Du vieillissement démographique à la remise en cause de son alliance avec les États-Unis, en passant par la concurrence de la Chine et la transition écologique, l’Europe est amenée à relever plusieurs grands défis en ce deuxième quart de siècle.
Les pays de la zone euro, avec le Japon et la Corée du Sud, sont ceux qui sont les plus confrontés à la baisse du taux de fécondité et à la diminution de leur population active. Au sein de la zone euro, le taux de fécondité en 2024 était inférieur à 1,5. Depuis 2012, la population active est en recul. En 2024, la baisse a atteint 0,4%.
La zone euro connaît une érosion de sa productivité par tête depuis 2021. Depuis 2002, celle-ci n’a augmenté que de 10 %, contre 40 % aux États-Unis. La demande intérieure ne progresse que lentement dans la zone euro, en lien avec le vieillissement démographique et la préférence donnée par les ménages à l’épargne. Le taux d’épargne est, en effet, passé, au sein de la zone euro, de 12 à plus de 15 % du revenu disponible brut, de 2019 à 2024. Dans le même temps, l’investissement des entreprises a reculé, passant de 12,5 à 11,5 % du PIB.
Avec le protectionnisme américain et la concurrence de la Chine, les exportations européennes déclinent. Les exportations de la zone euro ont reculé de 8 % de 2021 à 2024. Le renchérissement de l’énergie a pénalisé les ventes de biens, notamment allemands. Le prix du gaz naturel a été multiplié par deux depuis le début de la guerre en Ukraine. La production industrielle outre-Rhin a baissé de plus de 10 % depuis 2022.
Le poids de la zone euro dans l’économie mondiale a diminué
L’Europe souffre de règles environnementales strictes. D’autant plus que les États-Unis ont décidé de quitter, une nouvelle fois, les Accords de Paris. Donald Trump a pris des mesures visant à faciliter l’exploitation du gaz et du pétrole et entend remettre en cause les dispositions en faveur de la transition énergétique dans son pays. Les émissions de gaz à effet de serre, qui diminuaient aux États-Unis comme en zone euro depuis 2022, pourraient augmenter chez les premiers. Les émissions de CO2 s’élèvent, en 2024, à plus de 4 500 millions de tonnes aux États-Unis contre moins de 2 800 millions au sein de l’Union européenne.
Ces dernières années, le poids de la zone euro dans l’économie mondiale a diminué. Il est passé de 19 à 14,3 % du PIB mondial de 2010 à 2024. Pour l’ensemble de l’Union européenne, les chiffres respectifs sont 22 et 18 %.
L’Europe traverse une période difficile. La transition écologique pourrait lui être néanmoins bénéfique en réduisant sa dépendance aux énergies carbonées essentiellement importées (États-Unis, Moyen-Orient, Russie). La décarbonation des activités pourrait lui donner un avantage comparatif favorisant l’implantation d’usines.
La question du vieillissement suppose un recours à l’immigration. Or cette solution est de plus en plus récusée. En règle générale, une population âgée est peu encline au changement et à l’intégration d’étrangers. Un phénomène comparable avait été constaté en France dans l’Entre-deux-Guerres, période durant laquelle la population diminuait.
Un recul de la population active
Face au défi du recul de la population active, de nombreux pays agissent afin de relever leur taux d’emploi et notamment celui des seniors. En Allemagne, le taux d’emploi des 60-64 ans est ainsi passé de 32 % en 2005 à plus de 65 % en 2024. La France, la Belgique et l’Italie ont un taux d’emploi des 60 – 64 ans inférieur à 40 % ce qui leur offre des marges de manœuvre mais en France, l’hostilité au report de l’âge de la retraite est importante.
La France pourrait également améliorer le taux d’emploi des moins de 25 ans qui demeure faible malgré la montée en puissance de l’apprentissage qui concerne désormais un million de jeunes contre 300 000 en 2017.
Des efforts d’investissements
En matière d’innovation industrielle et de transition énergétique, l’Europe s’est engagée à réaliser des efforts importants. Notamment en ce qui concerne la défense ou la transition écologique. L’Union européenne consacre ainsi près de 250 milliards d’euros, dans le cadre du Green Deal européen, à la transition écologique entre 2021 et 2027. La Suède est devenue leader dans l’industrie décarbonée. Notamment grâce à ses projets d’acier vert (comme l’usine Hybrit près de Luleå qui ambitionne d’être totalement neutre en carbone dès 2026).
L’Espagne a massivement investi dans les énergies renouvelables. En 2024, plus de 50 % de son électricité provient désormais d’énergies renouvelables, essentiellement éoliennes et photovoltaïques.
800 milliards d’euros sont prévus dans les prochaines années pour accélérer le réarmement de l’Europe.
Pour préserver sa compétitivité à long terme face aux États-Unis et à la Chine, l’Europe devra toutefois intensifier ses efforts en matière de numérique et d’automatisation. En effet, l’investissement européen en intelligence artificielle reste inférieur à celui des États-Unis et de la Chine. Seulement 18 milliards d’euros par an dans l’UE contre respectivement 50 milliards aux États-Unis et plus de 70 milliards en Chine en 2024.
L’Europe se trouve face à plusieurs enjeux majeurs. Qu’il s’agisse de son vieillissement démographique, de la concurrence internationale ou de ses ambitions en matière de transition écologique. Si les défis sont considérables, ils ouvrent également des opportunités, notamment en matière de décarbonation et d’innovation industrielle. Cependant, la réponse à ces défis passe par une adaptation profonde de ses politiques économiques, sociales et environnementales. L’immigration, la modernisation des secteurs industriels et la gestion de la productivité seront des éléments clés pour permettre à l’Europe de conserver son rôle sur la scène mondiale. Le tout en assurant un avenir prospère à ses citoyens.
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