De quoi avoir peur ? 

De quoi avoir peur ? 

« Qu’ils me haïssent, pourvu qu’ils me craignent », disait Caligula. Le pouvoir fait peur, la pouvoir a peur, la peur gouverne. Il y a prolifération de collapsologues (notamment en France). Le virus est tout autant un virus de la peur que biologique. Entre le climat, le plastique, le nucléaire, le pétrole, le gaz, la baisse de la natalité, la pression migratoire, le vieillissement, le rêve (cauchemar) chinois, le terrorisme, l’islamisme radical, le transhumanisme et le wokisme déconstructeur, tous aux abris ! Mais lesquels ? On resterait volontiers dans son salon à regarder la télé, si les infos n’étaient un catalogue d’horreurs, les films des massacres. Rien n’est plus laid que la télé. 

Dans cette brume angoissante, il faut consulter les plus grands trouillards du monde, les spécialistes de la peur : les financiers.

Que disent les spécialistes de la peur : les financiers ?

Indispensables comme les bourreaux, ils sont jalousés par les entrepreneurs, parce qu’ils s’enrichissent sans produire. Sensibles à l’air du temps comme les grenouilles, psychologiquement fragiles, ils sont écrasés par le poids de leur responsabilité. On leur confie de l’argent, il faut qu’ils le fassent fructifier. Cela a l’air simple ? Essayez. 

Ceux dont on parle ne sont pas les gestionnaires de portefeuilles que vous connaissez, qui prennent un pourcentage sur l’assurance-vie et vous font gagner 2% en dix ans, quand ils ne vous en font pas perdre : « Hélas, ma bonne dame, la crise, que voulez-vous ! » Non, les vrais financiers sont les spécialistes des spécialistes, ceux que suivent les institutions financières, qui les prennent, un moment seulement, pour des génies. Puis les jettent, comme étaient écartées les vierges oraculaires épuisées par les plantes psychotropes.

Bank of America a sondé 314 financiers, 1000 milliards d’actifs.

Bank of America a sondé 314 financiers. 314, ce n’est pas beaucoup. Un sondage, selon la méthode des quotas, nécessite 800 personnes a minima pour être crédible. Ces 314 sont les meilleurs. Ils représentent à eux seuls 1000 milliards d’actifs sous gestion.

Pour se donner une idée, c’est le PIB des Pays-Bas. C’est aussi, en un mois, la chute des cryptomonnaies : leur cours, divisé par deux, aurait fait fondre 1000 milliards de dollars.

1000 milliards de dollars est une somme suffisante pour orienter le marché, en tout cas selon Bank of America. Ces 314 investisseurs donnent le ton, un peu comme les grands couturiers annoncent ce que sera la mode, la fantaisie en moins. Leur guide, c’est plus la peur de perdre sa cassette que l’aventure multicolore. 

Que disent-ils, en cet hiver? Qu’ils ont la trouille. Ils ont de l’argent et ne savent pas quoi en faire. La part de liquidités dans leur portefeuille représente 5.3%, de leurs avoirs, plus qu’en mai 2020 au moment du grand confinement : 5%. 

Mais de quoi ont-ils peur, que diable ! Le printemps revient, le chômage baisse, les banques engrangent des profits records, que craindre ? 

Ils ont de l’argent et ne savent pas quoi en faire 

Une guerre avec l’Ukraine ? Poutine n’est qu’un épouvantail figé dans la boue du passé. Dans l’enquête, le risque d’un choc géopolitique n’est retenu qu’à 7%. La Covid ? Tout mou la Covid : 4%. Le risque d’une récession mondiale? Pas vraiment : 8%. L’inflation ? Ah, oui, l’inflation ! L’inflation qui ronge l’épargne, rogne les salaires, sape la monnaie, voilà le danger ! Provisoire seulement: 23% pensent que le risque est réel, mais 56% estiment qu’elle sera transitoire. 

Le vrai risque, c’est une politique restrictive de la Banque centrale, la Réserve fédérale américaine : 41% craignent la hausse des taux. Une hausse des taux change tout. L’argent facile, c’est fini. Si cela inquiète les financiers, ceux qui ne le sont pas devraient s’angoisser eux aussi. De là à en avoir peur, plus que de la guerre ?

La crainte des financiers, c’est qu’ils ne savent pas où va la Fed, la Réserve fédérale américaine. Ils craignent de mauvaises décisions, la boulette tragique, comme en est capable tout pouvoir disproportionné.

Attentifs à tout battement de sourcil du Gouverneur, ils le psychanalysent en permanence. Généralement, ils savent, cette fois, ils ne savent plus. Plus de théorie sur l’inflation ou la monnaie. Inflation ou hausse des prix ? Dollar, petrodollar ou crypto dollar ? Le baril est passé de 37$ à 100$. Le nombre d’utilisateurs du Crypto-yuan a atteint 256 millions d’utilisateurs. Que vont devenir Visa, MasterCard, banques et virements? Les fausses crypto monnaies, celles des Etats, vont-elles chasser les vraies ? Vont-elles permettre la création monétaire ex nihilo ? La surveillance instantanée du consommateur citoyen? Le capitalisme d’Etat porté à son paroxysme ? Prends garde, un œil noir te regarde : Le crypto-yuan. C’en sera de même pour les futurs e-dollars et e-euros.  

Rarement dans l’histoire de l’humanité, le pouvoir n’aura été si concentré. Bank of America prend le pouls de 314 investisseurs qui gèrent 1000 milliards de $, inquiets des erreurs d’un Gouverneur. Est-ce lui le maître ? Seulement Grand prêtre. Mais la grille de lecture des signes est déréglée. Or les financiers gèrent le crédit, c’est-à-dire les paris sur l’avenir.

Rarement l’humanité n’aura été si sensible aux devins

Rarement l’humanité n’aura été si sensible aux devins. Tous vivent dans l’obscurité de l’anticipation. Experts sanitaires, experts climatologues, experts monétaires, soufflent des vents peureux et planétaires. 

Halte au pessimisme ! Il faut renverser les problèmes : les financiers ont peur de pas grand-chose, ni d’une guerre, ni d’une récession, ni même de l’inflation. Le pétrole à 100$ ? On gère. L’Iran et ses missiles ? Anecdote. Un méchant variant? Bon pour la recherche. Le climat ? L’énergie est une question de prix. Les grandes menaces ne sont, pour les trouillards du premier rang, que de petits soucis : bonne nouvelle pour l’humanité !

La guerre « hors la loi » par la finance. Aristide Briand et Gandhi dépassés.

A y regarder de près, par rapport aux désastres possibles, les craintes des financiers de Wall Street sont peu de choses. Voici des chars à la frontière de l’Ukraine, le G7 leur oppose non des canons, mais le bannissement de Swift, le système international d’échanges bancaires internationaux. Voici la guerre « hors la loi » par la finance. Aristide Briand et Gandhi dépassés. Ca ne marche peut-être pas, mais c’est mieux que les tranchés.

Vue artistique d’un survivant à l’apocalypse nucléaire ©Stock Adobe

Une période heureuse de l’histoire

Peut-êre vivons nous au contraire une période heureuse de l’histoire. Peut-être sommes nous à l’aube, non des grandes catastrophes, mais d’horizons nouveaux.

Jamais, par exemple, l’humanité toute entière n’eut le luxe de se cloitrer pour un virus, ni de fabriquer de l’argent magique au point de craindre un surplus de liquidités. Les financiers ne sont ni des créateurs, ni des devins, ils rendent disponibles des crédits pour de multiples essais d’innovations, qui, forcément, perturbent toute position acquise. C’est ce qui explique Licornes, Gafas, Tesla, mais aussi digitalisation médicale, e-learning, biotechnologies… 

Caligula finit assassiné. On ne demande pas aux dirigeants de faire rêver, mais de ne pas avoir peur. Après tout, la peur gouverne moins bien que l’envie, le désir, la recherche, parfois maniaque, « à tout prix » diraient les 314, du « nouveau ». 

Laurent Dominati

Laurent Dominati

a. Ambassadeur de Franced

a. Député de Paris

Président de la société éditrice du site Lesfrancais.press

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