Téléphoner depuis la France ! Attention vos appels sont fichés pendant 1 an

Téléphoner depuis la France ! Attention vos appels sont fichés pendant 1 an

Le Conseil d’État a validé mercredi (21 avril) l’obligation faite aux opérateurs de conserver les données de connexion de la population française mais uniquement dans le but de lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée. Concrètement si vous devez téléphoner depuis la France, le numéro que vous avez appelé et la durée de l’appel seront conservés.

Uniquement pour la Sécurité nationale

« La conservation généralisée des données est aujourd’hui justifiée par la menace existante pour la sécurité nationale », relève le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative française, qui juge toutefois « illégal » d’imposer cette conservation pour d’autres motifs, tels que les poursuites pénales du quotidien.

Le Conseil d’État était saisi par plusieurs associations reprochant au gouvernement de ne pas se conformer aux arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui ont fortement limité la possibilité d’imposer une « conservation généralisée et indifférenciée » de ces données.

Jusqu’à présent, les opérateurs en France devaient conserver les métadonnées des connexions internet et téléphoniques (localisation, date, durée,…) pendant un an, afin de pouvoir les mettre à disposition des services d’enquête sur demande d’un magistrat ou, en matière de renseignement, sur autorisation du Premier ministre.

À l’inverse, le gouvernement français exhortait le Conseil d’État à s’opposer fermement à la jurisprudence européenne, faisant valoir que « la sécurité nationale reste de la seule responsabilité de chaque État membre ».

La jurisprudence européenne limite l’utilisation

Dans sa réponse, le Conseil d’État a refusé cette option, considérant que le « droit européen ne compromet pas les exigences de la Constitution française ». Mais il s’est engouffré dans une des rares dérogations offertes par la CJUE – la « menace pour la sécurité nationale » – pour valider le maintien de cette pratique.

Enquêteurs, magistrats et services de renseignement s’alarment du risque d’être privés des « fadettes » (relevés des communications) dont ils se servent dans « quatre enquêtes judiciaires sur cinq », allant des violences conjugales ou des vols jusqu’au grand banditisme et au terrorisme.

En 2020, quelque 2,5 millions de réquisitions judiciaires ont été adressées aux plateformes.

Ces données portent sur la localisation, la date, la durée, l’identité d’un appel ou d’un message, mais pas sur le contenu des échanges.

Réévaluer régulièrement la menace

Dans son arrêt de 39 pages, le Conseil d’État ordonne toutefois au gouvernement de « réévaluer régulièrement la menace », comme exigé par le droit européen.

Concernant l’exploitation de ces données par les services de renseignement, il ordonne que les autorisations ne soient plus délivrées par le Premier ministre mais par « une autorité indépendante ».

Dix-sept juges du Conseil d’État s’étaient réunis vendredi (16 avril) en assemblée du contentieux, formation la plus solennelle, pour examiner la délicate conciliation « entre protection de la vie privée et efficacité des enquêtes pénales et du renseignement ».

Leur décision était très attendue par Bruxelles, qui redoutait un acte de rébellion contre la justice européenne, susceptible de faire école dans d’autres pays.

À ce jour, un seul État membre, l’Allemagne, s’est opposé frontalement à une décision de la CJUE, quand la Cour constitutionnelle de Karlsruhe avait refusé en 2020 de valider le programme de rachat de dette publique de la BCE.

Paris invitait le Conseil d’État à s’opposer à son tour aux arrêts rendus par la CJUE le 6 octobre 2020 sur les données de connexion.

Mais le Conseil, lors d’une rare conférence de presse, a affirmé mercredi (21 avril) privilégier « les initiatives politiques » et la « conciliation exigeante au regard de la Constitution française » plutôt que la « rébellion ».

« Il est préférable de se mettre autour de la table pour bâtir un nouveau plan que de déclarer la guerre », même si le dialogue avec les juges européens est « parfois exigeant et rugueux », a souligné la plus haute juridiction administrative.

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