Alors que 2022 avait été une année de fortes incertitudes, 2023 fut celle des inégalités. Après la pandémie de COVID-19 et des pertes dévastatrices, l’économie mondiale peine globalement à reprendre de la vigueur, plombée par les effets conjugués de multiples crises : changement climatique, conflits, insécurité alimentaire, pour n’en citer que quelques-unes.
Comme souvent, cependant, ce sont les pays les plus pauvres du monde qui sont les plus durement touchés. Beaucoup d’entre eux, déjà surendettés, se trouvent toujours plus à court de ressources financières. Sur le front de l’emploi, les plateformes numériques occupent désormais une place essentielle sur les marchés du travail du monde entier, mais seuls ceux qui sont en mesure d’y accéder peuvent tirer parti de cette nouvelle source de revenus. À tous ces défis vient s’ajouter la crise des réfugiés et avec elle le besoin impératif d’améliorer les politiques migratoires afin de non seulement trouver des solutions, mais aussi stimuler la croissance économique et la prospérité.
Pauvreté
L’extrême pauvreté a certes baissé dans les pays à revenu intermédiaire, mais elle s’est aggravée dans les pays les plus pauvres et ceux en situation de fragilité, conflit et violence. La persistance de la pauvreté dans ces pays complique d’autant plus la réalisation d’autres grands objectifs de développement mondiaux.
Dette
La dette extérieure n’a cessé d’augmenter depuis dix ans dans toutes les régions du monde.
L’édition 2022 avait révélé des risques croissants pour l’ensemble des économies en développement (qu’elles soient à revenu faible ou intermédiaire), tout en soulignant des tensions de plus en plus aiguës dans les pays les plus pauvres du monde, accablés par le fardeau croissant du service de la dette.
Une tendance qui s’est poursuivie cette année : selon le rapport publié en décembre 2023, les pays en développement ont dépensé en 2022 un montant record de 443,5 milliards de dollars pour assurer le service de leur dette publique extérieure et des dettes garanties par l’État. Dans les pays les plus pauvres admis à emprunter auprès de l’Association internationale de développement (IDA), le coût total du service de la dette a atteint le niveau sans précédent de 88,9 milliards de dollars, soit une hausse de 4,8 % par rapport à 2021. La hausse des coûts d’emprunt fait courir un risque de crise de la dette aux pays les plus pauvres, où elle détourne le peu de ressources disponibles au détriment de secteurs critiques comme la santé, l’éducation et l’environnement.
Perspectives économiques mondiales
Selon l’édition de décembre 2023 des Perspectives économiques mondiales, la croissance marque fortement le pas sous l’effet de l’inflation, de la hausse des taux d’intérêt, de la diminution des investissements et des perturbations causées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Les prévisions de la Banque mondiale tablent sur une croissance de l’économie mondiale de 1,7 % en 2023 et 2,7 % en 2024, avec un ralentissement marqué et généralisé. Elles ont été revues à la baisse pour 95 % des économies avancées et près de 70 % des économies de marché émergentes et en développement.
Les perspectives économiques des pays en développement se sont assombries en 2023. Les quatre premières années de la décennie 2020 ont affiché des taux de croissance parmi les plus faibles depuis trente ans.
Climat
Le changement climatique n’épargne personne ni aucune économie. D’ici à 2050, les dérèglements du climat risquent de contraindre 216 millions de personnes à migrer à l’intérieur de leur pays. Le stress hydrique va s’aggraver et les rendements agricoles diminuer, en particulier dans les régions du monde qui souffrent déjà d’une insécurité alimentaire. Par ailleurs, les systèmes agroalimentaires sont responsables d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre. Pour lutter contre le changement climatique et permettre en même temps aux populations, écoles, hôpitaux et entreprises d’avoir accès à l’électricité, il faut produire des énergies propres. Cela passe par le développement des énergies renouvelables et l’amélioration de l’efficacité énergétique, et par des investissements dans l’électrification à grande échelle, tout en évitant la construction de nouvelles centrales au charbon et la mise hors service des anciennes installations (…).
Il est possible de réduire les émissions et d’accroître la résilience, mais cela suppose des évolutions sociales, économiques et technologiques majeures.
Dans un monde où les crises et les chocs frappent plus durement les populations les plus pauvres, le changement climatique n’échappe pas à la règle. Et la lutte contre le changement climatique revêt une importance capitale pour relever le défi du développement et bâtir une planète vivable.
Perspectives des marchés des produits de base
Une escalade du conflit en cours au Moyen-Orient, qui vient s’ajouter aux bouleversements causés par l’invasion russe de l’Ukraine, risque d’entraîner les marchés mondiaux des matières premières en terrain inconnu, a alerté le dernier rapport Commodity Markets Outlook.
Les prix mondiaux des produits de base ont chuté de près de 25 % en 2023 par rapport à 2022, la plus forte baisse depuis la pandémie. Le déclenchement du conflit au Moyen-Orient au début du mois d’octobre a entraîné une remontée initiale des cours, mais l’impact a été globalement limité jusqu’ici. Pour la plupart des produits de base, les prix restent supérieurs à leur niveau moyen sur la période 2015-2019.
Les Femmes, l’Entreprise et le Droit
Près de 2,4 milliards de femmes en âge de travailler dans le monde ne bénéficient toujours pas des mêmes droits que les hommes. Le rapport sur Les Femmes, l’Entreprise et le Droit (WBL) analyse l’évolution des lois et réglementations ayant des répercussions sur les opportunités économiques qui s’offrent aux femmes dans 190 pays. L’objectif est de mettre en évidence les obstacles qui entravent la participation des femmes à la vie économique et la manière dont on peut réformer des législations discriminatoires.
Le rythme des réformes en faveur des droits des femmes chute à son niveau le plus bas depuis 20 ans.
Rapport sur le développement dans le monde - Migrations
La question migratoire est l’un des défis du développement les plus urgents. Environ 184 millions de personnes — soit 2,3 % de la population mondiale — vivent actuellement en dehors de leur pays de nationalité, la majeure partie se trouvant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. La manière dont on aborde les flux migratoires et les moyens mis en œuvre pour protéger ceux qui quittent leur pays d’origine joue un rôle essentiel dans le développement économique et la réussite des migrants et des communautés d’accueil.
Travailler sans frontières
Le nomadisme digital représente déjà 12 % du marché de l’emploi mondial. Il constitue une source croissante de revenus pour des millions de personnes, qui y voient comme principaux avantages la flexibilité et la possibilité d’un revenu supplémentaire. La demande de main-d’œuvre sur le marché du nomadisme digital augmente plus rapidement dans les pays en développement que dans les pays industrialisés.
Mais si les plateformes numériques locales jouent un rôle essentiel, elles ont du mal à établir un modèle économique viable.
Auteur/Autrice
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Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.
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