La communication de l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Étranger (AEFE), qui regroupe 522 établissements dans le monde, est comme toujours limitée alors que les interrogations se multiplient dans le monde.
Pourtant après la crise du Covid 19, l’Agence pour l’Enseignement Français à l’Étranger (AEFE) est la cible de nombreuses critiques. Détournement de fonds mettant en cause les lycées français de New-York et de Caracas, révélations à Lima, nouvelles affaires à Moscou et à Shanghai où des pressions sont exercées sur des parents d’élèves pour les empêcher d’exprimer des critiques sur les réseaux sociaux…
Chasse aux parents d’élèves sur le net
Ainsi au lycée français de Shanghai, où une charte émise avec le consentement de l’agence explique « le bon usage des médias sociaux ». La culture chinoise a inspiré la direction de l’établissement ! Cette dernière explique que ce document permettra de réguler « l’usage de toutes les formes de réseaux sociaux qui permettent aux membres de la communauté d’échanger : WeChat, LinkedIn, Facebook, What’s App,… » Un texte digne du PC chinois , que les parents d’élèves sont évidemment tenus d’approuver :
« La signature de ce document au moment de l’inscription ou de la réinscription de votre enfant constitue un engagement en tant que parents et/ou tuteurs de l’enfant ». Les parents s’engagent ainsi à « ne pas poster des plaintes à caractère personnel sur les réseaux sociaux, ne pas publier des commentaires sur des membres de la communauté du lycée français de Shanghai – parents, élèves, personnel pédagogique ou administratif – ou des groupes de membres de cette communauté et/ou leurs photos, qui pourraient être perçus comme étant négatifs, dénigrants ou embarrassants ».
On comprend bien la menace qui pèse sur les récalcitrants, et le risque de non-admission ou de renvoi de leurs enfants des lycées français. Shanghai n’est d’ailleurs pas une exception, d’autres ont fait les frais de sentences arbitraires, au Liban et en Tunisie. A Moscou, les parents ont été rappelé à l’ordre après s’être indignés de la qualité des cours en ligne pendant le confinement..
En Tunisie, alors que l’augmentation des frais s’est emballée pour l’année 2020-2021 avec une moyenne de 20% en plus sur les forfaits trimestriels. Et gare aux éventuels contestataires ! Le lycée conventionné René Descartes écrit aux parents repérés sur la toile pour leur demander de ne pas réinscrire leurs enfants l’an prochain.
Alors qu’Olivier Brocher, le directeur de l’AEFE , dans sa dernière audition devant la commission sénatoriale des affaires étrangères, le 7 mai dernier, indiquait que l’Agence allait prendre en considération les difficultés conjoncturelles des parents, les tarifs grimpent dans la plupart des établissements. Le système de Bourse a heureusement été élargi, mais temporairement, par le gouvernement sous pression des élus consulaires. Ceux qui n’en bénéficieront pas , risquent de voir une partie des frais de scolarités transférés sur les tarifs qu’ils leurs seront appliqués.
Mauvaise gestion des établissements ?
« L’AEFE rappelle qu’elle n’a aucune responsabilité en termes de gestion et de décision qui relèvent des comités responsables des établissements avec lesquels elle signe des conventions».
C’est la protection ultime que rappelle régulièrement les autorités face aux désastres économiques que peuvent rencontrer certains établissements.
Ainsi Panama, les travaux auront été surfacturés ? Ou est passé l’argent ? celui des parents d’élèves ! L’AEFE ne se considère pas comme concernée. 7,5 M€ à Caracas disparaissant des comptes de Caracas. Là aussi l’AEFE ne sent pas responsable et renvoi vers l’ambassade qui renvoie elle-même sur l’agence. Les implications d’un membre du réseau consulaire et du directeur d’établissement rendent la situation très délicate.
Cependant l’AEFE et les établissements sont régis par des conventions qui stipulent pourtant que le chef d’établissement et le directeur administratif et financier sont salariés par cette dernière. En sus ils siègent de droit au conseil de gestion de chaque établissement qui établit et valide les budgets et les comptes, après avoir fourni «toutes les informations nécessaires ». L’AEFE est donc même partie prenante des décisions.
L’affaire de Lima
Comme l’a révélé le journal Atlantico, le Pérou est au coeur de la tempête financière. En vertu de la convention signée avec le lycée français de Lima – comme avec les autres lycées conventionnés à travers le monde – l’AEFE ne peut éluder d’un revers de main les questions qui se posent sur « l’évaporation » d’une partie du budget de l’établissement en 2018/2019, dénoncée par des parents d’élèves.
L’affaire concerne notamment le chantier de destruction des bâtiments du lycée qui n’auraient pas été aux normes antisismiques, et la construction provisoire d’une structure de préfabriqués. Sauf que deux pavillons ont été conservés (afin de ne pas avoir à déposer un nouveau permis de construire). Or, ces bâtiments anciens abritent toujours des classes de maternelle.
Comme l’ensemble de la construction datait de la même époque, soit toutes les structures étaient aux normes antisismiques, soit aucune…
Dans un cas comme dans l’autre, il serait indispensable de disposer des audits que l’AEFE refuse de transmettre.
Le 2 octobre 2017, une société de BTP – Aveconsul SAC – fournit à l’établissement de Lima un devis concernant la réalisation de l’ensemble des travaux prévus (démolition des bâtiments anciens et aménagement de préfabriqués), pour un montant de 1,37 M$. Or, le coût total des travaux atteint finalement 4,11 M$, comme le confirme un courrier envoyé aux parents d’élèves par le président de l’association de gestion du lycée franco-péruvien (en date du 5 décembre 2019). Qu’est-ce qui justifie ce surcoût de 2,74 M$ ? Aucune réponse de la part de l’AEFE ni de la direction du lycée.
Les associations de parents d’élèves du lycée français de Lima doivent donc recourir à un nouveau décret émis par le gouvernement péruvien obligeant les écoles à rendre transparent leur financement. Les mêmes voudraient aussi savoir pourquoi – ici comme ailleurs – le montant des bourses affectées au lycée franco-péruvien est intégré dans le chiffre d’affaires de l’établissement, ce qui revient à « gonfler » la base de calcul des frais de scolarité, et donc à faire payer aux parents 6% de redevances, non seulement sur ces frais de scolarité, mais aussi sur le montant des bourses.
La France enquête, les conseillers consulaires se questionnent !
Rappelons que la justice française enquête actuellement sur au moins deux affaires de « concussion » et de « détournement de fonds » la mettant en cause en France et au Venezuela, quand, au Pérou, souffle un vent de révolte des parents d’élèves en raison de la suspicion de surfacturation des travaux. Certains spécialistes évoque des chiffres importants :
« le tout se chiffre en millions d’euros rien que sur les trois pays ».
Autres acteurs, les Conseillers des Français de l’Etranger, vos élus locaux, qui sont membre, sans droit de vote, du conseil d’administration. Certains plaident pour un renforcement de leurs rôles, en commençant par leur attribuer un droit de vote, afin d’éviter de laisser la pleine gestion à des Français de passage (les directeurs d’établissements sont nommés pour une période de 2 à 5 ans).
Alors que la crise s’étend à travers le monde, des parents d’élèves ont lancé , comme nous vous l’avons indiqué dans de précédents articles, une pétition internationale sur Change.org pour exiger une nouvelle gouvernance, avec davantage de représentativité et surtout plus de transparence financière.
Le renforcement de la gestion directe par les acteurs locaux, une meilleure communication de l’AEFE, une prise en compte des parents, un renforcement des moyens alloués par Paris, les pistes sont nombreuses pour éviter le naufrage après la tempête Covid-19.
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