Pour l'ONU, un « hiver de mécontentement » se prépare

Pour l'ONU, un « hiver de mécontentement » se prépare

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a dressé mardi 20 septembre un sombre tableau de l’évolution de la situation mondiale, évoquant un « hiver de mécontentement » dû à la hausse des prix, au réchauffement climatique ainsi qu’à des conflits meurtriers.

« Notre monde est au plus mal », a déclaré Antonio Guterres lors du débat annuel de l’Assemblée générale des 193 membres des Nations unies à New York.

Selon le nouveau bilan de l’ONU, les pays sont aux prises avec « un dysfonctionnement mondial colossal » et sont de moins en moins prêts ou disposés à relever les grands défis.

« Un hiver de mécontentement mondial se profile à l’horizon », a déclaré M. Guterres.

« La confiance s’effrite, les inégalités explosent, la planète brûle, les gens souffrent et les idéaux de la Charte des Nations Unies sont en danger », a-t-il ajouté en présentant le rapport annuel sur les travaux de l’instance.

Soulignant que la coopération et le dialogue sont les seuls moyens d’aller de l’avant, il a averti qu’« aucune autre nation ou pays ne devrait avoir à supporter [ces conséquences] ».

Ukraine : une paix improbable ?

La guerre menée par la Russie en Ukraine a jeté une ombre sur la réunion et la plupart des participants ont déclaré que les chances de dialogue entre les Russes et les Ukrainiens à New York étaient faibles.

M. Guterres s’est fait l’écho de cette idée dans son discours d’ouverture en déclarant que le temps des négociations de paix sur l’Ukraine viendrait, mais qu’il ne pensait pas que cela allait arriver dans un avenir immédiat.

« Cette guerre ne durera pas éternellement. Il y aura un moment où des négociations de paix auront lieu », a expliqué M. Guterres aux journalistes plus tard lorsqu’il s’est exprimé aux côtés du président autrichien Alexander Van der Bellen.

« Je ne vois pas cela dans l’avenir immédiat. Mais je peux dire une chose : nous n’abandonnerons jamais. »

Sécurité alimentaire

La sécurité alimentaire était un autre point majeur de l’ordre du jour. Avec en toile de fond les images du navire Brave Commander, l’un des navires utilisés pour transporter plusieurs tonnes de blé ukrainien à destination de l’Éthiopie, du Yémen et d’autres pays dans le besoin, que M. Guterres a qualifié de symbole de « ce que le monde peut accomplir lorsque nous agissons ensemble ».

Le Brave Commander

Il a également salué « l’Initiative céréalière de la mer Noire, rendue possible par l’Ukraine et la Fédération de Russie elles-mêmes, avec le concours de la Türkiye [Turquie] », qui ont uni leurs efforts pour faire aboutir ce projet, en dépit de la complexité de la situation, des opposants et de l’enfer de la guerre.

Toutefois, bien qu’elle se présente comme une force de médiation neutre, la Turquie a été accusée ces dernières semaines d’être un pays qui pourrait aider d’autres pays à échapper aux embargos internationaux et aux sanctions.

Plus de 200 ONG ont appelé les dirigeants réunis pour l’Assemblée générale à prendre des mesures urgentes pour « mettre fin à la spirale de la crise alimentaire mondiale ».

« Dans le monde, 50 millions de personnes sont au bord de la famine dans 45 pays », ont-elles déclaré, avant d’ajouter que l’on estime que 19 700 personnes meurent de faim chaque jour, soit une personne toutes les quatre secondes.

L’Union européenne, les États-Unis, l’Union africaine et l’Espagne ont coprésidé un sommet spécial sur la sécurité alimentaire qui a également eu lieu mardi, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies. Ce sommet s’inscrit dans le prolongement d’une réunion du G7 qui s’est tenue en juin et au cours de laquelle les pays se sont engagés à consacrer environ 4,5 milliards d’euros à la lutte contre la faim dans le monde.

Changement climatique

Le changement climatique a également dominé la réunion, alors que le monde continue de subir les effets découlant des phénomènes météorologiques extrêmes.

« Nous avons rendez-vous avec la catastrophe climatique », a déclaré Antonio Guterres.

« Ce doit être la priorité absolue de chaque gouvernement et organisation multilatérale », a-t-il ajouté.

Alors que les températures mondiales augmentent et que les catastrophes naturelles, comme les inondations massives au Pakistan, se multiplient, M. Guterres a dénoncé un monde « accro aux combustibles fossiles » et a appelé les États à demander des comptes à ceux qui continuent d’investir dans ce secteur.

Il a appelé toutes les économies développées à taxer les bénéfices des combustibles fossiles et à utiliser les recettes pour compenser les dommages causés par le changement climatique et aider les personnes qui luttent contre les prix élevés.

« Les pollueurs doivent payer », a-t-il affirmé.

« Ces fonds doivent être réorientés vers les pays dans lesquels la crise climatique occasionne des pertes et vers les personnes mises en difficulté par la hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie », a-t-il déclaré lors du rassemblement annuel des dirigeants mondiaux à New York.

Les autres crises

Outre l’urgence climatique et la perte de biodiversité ainsi que la guerre en Ukraine, le chef de l’ONU a également souligné des crises telles que la situation financière désastreuse des pays en développement et l’avancement des pays en ce qui concerne les objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU.

Il a également souligné les signaux alarmants liés à une multitude de nouvelles technologies, la montée des discours haineux et la surveillance numérique « hors de contrôle ».

« Nous ne disposons même pas d’un début d’architecture mondiale pour faire face à tout cela. »

M. Guterres a également évoqué d’autres conflits qui sont passés de plus en plus au second plan au cours des derniers mois.

Outre l’Afghanistan, où l’économie est dévastée et où les droits de l’homme sont bafoués, M. Guterres a également mentionné la reprise des affrontements en Éthiopie et en Haïti, où les gangs « détruisent les fondements mêmes de la société ».

« En Libye, les divisions continuent de mettre en péril le pays. En Irak, des tensions permanentes menacent la stabilité », a-t-il noté.

« En Israël et en Palestine, les cycles de violence sous l’occupation se poursuivent alors que les perspectives de paix fondées sur une solution à deux États s’éloignent de plus en plus », a-t-il ajouté.

Parmi les autres dirigeants qui se sont exprimés mardi, citons le président turc Recep Tayyip Erdoğan, qui a rencontré le Premier ministre israélien Yair Lapid, signe d’un réchauffement des relations après les critiques virulentes du président turc sur le traitement des Palestiniens par l’État juif.

Lundi (19 septembre), le secrétaire d’État américain Antony Blinken avait déjà convoqué la première réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie depuis que les combats y ont éclaté ce mois-ci. Les dirigeants européens, dont le chef de la diplomatie de l’UE Josep Borrell, devraient assurer le suivi des efforts de médiation.

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