Après deux mois de confinement et deux semaines de déconfinement, l’économie française est entrée dans une phase de redémarrage à vitesse modérée.
À fin mai, selon l’INSEE, elle fonctionnerait à environ quatre cinquièmes de son niveau d’avant crise, contre seulement deux tiers durant le confinement. Le choc provoqué par la crise sanitaire n’en demeure pas moins important.
La France reste un des pays les plus touchés par la récession.
Si l’activité économique revenait intégralement à son niveau d’avant crise dès le mois de juillet, le PIB français diminuerait de 8 % sur l’année 2020. Les économistes de l’INSEE doutent de ce retour à la normale, préjugeant d’une récession encore plus forte. Dans tous les cas, la France enregistrera la plus sévère diminution du PIB depuis la mise en place du suivi de la croissance en 1948.
Avec la réouverture des commerces, les ménages français ont repris le chemin de la consommation, plus rapidement que leurs collègues italiens ou espagnoles. Le niveau de la consommation sur les deux dernières semaines de mai n’est plus inférieur que de 6 % à celui d’avant crise, contre -32% début mai. La consommation en produits manufacturés aurait dépassé de 6% son niveau en situation normale d’activité, contribuant à redresser la consommation totale.
Avec le déconfinement, redémarrage de la consommation
Les transactions par carte bancaire sur l’habillement-chaussure atteignent par exemple un niveau nettement plus proche de celui de 2019 que pendant le confinement, tandis que les transactions portant sur l’équipement du foyer auraient même fortement dépassé leur niveau de 2019. Les dépenses de carburant progressent faiblement en raison du maintien des restrictions de circulation et de l’encouragement au télétravail.
Par ailleurs, la sortie du confinement n’aurait pas altéré le dynamisme des dépenses des ménages en produits agro-alimentaires. La consommation en produits agricoles aurait été de 8 % supérieure à son niveau normal, parallèlement à celle des produits agro-alimentaires.
Le rebond résulterait notamment de la consommation de services personnels aux ménages (blanchisserie, coiffure, etc.) ou de services de réparation. Fort logiquement, les services associés à des activités encore soumises à des restrictions seraient restés à des niveaux de consommation particulièrement faibles, comme le transport aérien, les activités d’art et spectacle, ou encore l’hôtellerie et restauration. Les services principalement non marchands auraient vu leur consommation rebondir également, à travers la reprise des soins de ville et de l’enseignement marchand, sans retrouver encore le niveau d’une situation normale d’activité. Leur activité serait de 81 % par rapport au niveau d’avant crise.
Avec la reprise également des travaux de rénovation, la consommation des ménages dans la branche de la construction aurait augmenté par rapport à la période de confinement, mais de façon progressive (-39 % de perte de consommation, contre -75 % de perte en période de confinement).
Lent déconfinement de la production
Une relative reprise de l’activité économique s’observe dans l’ensemble des branches dont l’activité est autorisée.
La production industrielle française atteindrait 75 % de son niveau d’avant crise fin mai contre 62% mi-mai. Si la reprise du travail a pu se poursuivre, l’activité resterait affectée, entre autres, par une demande en berne et des stocks importants à écouler, en particulier dans le secteur automobile.
L’industrie a commencé à être touchée dès le mois de mars comme le prouve les statistiques de l’INSEE. Pour le seul secteur automobile, la contraction est de -41%. Il diminue également fortement dans les biens d’équipement. Le chiffre d’affaires diminue moins fortement dans les industries agricoles et alimentaires et l’énergie.
Dans les services, la perte d’activité économique serait de 25 %. Pour l’hébergement et la restauration, la perte atteint 90 %.
Les dangers de l’hystérisation de la crise
Les Français ont réalisé des achats indispensables après le confinement, habillement, coiffure, etc. Les craintes de baisse du pouvoir d’achat devraient peser néanmoins sur la consommation des prochains mois. Les informations inquiétantes sur la situation économique devraient favoriser l’attentisme et autoalimenter la crise.
Plusieurs enquêtes suggèrent que les Français demeurent très inquiets sur la situation sanitaire et exigent le maintien de mesures de protection. Ils restent méfiants vis-à-vis des statistiques officielles. Cette peur pèse sur l’activité tant au niveau de la consommation que la production.
La crise, un révélateur de la situation économique
Depuis 2008, l’économie française est à la peine. Les pertes de parts de marché industriel, la persistance d’un important déficit commercial, la lente amélioration de l’emploi sur fond de déficits publics élevés en étaient les marqueurs. La crise du covid19 a accentué les traits des faiblesses françaises d’autant plus qu’elle a directement touché des secteurs porteurs comme le tourisme et les transports.
La crise sanitaire signe le grand retour de l’interventionnisme étatique dans l’économie. Après plusieurs décennies de désengagement, les Etats redeviennent les grands horlogers de l’économie. Cette tentation est naturellement forte en France, pays où la tradition colbertiste se perpétue depuis plus de trois siècles. L’Allemagne n’est pas de reste avec l’annonce de la renationalisation partielle de la Lufthansa.
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