Bruxelles se prépare à durcir les conditions d’octroi de visas et de révision des exemptions de visas pour les pays tiers non coopératifs, selon une note de la Commission. Le texte, transmis aux États membres et consulté par Euractiv, présente un plan pour une « politique des visas moderne et adaptée à l’objectif visé » qui facilitera l’arrivée de talents en Europe et rendra l’octroi de visas plus difficile pour les pays non coopératifs.
La double approche de la future stratégie de l’UE en matière de visas reflète une ambition plus large du second mandat d’Ursula von der Leyen : utiliser les outils de politique interne pour faire progresser les objectifs géopolitiques du bloc.
La carotte et le bâton
Selon la proposition, l’UE réexaminerait les exemptions de visa tous les trois ans, ou plus tôt en cas de « circonstances exceptionnelles », et serait en mesure de suspendre ou de retirer les exemptions grâce à un processus plus rapide et plus souple que ce qui est prévu par le système actuel.
Bruxelles serait également en mesure d’imposer des restrictions ciblées en matière de visas aux pays dont « les relations avec l’UE se sont gravement détériorées », notamment des interdictions de voyager pour les fonctionnaires ou la suspension de tous les visas non essentiels.
Cette mesure s’accompagnerait d’une application plus stricte de l’article 25 bis du code des visas, qui lie la délivrance des visas au degré de coopération des pays tiers avec l’Union en matière de réadmission et de gestion des migrations.
La note de la Commission suggère également de « recalibrer » cette règle afin de permettre la suspension partielle ou totale des visas pour certaines catégories de voyageurs — comme les passeports diplomatiques et toutes les demandes de court séjour — si un pays tiers refuse de reprendre ses ressortissants. La même idée pourrait s’appliquer aux visas de long séjour et aux titres de séjour.
Dans le même temps, le plan vise à rendre l’UE plus attrayante pour les chercheurs, les fondateurs de start-ups et les travailleurs hautement qualifiés, en invoquant la pénurie persistante de main-d’œuvre et en encourageant l’innovation.
Il préconise de recommander aux États de l’UE de simplifier les procédures de délivrance des visas de long séjour et des titres de séjour pour ces travailleurs, ainsi que de consolider leurs droits.
La stratégie prévoit également d’octroyer des fonds européens pour aider les consulats à traiter les demandes des travailleurs qualifiés et des étudiants, et d’ouvrir la porte à des visas Schengen à entrées multiples d’une durée de 10 ans pour les voyageurs « de bonne foi » afin d’aider les entreprises. La note ne précise pas le montant qui serait alloué à cette initiative.
Le rôle de Frontex
Pour que cette politique fonctionne dans la pratique, la Commission propose une réorganisation structurelle. Elle prévoit notamment la création d’un bureau d’aide aux visas de l’UE au sein de l’agence européenne des gardes-frontières et des gardes-côtes (Frontex). Cette nouvelle unité formerait les agents consulaires et enverrait même du personnel temporaire supplémentaire pour aider les consulats surchargés pendant les périodes de pointe.
La stratégie prévoit également une surveillance accrue des entreprises privées qui traitent les demandes de visa pour le compte des pays de l’UE, ainsi que la première étude à l’échelle de l’UE sur les pratiques d’externalisation, un sujet sensible depuis les scandales impliquant des prestataires de services externes.
Le Parlement européen et le Conseil se prononceront une fois que la stratégie de l’UE en matière de visas aura été officiellement présentée dans le courant de l’année.