Une ministre légitime pour les Français de l’étranger : Eléonore Caroit

Une ministre légitime pour les Français de l’étranger : Eléonore Caroit

Eléonore Caroit, première franco-dominicaine à entrer dans un gouvernement français, a été nommée ce dimanche 12 octobre 2025 Ministre déléguée chargée de la Francophonie, des Partenariats internationaux et des Français de l’étranger.

Cette nomination, annoncée dans le cadre de la formation du gouvernement Lecornu II, marque un tournant pour les 2,5 millions de Français établis hors de France et pour les 88 États membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Députée des Français d’Amérique latine et des Caraïbes, avocate spécialisée en droit des affaires, Eléonore Caroit incarne une nouvelle génération de responsables politiques engagés pour la défense des intérêts des expatriés et le rayonnement de la langue française dans le monde.

Mais quels sont les défis qui l’attendent ? Entre la pérennité du financement de la caisse des Français de l’étranger, la gestion du réseau de l’AEFE, les élections consulaires de mai 2026, et les tensions géopolitiques au sein de la Francophonie, son mandat s’annonce ambitieux. Lesfrancais.press fait le point.

Eléonore Caroit : une trajectoire au service des Français de l’étranger

Eléonore Caroit a toujours mis en avant son attachement aux Français de l’étranger, qu’elle qualifie de « force vive de la France ». Son parcours personnel — franco-dominicaine, mariée à un Suisse, avocate internationale — lui donne une légitimité unique pour comprendre les enjeux des expatriés : fiscalité, scolarité, représentation politique, et accès aux services consulaires. Lors de son élection comme députée, elle avait insisté sur la nécessité de « rendre la scolarité française plus accessible » et de « créer un label entreprise ‘Français de l’étranger’ » pour valoriser l’entrepreneuriat des expatriés

Eléonore Caroit

Membre du groupe Renaissance (majorité présidentielle), Eléonore Caroit s’est distinguée par son travail parlementaire sur la protection des droits des expatriés, la simplification des démarches administratives, et la défense du réseau éducatif français à l’étranger. Son engagement pour la ratification du traité sur la haute mer et sa participation active aux travaux de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) ont renforcé sa crédibilité sur les scènes nationale et internationale.

Les défis majeurs pour les Français de l’étranger

Premier défi : le financement de la caisse des Français de l’étranger, un équilibre est à trouver rapidement. Car La caisse des Français de l’étranger (CFE) est un pilier du système de protection sociale des expatriés. Pourtant, son financement est régulièrement mis à mal par les restrictions budgétaires. En 2025, la CFE a vu ses subventions diminuer, tandis que le nombre de bénéficiaires ne cesse d’augmenter (+5 % en 2024). Eléonore Caroit devra négocier avec Bercy pour garantir la pérennité de ce dispositif, tout en évitant une hausse des cotisations pour les expatriés, déjà soumis à des pressions fiscales locales.

Le second défi consistera à maintenir une excellence éducative dans le réseau AEFE  malgré les contraintes budgétaires. Car l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) gère 600 établissements dans 138 pays, accueillant 400 000 élèves. Mais le réseau fait face à des coupes budgétaires drastiques : -14 millions d’euros en 2025, -24 millions en 2026, et la suppression de 150 postes sur trois ans. Ces restrictions menacent la qualité de l’enseignement et l’accessibilité financière pour les familles expatriées. Eléonore Caroit devra trouver des solutions pour maintenir l’excellence du réseau, tout en explorant de nouveaux modèles de financement (partenariats publics-privés, mécénat, etc.)

Elections consulaires - Résultats - Vote des Français et des Françaises établis hors de France
Elections consulaires - Résultats - Vote des Français et des Françaises établis hors de France - Photo d'illustration de 2021 ©MAE

Dernier défi, organiser les élections consulaires de mai 2026 ! Les prochaines élections consulaires locales des Français de l’étranger seront un test pour la nouvelle ministre. Ces élections, qui renouvelleront les 442 conseillers consulaires puis les 90 membres de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), sont cruciales pour la représentation des expatriés. Les défis sont nombreux :

  • Participation : seulement 15 % de participation en 2021, malgré l’introduction du vote électronique.
  • Sécurité : les élections de 2026 se dérouleront dans un contexte géopolitique tendu (crise au Sahel, tensions en Amérique latine, en Russie, aux USA, etc.).
  • Modernisation : Eléonore Caroit devra finaliser le déploiement de la nouvelle version vote par internet, qui devait être testé en septembre 2025, pour faciliter l’accès au vote des expatriés mais dont la réalisation a été reporté du fait de l’absence de ministre en fonction.

La Francophonie : entre unité et fragmentation

L’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) traverse une crise sans précédent. En mars 2025, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont annoncé leur retrait simultané, dénonçant un « néocolonialisme » et un manque de représentation. 

Sommet de la Francophonie - Villers-Cotterêts
Sommet de la Francophonie - Villers-Cotterêts 2024©AFP

Ces départs, symboliques et politiques, affaiblissent l’OIF et remettent en cause son modèle de coopération. Eléonore Caroit devra travailler à une refonte de la gouvernance de l’OIF, pour redonner confiance aux États membres et éviter de nouveaux départs.

A ce jour, la Francophonie représente 88 États et gouvernements, soit 321 millions de locuteurs et un PIB combiné de 8,7 % du PIB mondial. Pourtant, les échanges économiques entre pays francophones restent faibles (moins de 10 % du commerce intra-francophone). Les défis sont multiples :

  • Numérique : développer une stratégie commune pour le français dans l’IA, les plateformes numériques, et l’éducation en ligne.
  • Économie : renforcer les partenariats Sud-Sud et Nord-Sud, notamment en Afrique, où la croissance démographique et économique est la plus forte.
  • Culture : promouvoir la diversité culturelle francophone face à la domination de l’anglais et du chinois.

Eléonore Caroit devra aussi redonner un sens politique à la Francophonie, en la positionnant comme un acteur clé des enjeux globaux :

  • Climat : porter une voix francophone dans les négociations internationales.
  • Paix et sécurité : renforcer la coopération en matière de prévention des conflits, notamment en Afrique.
  • Éducation et jeunesse : développer les échanges universitaires et la mobilité des jeunes francophone

Un mandat ambitieux pour une ministre emblématique ?

La nomination d’Eléonore Caroit à la tête du ministère de la Francophonie et des Français de l’étranger envoie un signal fort : la France reconnaît l’importance stratégique de ses expatriés et de la langue française dans le monde. Son parcours, son engagement, et sa connaissance fine des enjeux font d’elle une ministre légitime pour relever les défis qui l’attendent.

Pour les Français de l’étranger, les mois à venir seront décisifs : financement de la CFE, sauvegarde du réseau AEFE, et organisation des élections consulaires de 2026. Pour la Francophonie, il s’agira de surmonter les divisions, de renforcer les coopérations économiques et culturelles, et de redonner un sens politique à une organisation en quête de renouveau.

Eléonore Caroit a les cartes en main pour marquer l’histoire surtout que son portefeuille des Français de l’étranger est un ministère de plein exercice. Reste à savoir si elle parviendra à concilier les attentes des expatriés, les contraintes budgétaires, et les ambitions géopolitiques de la France. 

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