Taux de marge des entreprises, grand écart de part et d’autre de l’Atlantique ! 

Taux de marge des entreprises, grand écart de part et d’autre de l’Atlantique ! 

Le taux de marge des entreprises diverge nettement de part et d’autre de l’Atlantique. Il augmente fortement aux États-Unis quand il a tendance à stagner voire à baisser en Europe. 

Aux États-Unis, le PIB a ainsi augmenté bien plus vite que le coût salarial unitaire. La hausse entre 1998 et 2022 a été respectivement de 38 et 6 %. Les profits avant dividendes, après taxes et intérêts s’élèvent à 18 % du PIB aux États-Unis en 2022, contre 16 % en 1998. Les chiffres respectifs pour la zone euro sont de 13,5 et 12 %. 

Quels sont les facteurs qui expliquent l’écart grandissant de cet indicateur qui reflète, en partie, la performance des entreprises ? Plusieurs facteurs contribuent à la hausse du taux de marge bénéficiaire et de la profitabilité des entreprises aux États-Unis : une concurrence moindre, un partage défavorable de la valeur ajoutée, des secteurs à forte rente. 

Une concurrence moindre aux États-Unis par rapport à l’Europe

La concurrence est moindre aux États-Unis qu’en Europe. Les autorités en charge de veiller au respect des règles en la matière privilégient les grands groupes, ce qui conduit à une forte concentration sur les différents marchés. 

De 1998 à 2022, l’indice de concentration des entreprises (moyenne des parts de marché détenues par les vingt premiers groupes de chacun des grands secteurs d’activité) est passé de 47 à 54 %. Le secteur des technologies de l’information est dominé par quelques entreprises qui ont, jusqu’à maintenant, accepté un Yalta pour la répartition de leurs activités, limitant d’autant la concurrence. Les tentatives pour réduire les positions de monopole ont, depuis quarante ans, échoué (Microsoft, Google). 

En Europe, le marché unique a favorisé la concurrence même si certains secteurs, comme aux États-Unis, sont de plus en plus concentrés : distribution, métallurgie, transports publics. 

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Le pouvoir de négociation des salaires plus faible aux États-Unis 

Ces trente dernières années, le pouvoir de négociation des salariés s’est amoindri plus vite aux États-Unis qu’en Europe conduisant à un partage de la valeur ajoutée à leur détriment. Le salaire réel a progressé de 15 % aux États-Unis de 1998 à 2022, quand la productivité par tête a augmenté de 58 %. Les valeurs respectives pour la zone euro sont de 12,5 % et 10 %. 

Des secteurs à forte rente aux États-Unis 

La hausse des marges du secteur pétrolier aux États-Unis explique également la divergence avec l’Europe. Les premiers disposent d’un secteur pétrolier et gazier de grande taille, qui est redevenu exportateur net. Ce secteur représente plus de deux points de PIB aux États-Unis, contre 0,2 % du PIB en zone euro. La balance commerciale en énergie est positive de 0,3 % de PIB aux États-Unis quand elle est déficitaire de 3 points de PIB en zone euro. L’augmentation du prix du pétrole augmente les marges des entreprises du secteur et rejaillit sur l’ensemble des entreprises américaines. 

Plus concentrée, moins concurrentielle, l’économie américaine est propice à offrir des taux de marges plus élevés à ses entreprises que l’économie européenne. Cet effet de marge est accentué par l’importance du secteur des hautes technologies et de l’énergie. Cette différence conduit à des capacités de financement supérieures aux États-Unis, au prix également d’une moindre augmentation des salaires. 

Ces dernières années, les salaires ont néanmoins progressé en raison des pénuries de main-d’œuvre. La croissance plus soutenue de l’économie américaine conduit également à des revalorisations des rémunérations plus importantes.

Auteur/Autrice

  • Philippe Crevel

    Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.

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