Transition écologique : les réactions divergent après le rétropédalage budgétaire de Bruno Le Maire

Transition écologique : les réactions divergent après le rétropédalage budgétaire de Bruno Le Maire

Suite à l’annonce dimanche (18 février) de la baisse des ambitions pour 2024 par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, associations environnementales et écologistes se sont rapidement insurgés, quand certains acteurs du secteur ont avant tout demandé un effort de simplification de certains dispositifs. 

Initialement, le gouvernement prévoyait une croissance pour 2024 de 1,4 %. Elle ne sera finalement que d’environ 1 %, davantage marquée que prévu par la guerre en Ukraine, le ralentissement de la croissance en Chine et la récession en Allemagne.

Par conséquent, le gouvernement cherche à « refroidir la machine », selon l’expression du cabinet de M. Le Maire, en économisant 10 milliards d’euros par rapport au budget initial adopté pour 2024.

Seuls deux domaines ne seront pas affectés : la Sécurité sociale et les budgets alloués aux collectivités territoriales. Pour le reste, la poire sera coupée en deux : cinq milliards du côté du fonctionnement des ministères et cinq milliards du côté des politiques publiques, dont 1,4 milliard des budgets alloués à la transition énergétique : 1 milliard du dispositif MaPrimeRénov’ et 400 millions au fonds vert.

En somme, la hausse du budget alloué à la transition énergétique passe de 10 milliards d’euros annoncés pour 2024 à 8,6 milliards d’euros.

Les réactions ne se sont pas fait attendre : « à côté de la plaque ! »s’est insurgé Guillaume Gontard, sénateur écologiste et rapporteur d’une commission sénatoriale sur la rénovation énergétique ayant rendu ses conclusions en juillet dernier.

« Signal désastreux »

MaPrimeRénov’ est le dispositif phare vanté par le gouvernement pour accompagner financièrement la rénovation énergétique du bâtiment résidentiel. La hausse de son budget avait été annoncée en fanfare par l’ancienne ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, en fin d’année dernière.

Elle sera finalement maintenue, mais à hauteur de 600 millions d’euros plutôt que 1,6 milliard, pour atteindre 3 milliards d’euros.

C’est tout de même insuffisant pour nombre d’experts et d’associations voyant en ce rabotage un « signal désastreux… », pour reprendre les mots de M. Gontard. Selon lui, faire des économies maintenant, sans investir, mènera à « des dépenses publiques beaucoup plus importantes pour les années à venir ».

« La baisse d’un milliard d’euros de l’aide à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’ vient ralentir les efforts nécessaires »a jugé en ce sens le réseau d’acteurs pour la transition énergétique CLER, à la tête notamment de plusieurs espaces de conseil France Rénov’ pour accompagner la rénovation.

CLER demande désormais une consultation « pour faire entendre la voix des acteurs de terrain ».

En outre, cette baisse de budget concorderait avec la réduction des critères de définition des passoires énergétiques, annoncée la semaine dernière et permettant ainsi de faire sortir de la définition plus de 140 000 logements.

« Hallucinant. La semaine dernière, ils ont fait sortir arbitrairement 140 000 passoires énergétiques des catégories F et G »s’est dès lors emporté Dan Lert, maire adjoint de Paris en charge de la transition énergétique.

« Aujourd’hui, ils justifient la baisse d’un milliard d’euros du budget alloué à MaPrimeRenov’ par le fait qu’il y aurait moins de logements à rénover », a-t-il poursuivi.

transition écologique
Le ministre français des Finances Bruno Le Maire assiste aux questions hebdomadaires au gouvernement français lors de la session de l'Assemblée nationale à Paris, France, 06 février 2024. [EPA-EFE/CHRISTOPHE PETIT TESSON]

Simplifier est la clé ?

Pour d’autres, comme la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), le gouvernement répond à un « principe de réalité avec pragmatisme ».

« L’urgence actuelle n’est pas budgétaire, mais la révision immédiate du dispositif pour se donner les moyens de consommer en 2024 le budget alloué »a-t-elle avancé.

En 2023, 300 millions d’euros alloués n’ont pas été dépensés, rappelle en ce sens le cabinet de M. Le Maire.

Le dispositif serait en effet trop complexe et « doit être simplifié », ont déclaré les services du ministère.

Dès lors, la réduction des budgets s’inscrit « dans une réflexion plus globale en cours au sein du ministère du Logement sur le lien entre MaPrimeRénov, les diagnostics de performance énergétique, un ensemble de dispositifs qui sont revus », a déclaré lundi (19 février) Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des Comptes publics, lors d’une conférence de presse.

Coupes dans le Fonds vert

Le gouvernement a également coupé dans les budgets du Fonds vert qui ne seront rehaussés que de 100 millions d’euros, contre les 500 millions annoncés.

Le dispositif vise à accompagner des projets dans les territoires. Dès lors, « contrairement aux annonces [de ne pas toucher aux budgets des collectivités territoriales], ce choix budgétaire démontre bien que l’État n’est pas le seul à devoir ‘faire des efforts’ »a ironisé le Réseau action climat.

« Comment demander d’une part aux collectivités d’investir toujours plus dans la transition écologique, tout en ne leur permettant pas d’avoir confiance dans les ressources accordées par l’État, qui, une fois votées en décembre, peuvent être retirées en février ? », a-t-il demandé.

In fine, le gouvernement se réserve la possibilité de rectifier le tir en fonction de l’évolution de la situation économique.

Bruno Le Maire en a également profité pour marteler que « jamais l’Europe ne pourra relever ce défi [du climat] sans union des marchés de capitaux ; jamais, jamais, jamais ».

« Je voudrais donc que tous les États européens prennent conscience de la nécessité absolue d’accélérer sur la mise en place d’une union des marchés de capitaux », a-t-il conclu.

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