Dans la foulée de l’élection du nouveau président à la tête du Sénégal pour les cinq prochaines années, des interrogations subsistent sur les scénarios possibles dans une région Sahélo-Sahélienne sous tensions et menaces permanentes de groupes Djihadistes notamment le JNIM (branche Al Qaida dans la région et l’Etat islamique au grand Sahara). Et le départ des troupes militaires Françaises et américaines du Mali et du Niger pourraient laisser entrevoir un nouveau cycle d’actes terroristes dans cette zone géographique.
« La victoire de Bassirou Diomaye Faye est tout d’abord une bonne nouvelle pour la démocratie et les démocrates, présenté comme un président de rupture pour entre autre ses prises de position sur des sujets tel que le Franc CFA ou la renégociation des accords pétro-gaziers, ce qui en soit est son droit, il n’a pas remis en cause les accords de défense. C’est important de le préciser », indique Emmanuel Dupuy, Président de l’Institut de prospective et de sécurité en Europe (IPSE), qui ajoute « il faut aujourd’hui encourager et soutenir le président Faye dans sa volonté d’agir pour que le Mali, le Niger et le Burkina Faso retrouve la CEDEAO ce qui permettra de renforcer la lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest, particulièrement affaiblie ces derniers temps ».
Pour Mohamed Benhamou, Spécialiste des questions de sécurité dans la région Sahélienne et président du Centre marocain des Etudes stratégiques, « un souffle nouveau s’exprime dans cette région, il est à la fois constitutionnel avec l’élection du président Faye et anti constitutionnel avec la prise de pouvoir par des juntes militaires dans des pays comme le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Des pays qui ont exprimé ceux qui ne veulent pas à savoir la présence de l’Occident et pas encore ce qu’il souhaite de manière explicite. Est-ce que l’arrivée du nouveau président sénégalais va se traduire par une intensité plus faible des tensions dans la région, pas sûr que l’intention aussi bonne soit-elle permette de réduire l’intensité des tensions dans cette région ».
Des tensions « alimentées » par l’absence remarquée des trois chefs d’états de l’alliance des pays du Sahel (AES) à Dakar, le 2 avril dernier, lors de la cérémonie de serment du président sénégalais, ils ont dépêchés sur place une délégation avec à leur tête les ministres des affaires étrangères maliens et Burkinabés alors que la CEDEAO était représentée par son président actuel, Bola Tinubu, également président du Nigeria assis tout près du président de l’Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat. «La non présence des 3 dirigeants du Mali, Niger et Burkina Faso voir du Tchad est un message de la part des signataires mais je pense que le président Faye va dépasser tout ça rapidement et prendre le leadership en étant celui qui va réconcilier le Mali/ Niger / Burkina Faso avec la CEDEAO. Le président Faye voudra être l’homme du dialogue et de la construction durable des relations dans la région, pour cela, il s’appuiera sur le fait de s’être opposé politiquement aux sanctions du Sénégal à l’encontre du Mali édictées par la CEDEAO, son parti, le Pastef s’y était opposé en avançant qu’on ne sanctionne pas les peuples», déclare Alioune Sall, prospectiviste sénégalais.
S’il a déjà fort à faire pour répondre aux attentes des sénégalais, le président sénégalais est également attendu sur le dossier de l’intégration régionale qui ne peut se faire que dans l’apaisement retrouvé dans la région. «La seule voie possible pour le Mali, Niger et Bukina Faso est le désenclavement économique et territorial, il n’y a pas d’autres solutions, comme du reste la lutte contre le terrorisme dans la région, elle ne peut être réussie qu’avec l’implication de ces pays du Sahel en y ajoutant un pays comme la Mauritanie» indique Emmanuel Dupuy. Alors qu’une autre menace pour la sécurité dans la région est régulièrement pointée du doigt à savoir la milice russe armée Wagner, ce dernier ajoute «je ne pense pas que les milices armées Wagner soient une menace, d’une part car la Russie est en guerre et un conflit armé qui dure de surplus, ça coûte cher et d’autre part, je pense que l’Est du continent les intéresse plus que l’Ouest de l’Afrique ».
«Une chose est claire, le contexte général dans la zone Sahélo-Sahélienne reste favorable aux groupes terroristes qui pourraient même se développer dans le temps si rien n’est entrepris en matière de stabilité et de sécurité dans cette région », conclut Mohamed Benhamou.
Auteur/Autrice
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Rachid Hallaouy est journaliste et éditorialiste installé au Maroc depuis 2006. Après avoir collaboré avec de nombreux médias en presse écrite (L’Economiste), électronique (Yabiladi) et audiovisuel (France 24), il a rejoint Luxe radio pour y lancer en 2011 un concept de débat d’idées traitant de sujets politiques et économiques.
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