalent européen de la société d’Elon Musk, à affirmer dimanche 31 mai que son entreprise pouvait réaliser le même exploit.
Samedi 30 mai, la fusée Falcon-9 de l’entreprise américaine SpaceX a réussi à mettre en orbite deux astronautes de la NASA depuis le Kennedy Space Center en Floride, avant d’atterrir à la Station spatiale internationale dimanche.
C’est la première fois que la NASA parvient à envoyer des astronautes en orbite au départ des États-Unis depuis l’arrêt du programme spatial en 2011. Depuis neuf ans, l’agence américaine dépendait des fusées russes.
Il s’agit également de la première mission habitée menée à bien par une entreprise privée, ce qui marque sans doute le début d’un long partenariat entre SpaceX et la NASA pour réduire petit à petit la dépendance vis-à-vis de la Russie.
Stéphane Israël, le PDG de la société française de lancement de fusées Arianespace, a déclaré lors d’une interview pour France Info que l’Europe serait capable de faire de même avant 2030.
« Rien n’est impossible. Le programme spatial habité américain est reparti en 2012. Huit ans après, il y a eu ce vol habité SpaceX. Si l’Europe faisait le même choix, d’ici la fin de la décennie, ce serait possible », affirme-t-il.
Arianespace dépend du groupe Ariane, une filiale d’Airbus, et est à ce titre une société semi-publique. Elle cible principalement les firmes privées, qui se chargent par exemple d’envoyer des satellites de télécommunication dans l’espace.
Le privé à l’assaut de l’Espace
En revanche, SpaceX est une entreprise privée qui convoite les contrats publics lucratifs proposés par la NASA. Stéphane Israël reconnait que la société d’Elon Musk lui fait concurrence, et qu’Arianespace devra se montrer très compétitive sur le marché parce qu’elle « ne [peut] s’appuyer sur la même manne institutionnelle ».
L’Agence spatiale européenne (ESA), qui dicte le programme de travail d’Arianespace, s’est abstenue d’effectuer des missions habitées en raison des coûts liés au développement d’engins spatiaux de pointe.
En 1992, l’ESA annule le projet Hermès, un avion spatial réutilisable qui devait être lancé à partir d’une fusée Ariane 5. L’agence choisit alors de s’associer à la Russie pour mettre ses astronautes en orbite.
Stéphane Israël soutient fermement le lancement d’une fusée au départ de l’Europe. En octobre, il a déclaré qu’il profiterait d’une réunion ministérielle de l’ESA en 2022 pour faire pression en faveur d’un tel programme.
Après le décollage de SpaceX, le directeur d’Arianespace a reconnu que le jour où l’astronaute de l’ESA, Thomas Pesquet, pourrait décoller de la base spatiale française en Guyane à bord d’une fusée Ariane 6, « il se passera [it] quelque chose en Europe ».
Ariane 6
Le premier lancement d’Ariane 6 a été repoussé au début de l’année 2021 en raison du COVID-19. Par ailleurs, la navette n’est pas spécialement conçue pour transporter des astronautes.
Mais l’ESA pourrait changer sa politique si les missions habitées deviennent prioritaires. À la fin de l’année dernière, les 22 États membres de l’agence ont montré qu’ils souhaitaient investir davantage dans les missions spatiales en adoptant un plus gros budget que celui initialement prévu.
L’ESA, qui siège à Paris, n’est cependant pas en voie d’obtenir plus de fonds du côté de l’Union européenne. La semaine dernière, la Commission a prélevé près de 3 milliards d’euros de son budget, dans le cadre de la nouvelle proposition de budget à long terme.
Pourtant, la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen, a élevé la politique spatiale au rang des priorités après avoir accepté de créer un nouveau département dédié uniquement à la défense et à l’espace. Mais il semblerait que la nouvelle proposition de budget fasse une croix sur ce secteur, au profit d’autres .
Néanmoins, le commissaire européen Thierry Breton, qui supervise les politiques spatiales, se montre catégorique. « Sans accès autonome à l’espace, il ne peut y avoir de politique spatiale européenne. Au-delà d’Ariane 6, nous devons nous tourner vers l’avenir afin de nous préparer aux prochains bouleversements technologiques », soutient-il.
Le fonctionnaire français a déclaré sur Twitter que l’Europe était la deuxième puissance spatiale au monde, mais qu’elle ne pouvait se reposer sur ses succès passés. Et d’ajouter que l’UE doit faire preuve d’une « véritable ambition dans le domaine spatial ». « Nous y travaillons », affirme-t-il.
Vue du ciel
L’Europe concentre largement ses efforts spatiaux dans le marché des satellites commerciaux. Elle mise notamment beaucoup sur Copernicus, son programme d’observation de la Terre, et sur Galileo, le système européen de navigation par satellite. L’UE investit de plus dans le lancement d’orbiteurs privés dans l’espace.
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