Si la France est depuis une quinzaine d’années en difficulté, à en croire certains, ce serait la faute de l’Europe et tout particulièrement de l’euro qui a mis au rebut l’outil de la dévaluation au sein de l’arsenal des politiques économiques.
Avant 1999, quand le pays connaissait un moment de faiblesse, les gouvernements recouraient à la dépréciation du franc afin de remettre les compteurs à zéro et de redresser la compétitivité des entreprises. La nostalgie de la dévaluation est toujours présente dans notre pays. Ses partisans oublient que cette dernière s’accompagnait fréquemment de plans de rigueur, de blocages des salaires et des prix voire d’un contrôle des changes. La dévaluation offrait peut-être un nouveau départ mais matérialisait aussi un appauvrissement.
En vingt ans, le Franc avait perdu la moitié de sa valeur
Entre 1970 et 1999, le Franc a ainsi perdu plus de la moitié de sa valeur par rapport au mark allemand. La dévaluation permettait de corriger, en partie, l’augmentation plus rapide des coûts salariaux et des prix et d’améliorer ainsi la compétitivité de l’industrie.
Si la France disposait encore de l’arme de la dévaluation, notre situation économique en serait-elle meilleure ? Aurions-nous pu échapper au processus de désindustrialisation ? La réponse est loin d’être évidente. Les maux dont souffre notre économie ne sont pas ceux d’hier. Depuis des années, les coûts salariaux, certes très élevés, évoluent moins vite que la moyenne des pays des États membres de la zone euro. Compte tenu de la dépendance du pays en biens industriels, une dépréciation monétaire augmenterait notre déficit commercial et réduirait le pouvoir d’achat des ménages. Elle serait censée faciliter les exportations. Or, l’industrie française serait, en l’état actuel, peu à même de répondre à la demande mondiale. Elle a perdu plus du quart de ses effectifs en vingt ans et sa production a diminué de près de 10% depuis la crise de 2008.
La France au 21ème rang pour la qualification de ses salariés
Le problème numéro un de l’industrie en France est de trouver des techniciens et des ingénieurs disposant des compétences requises. De 2012 à 2019, de plus en plus de chefs d’entreprise affirmaient avoir des problèmes de recrutement. La France qui compte deux fois plus de non-qualifiés qu’en Allemagne paie, en outre, cette faiblesse.
Selon le classement établi par l’OCDE, notre pays se classe au 21ème rang pour la qualification de ses salariés, loin derrière le Japon, la Finlande, les Pays-Bas ou la Suède.
Deux fois moins de robots que les entreprises allemandes
L’autre grand problème de l’industrie française provient de l’obsolescence de son outil de production. Les entreprises de ce secteur possèdent deux fois moins de robots que leurs homologues allemandes. Leur petite taille, la faiblesse de leurs fonds propres et une moindre appétence au progrès technique expliquent un sous-investissement chronique.
La France pâtit également d’un tissu industriel contrôlé par de très grandes entreprises ayant opté pour la production à l’étranger à la différence de leurs homologues allemandes. Les PME ont été contraintes de suivre leurs donneurs d’ordre ou se sont étiolées faute de commandes nationales. Les liens économiques et financiers au sein du monde industriel sont, par ailleurs, moins denses. Quand ils existent comme en Vendée, les résultats sont au rendez-vous.
Le retour souhaitable de l’industrie sur le territoire français n’est pas en soi inné. Il passe par un changement d’état d’esprit, par une élévation du niveau de compétences et par l’investissement. Il suppose aussi que les élus comme les citoyens acceptent que des usines, avec leurs éventuelles nuisances, s’installent dans leurs communes. Le rebond industriel français est une ardente ambition qui nécessite du temps et de la volonté. C’est une aventure au long cours qui mérite d’être menée.
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