La motion de censure contre le gouvernement oblige les députés à prendre position

La motion de censure contre le gouvernement oblige les députés à prendre position

La coalition de partis de gauche NUPES n’a pas obtenu la majorité requise, et de loin, pour permettre l’adoption de sa motion de censure contre le gouvernement lundi (11 juillet). Mais le but était ailleurs : se positionner comme seule force d’opposition face aux députés macronistes et forcer la droite et l’extrême droite à prendre position.

La motion a été déposée mercredi (6 juillet), après que la Première ministre Elisabeth Borne a refusé d’organiser un vote de confiance à la suite de son discours de politique générale.

L’opposition de gauche avait alors considéré ce geste comme un « déni de démocratie », selon le député La France Insoumise (LFI) Adrien Quatennens, puisque le gouvernement ne bénéficie que d’une majorité relative dans l’hémicycle.

Personne ne pensait cependant sérieusement que la motion de censure serait adoptée, pas même Mathilde Panot, présidente du groupe parlementaire d’extrême gauche La France Insoumise et membre de la coalition NUPES, qui a déposé la motion.

«  Voici venu le moment de vérité  », a déclaré Mme Panot dans un discours prononcé lundi avant le vote. «  Ceux qui ne voteront pas cette motion de défiance seront les partisans de [la politique du gouvernement]  ».

Plus tôt dans la journée, le Rassemblement national avait clairement indiqué qu’il ne soutiendrait pas la motion. «  L’heure n’est pas aux basses mesures politiciennes  », a déclaré le député RN Alexandre Loubet. « Nous faisons passer l’intérêt du pays avant celui des partis, contrairement à [la NUPES] ».

Le parti de droite Les Républicains, après de nombreux doutes sur la stratégie à suivre, avait également déclaré qu’il ne « paralyserait  » pas le pays et se tenait prêt à des «  dialogues constructifs  » avec le parti au pouvoir, au cas par cas.

«  Voici venu le moment de vérité  », a déclaré Mathilde Panot dans un discours prononcé lundi avant le vote. «  Ceux qui ne voteront pas cette motion de défiance seront les partisans de [la politique du gouvernement]  ». [CHRISTOPHE PETIT TESSON/EPA]

« Majorité d’opportunité » entre gouvernement et RN

L’objectif d’une telle motion de censure était donc avant tout de contraindre les députés de l’opposition à se positionner pour ou contre le gouvernement.

Le fait que tous les groupes parlementaires, à l’exception de la NUPES, votent contre, a donné à la NUPES les arguments nécessaires pour pointer du doigt une connivence entre la majorité et l’extrême droite, premier groupe d’opposition parlementaire en nombre de sièges.

« Il y a même le risque d’une majorité d’opportunité que vous formerez avec le Rassemblement National » a déclaré Olivier Faure, Secrétaire Général du parti socialiste à l’attention des députés macronistes.

Dans son discours, Mme Panot a parlé de « lune de miel avec le Rassemblement National, consommée aux yeux de tous ».

Elle a donné comme preuve les annonces faites par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, au cours du week-end, d’expulser tous les immigrés qui commettent un crime «  quel que soit leur statut légal  ».

Cette initiative a été publiquement saluée par Marine Le Pen, présidente du groupe RN, lors des premières Questions au Gouvernement (QAG), qui « salue un pas » vers le RN, alimentant ainsi l’argument de la gauche selon lequel le gouvernement et le RN ne font qu’un.

La coalition présidentielle Ensemble ! nie tout accord tacite et condamne le « cirque » de la motion de censure, selon un Tweet du député macroniste Benjamin Haddad.

Un député RN contacté par EURACTIV a confirmé qu’il n’y avait pas de discussions avec Ensemble ! à ce stade.

«  Vous êtes fâchés  » à déclaré la Première ministre à l’égard de la NUPES dans un discours avant le vote. «  Vous n’avez pas gagné. Ni à la présidentielle, ni aux législatives  », a ajouté Mme Borne.

Opposition frontale jusqu’à quel point ?

La coalition NUPES, avec LFI à sa tête, s’est toujours positionnée en opposition frontale au gouvernement Borne II, avec en tête un seul objectif : créer une sensation d’unité et d’intransigeance en anticipation d’une dissolution de l’Assemblée nationale potentielle cet automne.

À l’occasion d’un entretien avec EURACTIV au début du mois, Éric Coquerel, député LFI et président de l’influente commission des Finances, avait à ce sujet déclaré que son parti serait «  un véritable contre-pouvoir à la politique néolibérale du gouvernement  ».

Le risque existe cependant que cette stratégie d’opposition frontale se retourne contre la NUPES, alors que les tensions au sein de la coalition sont déjà palpables.

Le secrétaire national du parti communiste, Fabien Roussel, a exprimé dans une interview lundi (11 juillet) ses désaccords avec la stratégie de LFI — «  nous respectons les débats parlementaires  », a-t-il dit, arguant qu’il refusait de «  bloquer systématiquement  » le gouvernement.

Force est de constater que cinq députés NUPES ont aussi manqué à l’appel lors du vote – en particulier Valérie Rabault, présidente du groupe socialiste. Spécialiste des questions budgétaires et des finances publiques, elle avait été pressentie pour être candidate NUPES à la présidence de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, avant d’être reléguée au profit de M. Coquerel.

Enfin, le député socialiste Boris Vallaud, dans une déclaration faite à l’Assemblée nationale la semaine dernière, a également adouci sa position anti-gouvernementale, montrant sa volonté de dialoguer avec la majorité «  si des mesures utiles sont introduites  ».

Les premiers débats sur le projet de loi d’urgence sur le pouvoir d’achat, qui ont débuté lundi, ont donné lieu à des face-à-face tendus entre les députés de la NUPES et leurs homologues macronistes.

Mais le soutien des Français lors d’une hypothétique dissolution se trouve peut-être là, dans la capacité à travailler de concert pour répondre à la hausse des prix et la remontée des contaminations Covid-19.

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