Zohran Mamdani élu maire : New York bascule à gauche

Zohran Mamdani élu maire : New York bascule à gauche

New York a tourné une page de son histoire politique. Le 4 novembre 2025, Zohran Mamdani a été élu maire de la ville, devenant l’un des plus jeunes maires de l’histoire de la métropole et le premier maire musulman de New York. Ce triomphe marque non seulement un tournant pour la ville qui ne dort jamais, mais aussi une confirmation du basculement des grandes métropoles américaines vers un progressisme affirmé.

Zohran Mamdani élu maire de New York

Il faut remonter à 1889, avec l’élection de Hugh J. Grant à seulement 31 ans, pour trouver un maire plus jeune que Zohran Mamdani, qui rejoint ainsi le cercle très restreint des plus jeunes élus de l’histoire de New York. Ce rare exploit souligne l’ampleur du triomphe de Mamdani dans l’histoire politique new-yorkaise.

À 34 ans, le jeune édile incarne le renouveau démocrate. Né en Ouganda, naturalisé américain, élu de l’État de New York, il a mené une campagne résolument tournée vers la justice sociale et l’égalité. Son programme : gel des loyers, gratuité des transports publics et des crèches, construction de 200 000 logements à loyers modérés, salaire minimum à 30 $ de l’heure d’ici 2030, et alourdissement de la fiscalité pour les plus riches. Il entend aussi attirer 1 000 nouveaux enseignants chaque année dans les écoles publiques, faisant de l’éducation une pierre angulaire de son mandat.

La jeunesse au pouvoir

Zohran Mamdani, 34 ans, est lun des plus jeunes maires de lhistoire de New York. Ce succès historique souligne le renouvellement générationnel du leadership urbain.

Un engagement pro-Palestine dans un contexte tendu

La victoire de Zohran Mamdani intervient dans un climat politique marqué par les tensions autour de la guerre à Gaza. À New York, les derniers mois ont été rythmés par les protestations sur les campus, notamment à Columbia University, où les mobilisations étudiantes pro-Palestine ont relancé le débat sur la liberté d’expression et l’antisémitisme. Mamdani, qui s’est exprimé à plusieurs reprises sur le sujet, a dénoncé la politique du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qualifiant les opérations à Gaza de “guerre contre les Palestiniens” et appelant à “un cessez-le-feu immédiat et au respect du droit international”. Il s’est également dit favorable à la suspension de l’aide militaire américaine à Israël tant que les violations du droit humanitaire persisteraient.

Zohran Mamdani à New York, le 4 novembre 2025. ©ANGELINA KATSANIS / AFP
Zohran Mamdani à New York, le 4 novembre 2025. ©ANGELINA KATSANIS / AFP

Selon un sondage Siena College publié en mai 2024, 72 % des New-Yorkais soutenaient les manifestations pacifiques en faveur des civils de Gaza. Lors de la primaire démocrate de juin 2025, un sondage Data for Progress indiquait que, parmi les électeurs plaçant la politique étrangère parmi leurs priorités, 78 % souhaitaient que les États-Unis réduisent leur soutien à Israël.

Ces chiffres confirment que le discours de Zohran Mamdani n’a pas marginalisé sa candidature, au contraire : il a su traduire dans le langage municipal une sensibilité émergente du progressisme new-yorkais, mêlant justice sociale locale et conscience internationale. Sa victoire souligne l’évolution dune ville historiquement démocrate vers une approche plus critique de la politique américaine au Moyen-Orient, tout en demeurant profondément attachée au pluralisme et au dialogue intercommunautaire.

New York rejoint le clan des villes "progressistes"

La victoire de Zohran Mamdani dépasse le cadre de la mairie : elle inscrit New York dans un mouvement national où les grandes métropoles basculent dans la clan « progressiste ». Chicago avec Brandon Johnson, Boston avec Michelle Wu, Oakland avec Barbara Lee, Newark avec Ras Baraka et Portland avec Keith Wilson défendent des politiques structurelles : logement abordable, éducation, mobilité durable et réduction des inégalités.

Zohran Mamdani, déclaré vainqueur de l’élection à la mairie de New York, lors de la soirée électorale au théâtre Brooklyn Paramount, à New York, le 4 novembre 2025. ©ANGELA WEISS/AFP
Zohran Mamdani, déclaré vainqueur de l’élection à la mairie de New York, lors de la soirée électorale au théâtre Brooklyn Paramount, à New York, le 4 novembre 2025. ©ANGELA WEISS/AFP

Ces villes contrastent avec la rhétorique sécuritaire de Washington et démontrent qu’il est possible de combiner sécurité, inclusion et justice sociale. À New York, Zohran Mamdani rejoint ce réseau de municipalités et envoie un signal clair au Parti démocrate : le progressisme est désormais électoralement et stratégiquement central.

Plus qu’un simple basculement politique, cette victoire illustre un changement de paradigme : New York ne se contente plus de préserver l’ordre établi, elle mise sur des solutions concrètes aux problèmes socio-économiques. Ces bastions progressistes deviennent des laboratoires d’innovations politiques et un contrepoids stratégique à Washington, redéfinissant le rôle des métropoles dans la recomposition nationale.

Laboratoires urbains du progressisme

Ces villes tentent de démontrer qu’un leadership centré sur l’inclusion, la durabilité et la justice sociale peut être à la fois ambitieux et électoralement gagnant. Ces métropoles deviennent des laboratoires politiques pour l’échelon national.

New York et la défiance envers l’establishment démocrate

La victoire de Zohran Mamdani n’illustre pas seulement un triomphe individuel, elle reflète une transformation profonde du rapport des New-Yorkais à l’establishment démocrate, dont Andrew Cuomo, battu de près de 10 points par Zohran Mamdani est l’image. Depuis plusieurs années, la population urbaine manifeste une méfiance croissante envers les figures historiques du parti, perçues comme trop centrées sur le maintien du pouvoir et trop éloignées des préoccupations quotidiennes des habitants. Les scandales de corruption ou sexuels qui ont frappé Andrew Cuomo — ancien gouverneur démissionnaire de l’État de New York — combinés à la gestion critiquée de la pandémie et des inégalités sociales, ont cristallisé ce sentiment.

Les jeunes électeurs, diplômés et issus de communautés diversifiées, expriment un rejet des compromis de l’establishment au profit d’un progressisme audacieux. Dans une ville où plus de la moitié des foyers parlent une langue autre que l’anglais, la perception d’un parti trop homogène et élitiste renforce l’attrait pour des candidats qui incarnent la diversité et l’inclusion. Zohran Mamdani, fils d’immigrés et musulman, incarne ce renouvellement générationnel et culturel, offrant une alternative crédible à un système jugé sclérosé.

À New York, comme dans d’autres grandes métropoles américaines, l’émergence de leaders progressistes traduit un changement de paradigme : le pouvoir ne se limite plus à préserver l’ordre établi ou à garantir la croissance économique. Il devient un instrument pour corriger les déséquilibres sociaux, expérimenter des politiques inclusives et projeter un message national, défiant la rhétorique sécuritaire de Washington et redéfinissant le rôle des grandes villes dans le paysage politique américain.

Les réactions des élus consulaires des Français de New-York

Du côté des élus représentant les Français de New York au conseil consulaire, les réactions sont partagées. Ainsi Richard Ortoli, siégeant chez les Indépendants à l’Assemblée des Français de l’étranger veut rassurer : « La victoire de Zohran Mamdani à la mairie de New York est historique, et pour rassurer ceux que cela inquiète, Zohran Mamdani n’est pas Jean-Luc Mélenchon, quoi que disent certains à droite. Cette victoire reste, néanmoins, un tournant idéologique et un message adressé à l’Amérique de Donald Trump. »

« Zohran Mamdani n’est pas Jean-Luc Mélenchon »

Autre élue pour les Français de New York, Annie Michel, de sensibilité de gauche est « heureuse et profondément émue par la victoire de Zohran Mamdani ». Pour elle, qui représente aussi nos compatriotes dans les instances consulaires françaises, cette « élection est la preuve que les idées d’une démocratie progressiste, ouverte, inclusive et centrée sur la participation citoyenne, peuvent triompher face à l’establishment. »

« Cette victoire de Zohran Mamdani (…) montre que l’engagement sincère peut transformer New York et inspirer au-delà de ses frontières »

Jointe par la rédaction, Annie estime aussi que « cette victoire symbolise le renouveau, la force de la jeunesse, et montre que l’engagement sincère peut transformer New York et inspirer au-delà de ses frontières ».

Pour Patrick Pagni, également Conseiller des Français de New York, et membre de l’AFE, la victoire de Zohran Mamdani « consacre le glissement du parti Démocrate vers une gauche plus radicale, face au large mouvement populiste qui a porté Donald Trump ». Pour celui qui est membre du parti politique Horizons, « cette situation n’est pas sans rappeler la situation française avec la poussée de blocs radicaux, à droite et à gauche, qui marginalise les formations ou tendances politiques traditionnelles, plus calées vers le centre. Reste à savoir si le nouveau maire pourra appliquer tout le programme qu’il a en tête ». Il est rejoint par Richard Ortoli qui se demande si « les promesses qui ont galvanisé sa campagne résisteront à l’épreuve du réel. » Selon ce dernier, Zohran Mamdani devra « désormais traduire son programme ambitieux en actes. Son succès dépendra de sa capacité à concilier idéalisme et pragmatisme ».

Les Français de New York n’ont pas pu voter à cette élection

Dans de nombreuses villes à travers le monde, les résidents étrangers en situation régulière ont la possibilité de participer aux élections locales/municipales pour choisir leur maire. Pourtant, à New York, cette pratique n’est pas en vigueur.

« Ceux qui paient l’impôt ont le droit d’en contrôler l’usage »,

Une situation que déplore Annie Michel. Selon elle, « reconnaître leur participation citoyenne au niveau local serait non seulement juste, mais renforcerait également la démocratie locale. » À l’inverse, pour Richard Ortoli « le système doit être uniforme, quelle que soit l’élection, et le droit de vote devrait être limité aux seuls citoyens des U.S. ». Du côté de Patrick Pagni, celui-ci est « favorable au vote des étrangers en situation régulière pour les seules élections municipales ». Il justifie ce principe par « l’idée que ceux qui paient l’impôt ont le droit d’en contrôler l’usage ». Comment Zohran Mamdani répondra-t-il à cette situation ? Nos Français de la Big Apple pourront-ils s’exprimer lors du prochain scrutin municipal ?  

Une victoire symbolique de Zohran Mamdani

Aujourd’hui, Zohran Mamdani ne gagne pas seulement la mairie : il incarne un changement, affirmant des valeurs de justice, d’égalité et d’ouverture dans une ville profondément marquée par la diversité. Son parcours, de fils d’immigrés né en Afrique à maire de la capitale économique des États-Unis, raconte une autre version du rêve américain, celle d’une réussite fondée sur l’engagement, la solidarité et la diversité plutôt que sur la seule ascension individuelle.

Sa victoire marque l’émergence d’une Amérique nouvelle. Le 4 novembre 2025 pourrait rester dans les livres comme le jour où New York a choisi une trajectoire audacieuse, en rupture totale avec la politique du locataire de la Maison-Blanche.

Quelle sera la réaction concrète de Donald Trump à la victoire de Zohran Mamdani ? Affaire à suivre…

Auteurs/autrices

  • Rachel Brunet

    Rachel Brunet est une journaliste française installée à New York depuis 13 ans.

    Après un début de carrière dans la presse économique à Paris, elle a rejoint la presse francophone aux États-Unis.

    Elle défend une information rigoureuse et une analyse exigeante de l’actualité.

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