Le RNH ? Soit le statut de résident non habituel a été inventé par le Portugal en 2009 et a fait la joie de nombreux retraités venus de toute l’Europe, mais aussi, plus récemment, de télétravailleurs. Mais dès le premier janvier 2024, les nouveaux arrivants ne pourront plus solliciter cette disposition fiscale. On revient pour les Français de l’étranger sur l’histoire du RNH.
Le RNH, qu'est-ce que c'est ? Pour qui ?
Le Portugal avait introduit en 2009, en pleine crise économique et financière, le régime fiscal des résidents non habituels (« régime RNH ») pour relancer son économie par la consommation et l’investissement. Ce régime prévoyait des avantages spécifiques auxquels s’ajoutent d’autres aspects favorables du droit fiscal portugais de droit commun.
Pour être éligible à ce régime, le contribuable doit remplir cumulativement trois critères, à savoir :
– Devenir résident fiscal portugais ;
– Ne pas avoir été résident fiscal au Portugal au cours des cinq ans précédents ;
– Soumettre une demande électronique aux autorités fiscales portugaises, au plus tard le 31 mars de l’exercice suivant celui durant lequel le contribuable est devenu résident fiscal portugais.
Le régime RNH permet au contribuable en question de bénéficier d’une quasi-absence d’imposition sur ses revenus pendant un maximum de dix années consécutives, pour autant qu’il reste résident fiscal portugais chaque année.
Ainsi, en vertu de la plupart des conventions fiscales, les pensions sont généralement imposables seulement dans le pays de résidence du bénéficiaire (c’est-à-dire le Portugal) à l’exception des pensions versées aux anciens fonctionnaires (retraites dites « publiques ») qui restent généralement imposables dans le pays de source du revenu. Cela a eu pour conséquence d’aboutir à une double exonération d’impôt sur les retraites dites « privées », ce qui a posé de nombreux problèmes légaux amenant à une première modification en 2019. Suite à une action d’Etats, comme la France, devant la Cour européenne, un premier prélèvement de 10% avait été mis en place par le Portugal.
Pour les revenus passifs de source étrangère, ils sont aussi exonérés d’impôt au Portugal s’ils peuvent être imposés dans le pays d’origine en vertu d’une convention fiscale applicable. En pratique, cela signifie que les dividendes, intérêts et revenus locatifs de source étrangère étaient exonérés d’impôt au Portugal en vertu de la plupart des conventions fiscales.
Au final, cette mesure a profité à quelque 50.000 personnes, en majorité des retraités français, 30 000, qui se sont établis surtout dans la région de Lisbonne ou dans les stations balnéaires de l’Algarve (sud) et qui ont de ce fait largement contribué à la relance du marché immobilier.
Pourquoi mettre fin au RNH ?
Comme les « Golden Visas » accordés à de riches investisseurs de pays en dehors de l’Union européenne ou le régime fiscal visant à attirer des « nomades numériques », le dispositif était régulièrement cité parmi les facteurs expliquant la flambée des prix de l’immobilier. Entre 2012 et 2021, le coût du logement a progressé de 78% au Portugal, contre 35% dans l’ensemble de l’Union Européenne, selon une étude de la Fondation portugaise Francisco Manuel dos Santos.
Au deuxième trimestre 2023, le loyer médian a encore bondi de 11% en glissement annuel, d’après des données officielles publiées la semaine dernière.
Dans ce contexte, des milliers de Portugais sont descendus samedi 30 septembre dans les rues de Lisbonne et d’une vingtaine d’autres villes du pays, pour réclamer une action plus ferme de la part du gouvernement.
C’est donc pour tenter de limiter la flambée des prix immobiliers, mais aussi des services que le Portugal met fin à cet avantage fiscal. Un état de fait que ne contestent pas les Français sur place.
Que vont faire les Français ?
Sur les groupes de Français installés au Portugal, on affirme sa volonté de rester. Car comme nous l’indique un retraité sur place, « même en étant imposés au Portugal, une chose est sûre, c’est que la vie est beaucoup moins chère et beaucoup plus agréable ».
Ce qui est sûr, c’est que comme toute loi, elle n’a pas d’effet rétroactif, donc tous ceux installés avant le premier janvier 2024 et ayant déposé leur dossier complet avant le 31 décembre pourront bénéficier du statut pendant 10 ans. Pour ceux qui ont déjà ce statut, ils continueront à en bénéficier jusqu’à extinction du délai de 10 ans. Après, comme c’est déjà le cas pour les premiers arrivants, c’est l’imposition classique du Portugal qui deviendra la règle. Et comme nous l’indiquait notre témoin, la plupart, qui ont dépassé les 10 années sur place, restent au Portugal, séduits par le cadre de vie, la sécurité et la culture portugaise, sans oublier que le coût de la vie est bien inférieur à celui de l’hexagone.
Au final, c’est le flux d’arrivées qui risque de se tarir, mais la communauté installée sur place compte bien rester dans son paradis du bout de l’Europe.
Auteur/Autrice
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Paul Herikso est franco-norvégien né à Paris d'une maman française et d'un papa norvégien. Après des études de tourisme, il retrouva sa famille paternelle en Norvège où il participa au développement des croisières. Il est aussi correspondant pour lesfrancais.press
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