La gauche se fracture sur l’union autour de Jean-Luc Mélenchon

La gauche se fracture sur l’union autour de Jean-Luc Mélenchon

Pendant que se déroulent les négociations de La France insoumise avec les Verts, les socialistes et les communistes, en vue des élections législatives, les états-majors sont divisés sur la forme que prendrait une telle union.

Le parti de Jean-Luc Mélenchon prône l’idée d’un regroupement naturel autour de son leader, qui a dominé l’élection présidentielle par rapport aux autres partis de gauche, bien qu’il ait échoué à atteindre le second tour de l’élection présidentielle pour la troisième fois consécutive.

En effet, avec presque 22 % de voix, M. Mélenchon a largement devancé le candidat écologiste Yannick Jadot (4,63 %), le communiste Fabien Roussel (2,28 %) et la socialiste Anne Hidalgo (1,75 %).

Mais si La France insoumise propose une alliance basée sur les résultats à l’élection présidentielle pour la répartition des circonscriptions, les derniers arrivés font valoir que M. Mélenchon a bénéficié d’un effet « vote utile », qui aurait biaisé les rapports de force dans le bloc de gauche.

Des rapports de force comparables à ceux de la présidentielle se retrouvent dans les premiers sondages pour les élections législatives. 19 % des électeurs affirment vouloir voter pour un candidat de La France Insoumise, 8 % pour un écologiste, 5 % pour un socialiste et 3 % pour un communiste. La domination de LFI se confirme, mais les ordres de grandeur ne sont pas les mêmes.

Les Verts tentés par l’alliance, Yannick Jadot freine sur Jean-Luc Mélenchon

Julien Bayou, le patron du parti écologiste, est tenté par la proposition des Insoumis, et reconnaît, dans un entretien à Libération mercredi (27 avril), leur « rôle prépondérant » au vu des résultats de la dernière élection, mais avertit que « refaire le match de la présidentielle, c’est se condamner à la défaite […] La représentation de chacun doit être juste. C’est une condition de la victoire ».

« Jean-Luc Mélenchon veut-il être Premier ministre ? Nous disons chiche ! Gagnons ensemble », poursuit M. Bayou, dans la lignée des positions exprimées par Sandrine Rousseau et Grégory Doucet, deux personnalités influentes des Verts, qui représentent une ligne plus radicale que celle de M. Jadot.

À l’inverse, Yannick Jadot refuse l’idée d’un leadership de M. Mélenchon et plaide pour une « coalition très ouverte […] autour d’un projet »« Si, à un moment donné, cette coalition ne respecte pas la diversité et l’identité de ses partenaires, ce sera sans moi » a-t-il tranché lors de sa première interview après la défaite, sur France Inter mardi.

Le Parti socialiste au bord de l’implosion

Les tensions sont d’autant plus vives dans le Parti socialiste, où une rupture serait en train de se consommer entre ceux qui sont favorables à un rapprochement avec La France insoumise et le courant minoritaire qui craint de se faire phagocyter par l’organisation de Jean-Luc Mélenchon.

Pierre Jouvet, porte-parole du Parti socialiste et chef de la délégation responsable des négociations avec le mouvement de M. Mélenchon, a indiqué mercredi matin sur Sud Radio que « le rassemblement est possible et nécessaire ». Dans la foulée du Premier secrétaire du PS Olivier Faure, M. Jouvet a invité ceux qui s’opposent à cette ligne à « partir » et quitter le parti.

Il tacle ainsi les voix dissonantes, comme celle d’Hélène Geoffroy, membre du Bureau national du parti, selon qui « ce n’est pas une négociation ou un accord qui est proposé […] c’est une reddition ».

L’ancien Premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis tient des propos similaires, et demandait il y a une semaine la démission d’Olivier Faure. Selon M. Cambadélis, le but de M. Mélenchon est « l’intégration [du PS] dans l’Union populaire », son mouvement.

Des divergences sur des sujets de fond

Aussi bien pour les écologistes que pour les socialistes, des désaccords de fond sont à l’origine des tensions aussi bien internes qu’avec le mouvement de M. Mélenchon.

Notamment, la « désobéissance aux règles européennes » prônée par Manuel Bompart, eurodéputé LFI, qui constitue un point de friction important.

« Hors de question d’organiser une Europe à la carte. […] Hors de question de mettre un doigt dans un engrenage qui sortirait la France de l’Europe » a mis en garde M. Bayou pour Europe Ecologie-Les Verts, sur le même ton que Yannick Jadot.

M. Cambadélis, irrité par « la manière plébiscitaire de concevoir l’alliance » de la part des Insoumis, dont il rappelle les faibles scores lors des élections intermédiaires, se dit en désaccord avec « l’orientation du programme de Jean-Luc Mélenchon, que ce soit sur les questions européennes ou économiques ».

Le rapport à la laïcité et la proximité avec des « personnages anti-républicains » sont aussi mis en cause par Boris Venon, un responsable socialiste, dans sa lettre de démission du Parti.

Et sur la difficulté d’aboutir à un compromis, l’écologiste Julien Bayou résume ainsi la situation dans Libération : « Reconnaissons d’abord que la tâche n’est pas aisée : nous cherchons à faire en quelques semaines ce que nous n’avons pas pu ou pas voulu construire en cinq ans ».

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