La résolution condamnant « le régime d’apartheid » en Israël divise la gauche

La résolution condamnant « le régime d’apartheid » en Israël divise la gauche

La proposition de résolution communiste condamnant « l’apartheid » qui serait mis en place par Israël à l’égard des Palestiniens et appelant au boycott économique du pays, rejetée par l’Assemblée nationale, a ravivé jeudi (4 mai) des divergences à gauche de l’échiquier politique.

Un sujet éminemment politique s’est invité à l’Assemblée nationale, sur initiative du Parti communiste français (PCF), jeudi (4 mai). Pendant sa niche parlementaire, le groupe a remis sur la table une résolution déjà déposée l’été dernier, avec le soutien de certains collègues de La France insoumise (LFI), cosignataires du texte.

Objectif premier de la résolution : que l’Assemblée nationale condamne « le régime d’apartheid » qui serait institué en Israël au dam du peuple palestinien du fait de la colonisation. Le texte demandait également au gouvernement français « d’agir pour mettre fin à la colonisation » et au dit « régime d’apartheid », de reconnaître l’État palestinien, appelait à légaliser le boycott des produits israéliens et à prononcer un embargo sur la livraison d’armements à Israël.

C’est d’abord la « politique coloniale » de l’Etat d’Israël qui motive cette prise de position, explique le député PCF Jean-Paul Lecocq.

Pour le groupe LFI, Ersilia Soudais souligne l’importance de la résolution, car « la lutte interne pour la démocratie israélienne ne peut aboutir sans la fin de l’apartheid et de la colonisation ». « Il ne faut pas avoir peur des mots, ils permettent d’appréhender la réalité », a-t-elle affirmé pour justifier l’utilisation du mot « apartheid ».

Or sur les bancs socialistes, la résolution a provoqué une certaine gêne. Si le groupe du Parti socialiste (PS) a déserté le scrutin, seul Jérôme Guedj s’est prononcé en votant « contre » le texte.

L’élu, s’exprimant au nom du parti et s’adressant à ses alliés de gauche, a indiqué qu’« en utilisant la notion d’apartheid […] vous desservez la cause que vous prétendez pouvoir défendre » — tout en dénonçant la colonisation des territoires palestiniens et « la dérive illibérale » du gouvernement israélien.

Dans des termes semblables, un communiqué du PS, publié la veille du vote, « récuse et condamne l’utilisation du mot apartheid » de même que l’appel à la « légalisation du boycott contre les produits israéliens ».

Le PS s’est donc retrouvé isolé de ses alliés du PCF, de LFI et des quelques écologistes présents (8 sur 23), qui ont voté en faveur du texte. La majorité présidentielle (Renaissance, Horizons et Modem), la droite (Les Républicains) et l’extrême droite (Rassemblement national) ont dénoncé la résolution d’une partie de la gauche et se sont opposées au texte.

Résultat : le texte a été rejeté, à 71 voix « pour » et 199 voix « contre ».

Si le groupe du Parti socialiste (PS) a déserté le scrutin, seul Jérôme Guedj s’est prononcé en votant « contre » le texte. [Shutterstock/Victor Velter]

Attaque des centristes et de la droite 

Bien que les résolutions ne soient pas juridiquement contraignantes, les échanges furent agités. Outre les réserves de la gauche socialiste, le débat a été l’occasion pour les opposants à la NUPES de s’en prendre à une partie de la gauche.

La présidente du groupe Renaissance Aurore Bergé a accusé les signataires du texte de « blesser les citoyens israéliens » et d’« insulter la mémoire des innombrables victimes de ce régime [l’apartheid] », ajoutant que les Arabes israéliens « vivent pleinement en tant que citoyens de l’État d’Israël ».

La cheffe des parlementaires de la majorité a dénoncé le caractère « antisioniste » du texte, relevant « l’obsession » pour Israël de ses collègues de gauche et leur manque d’initiative pour dénoncer la situation dégradée des droits de l’homme en Syrie, au Yémen, ou encore en Chine concernant la répression des Ouïghours.

La résolution traduirait « une vision binaire et outrancière » de la relation entre Israéliens et Palestiniens, selon Annie Genevard, députée Les Républicains et secrétaire générale du parti de droite. Président (démissionnaire) du groupe d’amitié France-Palestine de l’Assemblée, Jean-Charles Larsonneur (Horizons) s’est inquiété d’un texte « contre-productif » et pour partie « irresponsable ».

« Le détournement des morts ne sert pas la cause de la paix » a lancé la secrétaire d’État chargée de l’Europe Laurence Boone, au nom du gouvernement.

Un point d’accord subsiste néanmoins, entre la position officielle et constante de la France – rappelée par Laurence Boone -, la résolution communiste et le communiqué du PS, qui tous appellent un processus de paix fondé sur la création de deux États souverains, Israël et la Palestine.

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