Le Parti socialiste européen (PSE), dans un programme électoral obtenu par Euractiv, souhaite que l’Union européenne « renforce » ses relations avec Washington et Pékin, tout en rejetant l’idée de « pause » règlementaire pour le Pacte vert pour l’Europe (Green Deal).
Le programme électoral, qui fait encore l’objet de débats au sein du parti, donnera la marche à suivre tout au long de la campagne des élections européennes. Une version finale doit être adoptée lors d’un congrès à Rome le 2 mars.
Renforcer la politique étrangère européenne
Le manifeste politique se concentre avant tout sur les relations qu’entretient l’UE avec le reste du monde, appelant à « renouveler » les accords de coopération avec des pays tiers.
« Nous renforcerons la coopération européenne avec les États-Unis et la Chine […] nous construirons un nouveau partenariat d’égal à égal avec le Sud, y compris le lancement d’un nouvel agenda progressiste UE-Amérique latine et d’un partenariat Afrique-UE sur l’économie, l’énergie verte, les changements climatiques, la migration et la démocratie ».
Le renforcement des liens avec Washington dépendra toutefois fortement de l’issue encore incertaine des élections présidentielles américaines, qui pourraient entraîner le retour de l’ancien président Donald Trump.
De façon étonnante, le manifeste préconise une relation forte avec Pékin sans conditions. C’est un changement majeur d’avec les positions du PSE par le passé, dont les membres avaient soutenu avec force des résolutions suggérant que le respect des droits de l’homme devait être au centre des relations entre les deux puissances.
En ce qui concerne la guerre d’agression russe en Ukraine, le parti appelle de ses vœux à un soutien accru à l’industrie de défense européenne, à une coopération renforcée en matière de renseignement et de cybersécurité, et à un soutien en faveur d’une politique d’élargissement ambitieuse.
Les socialistes placent également la guerre au Proche-Orient, et le risque d’extension du conflit, en tête de leurs priorités. Le projet appelle notamment à la tenue d’une conférence internationale pour parvenir à une solution à deux États pour Israël et la Palestine.
« L’UE doit parler d’une seule voix en matière de politique étrangère et prendre davantage de décisions à la majorité », mettant fin au sacro-saint vote à l’unanimité qui régit aujourd’hui les décisions relatives à la politique étrangère européenne.
Le texte demande également une politique commerciale européenne « ambitieuse » qui promeut des « normes sociales et environnementales contraignantes », un sujet de préoccupation qui est devenu particulièrement important dans les négociations UE-Mercosur.
Pas de « pause » dans le Green Deal, pas d’austérité
Le projet de manifeste s’oppose aux plaintes croissantes à travers le bloc sur la surrèglementation et une possible pause « règlementaire » dans la mise en œuvre du Green Deal, demandée par le président français Emmanuel Macron et reprise dans le projet de manifeste du PPE.
« Dans la course pour atteindre la neutralité climatique, personne ne doit être abandonné, et il ne peut y avoir de pause », peut-on lire dans le projet, ajoutant que le Green Deal doit rester au cœur des priorités.
La deuxième priorité la plus importante après « des emplois de qualité pour tous » est le concept d’un « Green Social Deal », qui place la politique sociale et les droits des travailleurs au centre de la transition verte.
Ce concept devrait également être l’un des principaux piliers de la stratégie des Verts européens, préparant le terrain pour une bataille électorale dans laquelle les deux partis essaieront de s’arracher des électeurs.
Contrairement au PPE, les socialistes maintiennent l’environnement et la biodiversité comme moteur du Green Deal. Le document, du moins pour l’instant, ne mentionne pas les agriculteurs ou l’agriculture.
En ce qui concerne les finances, les socialistes « disent non à l’austérité » et proposent de stimuler l’emprunt commun de l’Union avec une capacité d’investissement permanente de l’UE « et un budget européen ambitieux ».
Un budget européen renforcé financerait une stratégie « Made in Europe », y compris le financement conjoint de projets d’intérêt européen commun et un « Plan d’investissement pour les transitions verte et numérique » afin de stimuler la réindustrialisation et de mettre en œuvre une économie circulaire.
Libéraux et conservateurs : une insulte à l’histoire européenne
Les socialistes réaffirment leur engagement à lutter contre la poussée de l’extrême droite et à ne jamais dépasser la « ligne rouge » qui consiste à collaborer avec elle : « Nos valeurs sont inconciliables parce qu’elles opposent les gens entre eux, alors que nous voulons les rassembler ».
En outre, ils dénoncent la coopération des conservateurs et des libéraux avec l’extrême droite partout en Europe, comme en Suède, en Finlande, aux Pays-Bas et en Italie, en mettant en garde les électeurs contre les graves menaces que l’extrême droite ferait peser sur « l’État de droit, la liberté des médias et les droits des femmes, des minorités, des migrants, des syndicats et des communautés LGBTI ».
« Nous condamnons les partis conservateurs et libéraux qui ont permis à l’extrême droite d’accéder au pouvoir. C’est une insulte à nos valeurs et à notre histoire européenne », peut-on lire dans le projet.
Pour sa part, le PPE a souligné à plusieurs reprises au niveau de l’UE qu’il rejetait une coalition avec l’extrême droite.
Le secrétaire général du PPE, Thanasis Bakolas, déclarait à Euractiv en septembre 2023 que le centre droit envisageait plutôt une coalition pro-UE avec les socialistes, les Verts et les libéraux.
Dans une attaque claire contre le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, les socialistes se sont également prononcés en faveur de « règles et de sanctions claires, garantissant qu’aucun financement de l’UE ne parvienne à des gouvernements autocratiques qui sapent les institutions démocratiques et les droits fondamentaux ».