« Et il lui fut donné autorité sur toute tribu, tout peuple, toute langue, et toute nation. » dit Jean de « la Bête » dans l’Apocalypse. Quelle est l’arme de la Bête ? La bêtise, bien sûr ! Alors que l’explosion démographique devrait multiplier les Einstein et les Mozart, des études récentes alertent sur une épidémie de crétinisme.
Dans tous les pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), les « performances de raisonnement et de résolution de problèmes déclinent ». La proportion d’adultes ayant une compétence « limitée » est passée de 15% de la population en 2006 à 25% en 2023. Aux États-Unis, en calcul, la proportion est de 35%. Comment font-ils pour le pourboire ? 30% des jeunes américains ont des difficultés à raisonner ou à se concentrer. Le double par rapport à 1990. Pour la première fois, le nombre d’Américains ayant lu un livre dans l’année est tombé à moins de 50%.
« Les gens, ils sont quand même plus cons que la moyenne ».
Les causes ? Les Haïtiens qui mangent des chats, dirait Trump. Pas si bête : son succès électoral ne vient-il pas, comme dans bien d’autres pays du monde, du rejet de l’immigration ? Mise en cause, aussi, la malbouffe. Une consommation excessive de sucre détériore la mémoire et perturbe les fonctions cognitives.
Les écrans, évidemment. Si la télé abrutit, quel mot choisir pour les réseaux asociaux ? Heureuse mécanique compensatoire, l’IA serait « plus intelligente » que la moyenne mondiale. Difficile de mesurer le QI d’une IA : « Les gens, ils sont quand même plus cons que la moyenne », avouait un micro-trottoir. Est-ce grave ? À regarder la carte du monde, gravissime.
De coups de menton en coups d’État, la Russie se réduit en attaquant l’Ukraine, Israël se détruit en rasant Gaza, les États-Unis s’abîment en reniant la statue de la Liberté « éclairant le monde » Le Moyen-Orient se terrorise, l’Afrique s’entretue. Les gangs gouvernent certains gouvernements, tous s’enchantent des abus de pouvoir. Preuves de malignité ou de bêtise ? L’intelligence avec l’ennemi n’est pas de l’intelligence. La Bête !
Conséquences immédiates, partout, ici. L’Algérie officielle tape sur la France ; la France répond sur le même ton : « ah, on va voir ce qu’on va voir ». Est-ce l’intérêt de la France, de l’Algérie ? Taper sur l’étranger, est-ce intelligent ? Répondre à la stupidité par la stupidité, est ce malin ? Compter sur soi, c’est plus difficile.
Les dirigeants ne sont que des maux provisoires.
Quelle serait la bonne réponse ? Jouer le peuple. Les Algériens plébiscitent la France, en rêvent, ils y sont plus libres qu’en Algérie. Mobiliser les Algériens, les Russes, les Turcs, les Américains, sur des idées, des projets, des ambitions, – la paix en est une – plutôt que les dirigeants, qui ne sont que des maux provisoires.
Erdogan enferme son principal opposant, le maire d’Istanbul ? Une manifestation permanente envahit Istanbul. Trump trahit l’Ukraine et les Européens ? L’opinion publique américaine soutient de plus en plus l’Ukraine : +10%. Effet démago immédiat : Trump autorise à nouveau les transferts d’armes, jusqu’à sa prochaine foucade. Les Européens se voient abandonnées par l’allié américain ? L’opinion publique européenne plébiscite une défense commune à 70%. Du jamais vu.
Les gouvernements suivent. Le nouveau gouvernement allemand fait sauter le verrou budgétaire pour investir dans la défense. La Commission lance un emprunt de 150 milliards et accélère l’union des marchés de capitaux.
Newton et le Tao ont raison : Toute action engendre réaction. Toute bêtise produit une force de réaction proportionnelle qui la surmonte. Il faut remercier Trump : sans lui, l’Europe tomberait en capilotade. Même le Canada aspire à la rejoindre, 29ème état européen plutôt que 51ème américain ! Et voilà le capitalisme américain qui se dresse pour sauver le monde : la bourse chute, le dollar aussi, la Tech décroche: Wall Street espère calmer la bête.
Toute bêtise produit une force de réaction proportionnelle qui la surmonte.
La démocratie « illibérale » se multiplie, surprend, effraie, oblige à réagir. Avec intelligence ? Avec un certain bon sens, ce qui, en politique, est le maximum de ce que l’on peut espérer. Il n’y a pas de génie en politique. Les grands hommes sont ceux des grands massacres et des grandes erreurs. Se contenter de gouvernements moyens évite les cauchemars.
Comment, alors, répondre à la Bête, qui n’en finit pas d’user de la force, de la terreur, de la corruption ? Ce sont les ambitions des grands, des grands États, qui provoquent les guerres. Limiter la puissance des gouvernements est la meilleure garantie de toute paix. Pourquoi Netanyahou poursuit la guerre ? Pas pour libérer les otages ni vaincre le terrorisme, mais pour éviter les poursuites judiciaires et museler la Cour.
Ce n’est pas Gaza qui pourrait être une Riviera paradisiaque, mais bien Israël, si un gouvernement israélien revenait à ce que voulaient les Begin, Sharon : une paix globale. À qui s’en prend Trump ? Aux juges. Comme Orban, Erdogan, Netanyahou. Comme toujours et partout. Rien n’est pire qu’un mauvais juge, certes, sinon un juge soumis.
Aujourd’hui, le gendarme a rejoint les voleurs. Quel autre système pour une paix perpétuelle ?
Entre les États, c’est pareil. Le système a fonctionné dans l’équilibre de la terreur avec le gendarme américain. Aujourd’hui, le gendarme a rejoint les voleurs. Quel autre système pour une paix perpétuelle ?
L’alliance des démocraties est morte, l’alliance des petits prendra sa place. Dans quels pays du monde vit-on le mieux ? Islande, Luxembourg, Singapour, Dubaï, Uruguay, Irlande, Pays-Bas, Danemark, Finlande, Suisse, Nouvelle-Zélande, Corée, Costa Rica, sur tous les continents, les petits font mieux que les grands. Les petits doivent faire attention à leurs voisins. Les petits doivent maximiser leurs ressources.
Les petits ne peuvent compter que sur eux. Les petits doivent forger des alliances. Ils savent qu’ils ne comptent pas face aux gros. Les petits n’ont pas de visée expansionniste. Les petits sont prudents, courageux, humbles. Ne jouent ni les va-t-en guerre ni les va-t-en paix. Les petits ont appris à dompter la bête, parce qu’ils ne se croient pas plus malins que les prétentieux qui gouvernent le monde.
Les Démocraties font peur quand elles soutiennent les démocrates.
La paix perpétuelle viendra de l’alliance des petits. Ce sont les petits États qui tiennent les clés de la démocratie la plus vivante, la plus proche. Ne jamais renoncer à combattre ceux qui se croient grands en soutenant les démocrates, partout dans le monde. Les démocraties ne feront pas peur avec des canons. Même si elles doivent en avoir pour se défendre. Elles font peur quand elles soutiennent les démocrates, autant que cela puisse se faire. C’est cela qui les gêne. En Algérie, en Iran, en Russie, en Azerbaïdjan, à Cuba, au Salvador, au Mali, partout où c’est possible, ne pas hésiter.
Un plan de réarmement est indispensable, un effort de réarmement moral aussi; c’est-à-dire politique. Peste soit des « grands hommes », donnez-nous les opprimés, les courageux, les humbles « car le royaume des cieux est à eux ». Pan sur la bête ! La bêtise, qui, comme le bon sens, « est la chose du monde la mieux partagée; car chacun pense en être si bien pourvu, que ceux mêmes qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose n’ont point coutume d’en désirer plus qu’ils en ont. » À malin, malin et demi.
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