Bilan de la visite d'Etat au Maroc d'Emmanuel Macron

Bilan de la visite d'Etat au Maroc d'Emmanuel Macron

Réconciliation, Sahara occidental, Immigration et contrats sont les 4 points cardinaux du bilan d’Emmanuel Macron en visite d’Etat au Maroc. Certains thèmes ont été des succès d’autres des échecs en demi-teinte. On fait le bilan pour les Français de l’étranger.

Réconciliation

Emmanuel Macron est arrivé lundi au Maroc, où il a été accueilli en grande pompe par le roi Mohammed VI, pour une visite d’Etat au Maroc. Accompagné par son épouse, Brigitte Macron, et une pléthorique délégation de ministres, patrons d’entreprise, intellectuels ou personnalités du spectacle, le président français a été salué à sa descente d’avion, à l’aéroport de Rabat-Salé, par une longue poignée de main du monarque.

Un déplacement qui a marqué la réconciliation entre les deux pays, trois ans après les révélations de présence du numéro de téléphone d’Emmanuel Macron et de plusieurs de ses ministres sur le listing marocain du système d’espionnage Pegasus. Ce déplacement actait donc le réchauffement qui est à la mesure de la glaciation qui frappait les relations diplomatiques et économiques des deux pays.

Surtout que la priorité accordée par le président français à l’Algérie après sa réélection en 2022 avait aussi jeté un froid, alors que les deux puissances du Maghreb nourrissent une profonde rivalité. L’ex-colonie espagnole du Sahara occidental, considérée comme un « territoire non autonome » par l’ONU, oppose depuis un demi-siècle le Maroc aux indépendantistes du Front Polisario, soutenus par Alger. Après la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur ce territoire par Washington, Rabat a multiplié les pressions sur la France pour qu’elle en fasse autant.

Sahara occidental

Dans son discours devant le Parlement marocain, Emmanuel Macron a confirmé, ses propos de l’été, soit la reconnaissance de la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental, pour le « présent et l’avenir ». Pour preuve, les élus marocains l’ont applaudi debout quand il a parlé du Sahara occidental en disant que l’avenir de cette région « est dans la souveraineté marocaine« . Ces quelques mots ont eu un effet magique tant ils étaient attendus.

Cependant, les relations avec l’Algérie, qui se détériorent fortement depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, seront aussi à gérer pour la diplomatie française comme pour celle du royaume Chérifien. En effet, la diplomatie algérienne vient coup sur coup de subir de lourdes défaites. Non seulement le contexte international favorise la multiplication des reconnaissances de la marocanité du Sahara, mais les deux pays, la France et l’Espagne, anciennes puissances coloniales, détentrices de la mémoire géographique de la région, ont reconnu sans ambages la souveraineté du Maroc sur ce que l’Algérie considère comme « son Sahara ».

Descente conjoine des chefs d'Etat dans l'artère principale de Rabat
Descente conjointe des chefs d’Etat dans l’artère principale de Rabat ©AFP

Immigration

Si Emmanuel Macron était venu avec le Sahara occidental dans sa hotte, Bruno Retailleau l’accompagnait aussi. Ce dernier avait une mission : l’amélioration de la coopération entre les deux pays, notamment en matière migratoire. Et on était loin des grandes déclarations de ces dernières semaines où le ministre de l’Intérieur menaçait de sanctions le Maroc si ce dernier ne reprenait pas des engagements concrets sur le rapatriement de ses clandestins. La diplomatie est passée par là.

Pourtant le rapprochement entre la France et le Maroc pourrait favoriser la réadmission des ressortissants marocains faisant l’objet de mesures d’expulsion. D’ailleurs, Bruno Retailleau se disait confiant à la sortie des rendez-vous son homologue.

« Nous avons convenu de raccourcir les délais et mieux faire en termes de personnes réadmises ».

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur le 30 octobre 2024 à Rabat

Pour autant, il ne faut pas oublier la crise des visas qui a aussi marqué en profondeur les relations entre les deux pays. Ayant entendu les nombreux appels du député des Français de IXème circonscription des Français de l’étranger, Karim Ben Cheïkh, Paris a promis d’avancer dans un esprit de dialogue. 

10 milliards de contrats

Rabat comme Paris espèrent que ce réalignement de la position française va se traduire par des investissements sonnants et trébuchants au Maroc. Le pays dispose d’énormes ressources halieutiques, solaires, éoliennes et en phosphates. La visite a ainsi donné lieu à une pluie de contrats, même si les deux parties sont restées discrètes sur les négociations. Airbus Helicopters a ainsi pu vendre de 12 à 18 Caracal aux forces armées marocaines, selon des sources concordantes. La France espère aussi rester le prestataire privilégié du Maroc pour l’extension de la ligne de train à grande vitesse entre Tanger et Agadir, après l’inauguration en grande pompe du premier tronçon en 2018.

Au total, le chef de l’État a conclu de gros contrats pour un montant total de plus de 10 milliards d’euros. Alstom, Safran, Veolia… Tous se sont engagés sur des chantiers marocains.

La communauté française

Si parmi la délégation française, on a pu y découvrir, avec surprise, M’jid El Guerrab, l’ancien député des Français de la région, qui ne s’est pas représenté aux élections, suite à sa condamnation pour violence en France, il y avait aussi de nombreux binationaux comme des Français résidant au Maroc ou des Marocains vivant en France auprès d’Emmanuel Macron. Comme le député du Nouveau Front Populaire, Karim Ben Cheïkh, qui malgré ses activités à la commission des Finances de l’Assemblée nationale, a pu accompagner le chef de l’État tout au long du séjour, avant de retrouver l’hémicycle dès le mercredi soir.

Entre-temps, le dynamique parlementaire des Français de l’étranger a pu organiser, en parallèle, dès le mardi matin (29 octobre), une réunion entre les deux groupes d’amitiés des deux chambres basses des parlements des deux pays.

Bruno Fuchs, Naima Moutchou, Estelle Youssouffa et Karim Ben Cheikh représentant l'Assemblée nationale et leurs homologues marocains
Bruno Fuchs, Naima Moutchou, Estelle Youssouffa et Karim Ben Cheikh représentant l’Assemblée nationale et leurs homologues marocains. © Karim Ben Cheikh

Et logiquement, le chef de l’Etat n’a pas oublié cette communauté des Français du Maroc, riche de sa diversité, de son implication dans la vie locale mais aussi française. Il a ainsi pris le temps d’aller à leur rencontre lors d’un évènement dans les jardins de l’ambassade à Rabat le 30 octobre.

« Continuez de nourrir ses identités croisées. Vous savez, moi, je suis, un très grand partisan du en même temps (..) Je suis très fier d’avoir devant moi des hommes et des femmes, qui sont fièrement et résolument Français tout en étant fièrement et résolument Marocains ».

Emmanuel Macron le 30 octobre à Rabat devant la communauté française

Au cours d’un long discours de 30 minutes, au cours duquel, le Président de la République a rappelé la profondeur des liens entre nos deux pays sans cacher les difficultés d’une relation à réinventer dans un monde qui vit, lui-même, une profonde mutation. S’attachant à saluer les différents corps qui constituent la communauté des 50 000 Français installés dans le pays, il prit le temps de balayer tous les acteurs du dynamique tissu français au Maroc. Les établissements scolaires, dont bon nombre dépendent de la Mission Laïque française, les instituts de recherche mais aussi les acteurs culturels comme les très nombreux entrepreneurs qui dynamisent le pays et nos exportations.

Regarder le discours d’Emmanuel Macron

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