Au premier semestre 2022, la France présidera l’Union Européenne, c’est-à-dire en pleine campagne électorale présidentielle.
L’exercice sera périlleux pour Emmanuel Macron qui devra concilier des objectifs pouvant être opposés. Dans tous les cas, le programme de la présidence française aura une résonance particulière. La dernière remonte à 2008 en pleine crise des subprimes. À l’époque, Nicolas Sarkozy avait utilisé le levier de cette fonction pour convaincre ses partenaires de réagir face aux risques d’implosion financière. Depuis, l’Union Européenne a été confrontée à la crise grecque, au départ du Royaume-Uni et à la plus sévère récession de son histoire, provoquée par la Covid-19.
le bilan de la Covid-19
Face à cette épidémie, l’Europe a montré deux visages : celui de l’égoïsme avec la fermeture désordonnée des frontières ; et celui de la solidarité avec la prise en charge de malades par certains pays moins exposés à la maladie et l’élaboration d’un plan de relance. Dans un monde marqué par la rivalité croissante de la Chine et des États-Unis, l’Europe apparaît comme une évidence de plus en plus incontournable. Depuis 1947, elle s’est construite en creux, par secousse et en lien avec son allié américain. Ce mode de croissance semble avoir atteint ses limites comme le prouve la montée des nationalismes ou des populismes aux quatre coins du continent. Les résultats économiques et sociaux de ces dernières années plaident également pour un changement de braquet.
Une Europe à concrétiser ?
L’Europe reste une idée neuve sous réserve de la réinventer. Elle ne peut plus être une abstraction. Celle-ci fut nécessaire pour réunir autour de la table des ennemis qui s’étaient livrés à trois guerres en moins d’un siècle. Mais, en 2020, la méthode des pères fondateurs a vécu. Face aux autres grandes puissances, l’Europe a un réel besoin d’identification. Bien que riche de son histoire, les Européens semblent vouloir la nier par peur de rouvrir les plaies du passé. Pour autant, ils partagent des valeurs communes importantes issues d’une culture multiséculaire.
L’Europe est le continent de la démocratie tempérée et de la protection sociale. Trop souvent mise sous le boisseau, l’Europe des idées existe au-delà des guerres et des crises. Léonard de Vinci, Voltaire, Diderot, Goethe, Tocqueville, Copernic, Thomas Mann, Frédéric Chopin, Miguel de Cervantes, Mozart, Jean-Sébastien Bach, Milan Kundera, Vaclav Havel, Hannah Arendt, Raymond Aron et une infinité d’autres ont ou ont été des ambassadeurs des valeurs qui devraient être mieux valorisées par les institutions européennes.
Un défi économique et politique
L’Europe n’est pas identifiée sur le plan économique et politique. Airbus, au-delà de ses problèmes actuels, demeure un cas isolé. Peu d’entreprises sont réellement européennes. Le marché européen demeure une somme de marchés freinant d’autant l’éclosion de sociétés comme Google, Apple ou Amazon. Nous sommes incapables de citer un ou deux noms de dirigeants de grandes entreprises européennes surtout si elles ne sont pas d’origine française. En revanche, Bill Gates, Elon Musk, Jeff Bezos, Tim Cook, Mark Zuckerberg ou Larry Page ne nous sont pas étrangers.
Les noms des dirigeants politiques polonais, suédois voire espagnols ne sont guère plus connus. Ces dernières décennies, l’Europe compte de réelles réussites dont Erasmus qui permet à des étudiants de poursuivre leur cycle d’enseignement dans plusieurs pays. Le succès d’Erasmus prouve qu’il y a une appétence au sein des populations pour participer à la construction d’un grand marché de l’emploi européen.
Après la sidérurgie, le charbon, l’atome, l’agriculture et la monnaie, l’éducation et la formation sont les défis de l’Union Européenne. Contribuer à l’augmentation du niveau des élèves, favoriser la mobilité, inciter à la recherche et à la création d’entreprises sont devenus des priorités pour fortifier l’Union Européenne.
Une Union européenne moins française ?
Trop souvent, les Français rêvent de façonner l’Europe à leur image, jacobine et technocratique. Or, l’Europe est plurielle. Elle est tout autant polonaise, italienne, finlandaise qu’allemande ou française. L’unité de l’Europe n’est donc pas à rechercher dans une essence culturelle unique, mais dans sa diversité même. L’Europe puise sa force dans le rejet du manichéisme. Quand elle oublie cette vertu, elle s’enfonce dans les ténèbres. Que ce soit à travers le futur plan de relance européen ou à l’occasion de la prochaine présidence française de l’Union européenne, la fixation d’objectifs facilement partageables constitue une priorité.
L’Europe se doit de retrouver un nouveau cap, une nouvelle ambition, vingt ans après la mise en œuvre de la monnaie unique. Les idées sont nombreuses, le plus difficile étant d’avoir la méthode pour les faire partager. Ainsi l’Union pourrait porter un projet énergétique global associant énergies renouvelables et l’hydrogène. La création d’un socle social européen en matière de maladie, de retraite et de dépendance pourrait être également initiée.
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