Les droits de douane se répondent les uns aux autres depuis le retour de Donald Trump au pouvoir. Pour sanctionner autant que pour ne pas perdre la face, les États touchés par les majorations tarifaires du président américain répliquent en usant de la même arme. La spirale maléfique du protectionnisme s’est ainsi mise en place, avec pour victimes les consommateurs.
Il ne faut pas oublier que les droits de douane ne sont que des impôts acquittés par les contribuables des pays qui les décident. La surenchère actuelle ressemble à celle des années 1930 qui n’avait fait qu’accentuer la crise de 1929. Le protectionnisme, censé réduire la dépendance vis-à-vis de l’extérieur et favoriser l’emploi, est historiquement synonyme de ralentissement de la croissance.
En France, à la fin du XIXe siècle, les tarifs Méline destinés à protéger l’économie ont retardé sa modernisation. Les périodes de forte croissance en France coïncident avec l’ouverture des frontières, que ce soit durant le Second Empire ou pendant les Trente Glorieuses. Aux États-Unis, dans les années 1980, les droits de douane sur les aciers japonais ou coréens adoptés pour protéger la sidérurgie américaine ont abouti à la destruction de 200 000 emplois, en particulier dans l’automobile. Les entreprises américaines de ce secteur, contraintes d’acheter un acier plus cher et de moins bonne qualité, ont perdu d’importantes parts de marché à l’intérieur comme à l’extérieur.
Le choix du protectionnisme par les États-Unis constitue une erreur stratégique majeure.
Le protectionnisme ralentit la diffusion du progrès technique et pèse sur les gains de productivité. Le choix du protectionnisme par les États-Unis constitue une erreur stratégique majeure. Ce pays est la première puissance économique mondiale. Il est en situation de plein-emploi et enregistre un taux de croissance parmi les plus élevés au sein de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques)
Certes, sa balance commerciale est fortement déficitaire (920 milliards de dollars en 2024), conséquence du fort pouvoir d’achat des consommateurs américains et de l’éclatement des chaînes de valeur.
Ce déficit est en partie imputable à des importations réalisées par des entreprises américaines qui logent par ailleurs en partie leurs bénéfices liés dont les royalties liées aux marques, dans des pays étrangers comme l’Irlande. Les États-Unis pratiquent une spécialisation dans les domaines où ils disposent d’avantages comparatifs importants (la recherche, le financement et le marketing), laissant la production à d’autres pays.
Le déficit commercial est compensé par les transferts financiers. Les États-Unis attirent les capitaux du monde entier en raison de la forte rentabilité des investissements dans ce pays. Le dollar, première monnaie commerciale et de réserve du monde, permet de financer le déficit commercial sans difficulté.
Un combat de coqs sans intérêt.
Les répliques des États aux majorations des droits de douane américains sont populaires, mais alimentent l’attrition du commerce international et la fragmentation de l’économie mondiale. Elles remettent en cause le processus de libéralisation du commerce international engagé après la Seconde Guerre mondiale par les Alliés afin d’éviter la répétition des erreurs des années 1930. La raison voudrait que l’on réponde par le mépris, le combat de coqs étant en la matière sans intérêt.
Aider à la réorientation des échanges et au développement du marché intérieur sera plus utile. Par le jeu des droits de douane croisés, producteurs comme consommateurs sont pénalisés. « L’histoire ne se répète pas, elle bégaie » comme aimait à dire Karl Marx. Au moment où les États-Unis et leurs partenaires commerciaux s’engagent dans une escalade tarifaire risquée, n’oublions pas, la formule de Frédéric Bastiat, « Si les marchandises ne traversent pas les frontières, les soldats le feront ».
Seule une approche fondée sur la recherche d’équilibres commerciaux équitables et sur le respect des règles internationales permettra d’éviter les pièges d’un repli irrationnel.
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