Dans le cadre de l’Année européenne du rail, la Commission de Bruxelles a promu une opération dénommée « Connecting Europe Express » qui entre septembre et octobre, a permis à des fonctionnaires européens de sillonner l’Union non pas en avion mais en train. Ces derniers ont voyagé grâce à ce mode de transport dans 26 des 27 États de l’Union. Ils ont été bien souvent contraints de voyager dans des wagons qui avaient plus de quarante ans d’âge, wagons qui ne respectaient pas tous les certificats de sécurité de l’Union. Ils ont constaté la vétusté des infrastructures et l’absence de coordination ferroviaire.
Ces dernières années, les États ont investi essentiellement dans la réalisation de lignes nationales à grande vitesse. Pour des compagnies ferroviaires comme la Deutsche Bahn en Allemagne et la SNCF en France, les voyages transfrontaliers sont une activité annexe. La création de lignes internationales est jugée potentiellement dangereuse car elle permet à des concurrents de s’engouffrer sur les marchés nationaux. L’espace ferroviaire unique européen existe en termes d’ouverture de marché mais reste à construire physiquement.
Tous les déplacements de moins de 500 km neutres en carbone d’ici 2030
La stratégie de mobilité de l’Union européenne appelle à rendre tous les déplacements de moins de 500 km neutres en carbone d’ici 2030. La Commission de Bruxelles demande aux États de privilégier le train électrique comme mode de transport, pour atteindre cet objectif.
Même en tenant compte de l’utilisation de combustibles fossiles dans la production d’électricité, les trains produisent en moyenne environ un cinquième des émissions de gaz à effet de serre par passager-kilomètre produites par les avions et moins de la moitié de celles des bus, selon l’Agence européenne pour l’environnement. En 2019, seuls 8 % de la distance parcourue par voie terrestre dans l’Union se faisait par chemin de fer. Même dans les pays les mieux dotés en lignes ferroviaires, l’Autriche et les Pays-Bas, les chiffres sont de 13 % et 11 %. Dans ces pays, plus de 75 % des déplacements terrestres sont réalisés en voiture.
L’espace ferroviaire européen est la juxtaposition de plusieurs réseaux nationaux
En Allemagne, seulement 6,5 millions de voyages internationaux en direction des autres pays de l’Union ont été réalisés en train en 2019, contre 110 millions en avion.
L’espace ferroviaire européen est la juxtaposition de plusieurs réseaux nationaux. Quatre niveaux de tension différents sont utilisés, les systèmes de signalisation et de sécurité ne sont pas interconnectés et l’espacement des rails n’est pas le même dans tous les États. Les pays baltes utilisent l’écartement le plus large, en vigueur en Russie, quand l’Espagne et le Portugal ont, au contraire, l’écartement le plus faible.
L’Agence ferroviaire européenne tente de promouvoir une convergence des normes mais les progrès sont très lents. L’ouverture à la concurrence reste toute relative, ce qui limite le développement de liaisons internationales. La séparation de la gestion des infrastructures des opérateurs de transports est bien souvent virtuelle.
En France, le réseau est dans le giron de la SNCF. En Allemagne, la Deutsche Bahn qui a la charge également des infrastructures facture des frais de service élevés, dissuadant ainsi la concurrence. Il est à noter que la Suède ne demande que le paiement des coûts de maintenance supplémentaire dont les nouveaux utilisateurs ont besoin, ce qui a favorisé l’arrivée de nouveaux opérateurs comme FlixTrain et MTR qui ont réduit les prix.
Les compagnies historiques possèdent bien souvent les gares leur offrant un avantage concurrentiel évident en matière logistique. Au niveau de l’aérien, les aéroports sont gérés de manière indépendante, ce qui garantit un minimum de concurrence entre les compagnies même si Air France ou Lufthansa sont évidemment mieux traitées dans leur pays d’origine.
Le train plus cher que le low-cost
Le développement du transport ferroviaire international est également freiné par la non-interopérabilité des systèmes de billetterie. Seules quelques agences vendent des billets de train sur tout le continent. En cas de remboursement, les opérateurs ne sont responsables que de la partie du voyage sur leurs propres trains. Le train est peu compétitif par rapport à l’avion en raison non seulement des temps de transports mais aussi du coût. Les billets de train internationaux sont souvent plus chers que ceux mis en vente pas les compagnies aériennes low-cost.
Pour favoriser le train, certains demandent de taxer les émissions carbones des avions, d’autres souhaitent l’interdiction de ces derniers pour les trajets inférieurs à 4 heures.
L’Europe du fer reste de papier
Un recours au rail pour les déplacements intra-européens nécessitera un effort d’investissement important avec la réalisation de lignes à grande vitesse sillonnant l’Europe. Compte tenu des coûts des infrastructures, sans appui financier communautaire, ce projet a de fortes chances de rester lettre morte. Les difficultés financières récurrentes de L’Eurostar ou du Thalys n’incitent pas à la mise en place d’une Europe du fer. Par ailleurs, les populations souhaitent que les pouvoirs publics privilégient non pas les liaisons internationales mais celles du quotidien. En France, plusieurs partis politiques s’opposent à la réalisation de la ligne à grande vitesse Bordeaux/Toulouse ou à la modernisation de la Gare du Nord avec la création d’un terminal international.
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