Un peu d’Histoire, un peu d’espoir

Un peu d’Histoire, un peu d’espoir

Tout va mal. 2023 aura été une année noire. La guerre est revenue sur le sol européen, en Ukraine. Quand le Hamas revendique un pogrom, une partie du monde l’excuse. Israël attaque Gaza, alors l’antisémitisme ne se cache plus. L’Iran, la Russie, multiplient les conflits, en Afrique, au Moyen-Orient, en Afrique. Les nouvelles technologies favorisent le mensonge, le partage de la haine, le tribalisme identitaire. Le monde semble fou. Quand a-t-il été sage ? Plongeons dans l’Histoire pour le savoir !

Ukraine : Entre 1931 et 1933, le pouvoir stalinien organise une série de famines qui provoque, selon l’ONU, entre sept et dix millions de morts : l’« Holodomor ».

Crimes de guerre, crimes contre l’humanité, nettoyages ethniques, viols systématiques, génocides

Europe : Entre 1991 et 2001, les guerres de l’ex-Yougoslavie font 130.000 morts. Crimes de guerre, crimes contre l’humanité, nettoyages ethniques, viols systématiques, génocides, ont été reconnus par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Aujourd’hui, si la situation est tendue en Bosnie, Serbie et Kosovo, Croatie et Slovénie sont membres de l’Union Européenne. En paix.

Occupée en 1967, Gaza est évacué en 2005, sur décision d’Ariel Sharon, alors Premier ministre. A l’époque, pour protester,  un certain Netanyahou démissionne du gouvernement. Sharon, ministre de la défense en 1982, soutenu par Bechir Gemayel, avait mené l’opération au Liban « Paix en Galilée », jusqu’à Beyrouth, avec un nombre de morts évalué à 17.000. L’OLP dut quitter le Liban. Les guerres civiles libanaises provoquèrent près de 150.000 morts.

La guerre civile syrienne, elle, a déjà provoqué près de 500.000 morts. Toujours en cours, elle implique directement Turcs, Russes et Iraniens. Assad vient d’être réintégré dans la Ligue arabe.

Institut Français de Gaza et AFP
Institut français bombardé par erreur par l’armée israélienne à Gaza en Novembre 2023©BBC

Il y avait un million de Juifs dans les pays membres de la Ligue arabe en 1945. Volés, chassés, il en reste 5000.

Le massacre du 7 octobre, provoqué par le Hamas, a réveillé les réflexes antisémites. Il y avait un million de Juifs dans les pays membres de la Ligue arabe en 1945. Volés, déchus de leur citoyenneté, chassés, emprisonnés, il en reste 5000. Les synagogues ont été pillées à Alger, en Tunisie, en Libye. Les cimetières vandalisés, comme le vieux cimetière juif de Tunis. La quasi-totalité des régimes et dirigeants arabes, comme Nasser, Kadhafi, Assad, affichaient leur antisémitisme. Beaucoup de Juifs perdent leur nationalité, en Algérie, Irak, Egypte, Aden, Syrie, etc. Même au Maroc, Hassan II négocie dès 1961 le départ de chaque juif pour 100$ par personne, vers le Canada ou la France (le départ vers Israël étant interdit par Mohamed V). Le prix montera jusqu’à 250$, le Maroc recevra 19 millions de dollars. La Syrie et la Roumanie vendent aussi « leurs juifs ». Ceausescu sur un compte en Suisse. Les communautés juives en Syrie, Irak, Iran, Yémen, Aden, Algérie, Libye, Egypte, rançonnées, disparurent. Elles étaient installées dans ces pays bien avant l’Islam.

La conscience humaine oublie de quoi l’humanité est capable comme sauvagerie.

Ne retracer que les massacres du Moyen-Orient ou de la Russie aujourd’hui résurgents serait injuste. Les Conventions de Genève ont été écrites, le Crime contre l’humanité défini, parce que la seconde guerre mondiale a dépassé, ce qui, dans la conscience humaine, paraissait inimaginable. Elle oublie de quoi l’humanité est capable comme sauvagerie. D’où l’importance de la mémoire. Rappeler le sac de Nankin, les massacres en Asie, les camps de la mort, les viols et exécutions de l’armée rouge en représailles des atrocités allemandes, les villes rasées, la faim en Europe jusqu’en 1948, les famines en Inde, en Chine, en Afrique, parfois organisées, voilà qui donne une idée de ce contre quoi on se bat.

Il y a moins d’un siècle, la seconde guerre mondiale fit 62 millions de morts, pour la plupart civils, le plus grand nombre en Russie et en Chine. Il y a trente ans, plus de la moitié des pays vivaient sous des régimes dictatoriaux. Toute l’Amérique latine, la moitié de l’Europe. Toute l’Asie, hormis le Japon et la Corée du Sud.

S’ajoutent à la violence humaine, les épidémies.  Celle du Covid, selon l’OMS, tua 7 millions de personnes. La grippe espagnole entre 50 et 100. En 2022, la tuberculose en a tué 1,3 million. Mais les traitements de la tuberculose ont sauvé plus de 75 millions de vies depuis 2000. Les maladies s’acharnent, la médecine aussi.

Le dérèglement climatique effraie. Le cyclone de Bhola, au Bengladesh, en 1970, fit 500.000 morts. Celui de Nina, en Chine, en 1975,  230.000. Celui d’Andra Pradesh, en Inde, 1977, entre 10 et 50.000. Les inondations de 1931 en Chine firent jusqu’à quatre millions de morts. En 1975, la rupture du barrage de Banquiao, 230.000.

Le tremblement de terre d’Haïti en 2010 fit entre 100.000 et 300.000 victimes. Celui de Tangshan en Chine, en 1976, entre 250 et 650.000. Le tsunami de 2004 dans  l’océan indien fit 230.000 morts.

La plupart de ces catastrophes ont été, sinon oubliées, surmontées, dépassées (sauf en Haïti). Aujourd’hui, la Chine est vue comme une puissance menaçante. Qui se souvient, de la grande famine de 1959 à 1961, qui fit entre 10 et 40 millions de morts, par l’incompétence ou la volonté de Mao? Il y avait encore dans les années soixante, des maoïstes au Quartier latin, comme Sollers. Des aveugles volontaires, comme Sartre, pour ne pas voir les crimes staliniens. De bonnes âmes, comme Herriot, qui vantait les belles récoltes d’Ukraine quand les gens mourraient de faim et se livraient au cannibalisme. Tous entraînaient des admirateurs. Aujourd’hui aussi, il y a les imbéciles de bonne et mauvaise foi, complices involontaires.

La plupart des maux dont souffre l’humanité sont désormais dus à l’humanité elle-même.

Au cours des deux derniers siècles, depuis la révolution industrielle, la population mondiale est passée d’un à huit milliards d’habitants. Autant d’intelligences et d’égoïsmes multipliés. Mais la pauvreté, la maladie, la mort sont mieux combattues. La plupart des maux dont souffre l’humanité sont désormais dues à l’humanité elle-même. Peut-être est-ce cela qui désespère : l’inhumanité de l’humanité.  L’exigence morale, de justice, comme de bien-être, s’est élevée. Si l’on s’effare du retour de l’antisémitisme et du racisme, c’est que cela paraissait éliminé. La bataille des droits civiques ne l’a emporté aux États-Unis que dans les années soixante.

La guerre, la haine, le racisme, l’antisémitisme n’ont pas disparu. Le recours à la force, au chantage, le terrorisme, le crime organisé, la traite humaine, les crimes d’Etat, la corruption, le mensonge, la manipulation la bêtise, non plus. D’un côté, regarder la marche du monde avec lucidité, de l’autre mesurer ce qui a été accompli. L’humanité est capable de s’élever. La preuve : elle a élevé son niveau d’exigence.

En novembre, le régime iranien a exécuté cent condamnés à mort. Qui honore ces martyrs ?   

« Ce qui est juste est beau. Aux braves de ne pas se laisser vaincre » enseignait Aristote. L’espoir de l’humanité est chez ceux qui se battent pour le « juste » : les civils ukrainiens devenus soldats, les femmes iraniennes qui enlèvent leur voile dans la rue sachant qu’elles seront arrêtées, torturées, tuées.

Manifestations contre la France
Manifestations contre la France à Téhéran en 2023 ©AFP

En ce mois de novembre, le régime iranien a exécuté cent condamnés à mort arrêtés dans les manifestations. Qui honore ces martyrs, à Paris, Londres, Beyrouth, au Caire, à l’ONU ?

Viendra dans le monde musulman une jeunesse qui rejettera le fanatisme, l’obscurantisme religieux, l’antisémitisme, et les autocrates qui les asservissent. Viendra aussi en Russie une génération qui, comme en Ukraine, rejettera l’oppression, la corruption, le culte de la violence. En Europe, la solidarité avec l’Ukraine tient bon. Une coalition – déjà plus de vingt pays – s’organise contre les Houthis armés par l’Iran, comme le Hamas et le Hezbollah.

L’année 2023 fut un recul. Avec le recul de l’histoire, il n’est pas interdit de penser que 2024 sera meilleure. Espérer incite à vaincre. Avec la joie de quitter 2023 et l’espoir de Noël, bonnes fêtes de fin d’années !

Laurent Dominati
Laurent Dominati

Laurent Dominati

a. Ambassadeur de France

a. Député de Paris

Président de la société éditrice du site Lesfrancais.press

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