Perspectives économiques : la confiance des entreprises européennes se dégrade

Selon une enquête publiée jeudi 28 novembre par la Table ronde des industriels européens (ERT), la confiance des chefs d’entreprise de l’Union européenne (UE) dans les perspectives économiques du continent a fortement chuté au second semestre 2024.

Alors que les tensions économiques au niveau mondial pourraient fortement impacter l’économie européenne, la Table ronde des industriels européens — un groupe d’intérêt rassemblant des entreprises du continent — note une dégradation de la confiance des entreprises, passée de 58 à 47 (sur 100) entre le premier et le second semestre de cette année. Elle franchit la barre des 50, qui sépare symboliquement l’optimisme du pessimisme.

Selon les dirigeants d’entreprises interrogés, les barrières commerciales qui se multiplient et l’instabilité politique mondiale sont des menaces pour leurs affaires. 84 % d’entre eux considèrent cette fragmentation comme l’un des trois principaux dangers et 55 % la considérant comme le risque principal.

Seuls 9 % des chefs d’entreprise soutiennent l’imposition de droits de douane pour protéger l’industrie européenne de la concurrence chinoise, tandis que seuls 4 % approuvent l’octroi de subventions aux entreprises.

« [Les chefs d’entreprises] veulent des marchés ouverts et fonctionnels », explique pour Euractiv Maria Demertzis, analyste au Conference Board Europe, le centre de recherche qui a développé la méthode de mesure utilisée dans l’étude. « Ils veulent [un marché ouvert et fonctionnel] à l’intérieur et à l’extérieur de [l’UE]. »

L’enquête de l’ERT intervient dans un contexte de frictions commerciales croissantes entre Bruxelles, Pékin et Washington — des tensions qui, selon certains, pourraient dégénérer en de véritables guerres commerciales quand Donald Trump sera de retour à la Maison-Blanche en janvier prochain.

Le nouveau président américain s’est en effet engagé à imposer des droits de douane de 60 % sur les produits chinois, ainsi que des droits de douane « universels » de 10 à 20 % sur les importations d’autres pays.

Pour Maria Demertzis, il est toutefois peu probable que Donald Trump mette en œuvre ces propositions, expliquant qu’il s’agit surtout de déclarations électoralistes.

Les chefs d’entreprise sont massivement d’accord pour dire que l’accélération de la fragmentation économique et politique constitue une menace géopolitique majeure pour leurs entreprises, 84 % d’entre eux la considérant comme l’un des trois principaux dangers et 55 % la considérant comme le risque principal. ©GETTY IMAGES/KARL HENDON
Les chefs d’entreprise sont massivement d’accord pour dire que l’accélération de la fragmentation économique et politique constitue une menace géopolitique majeure pour leurs entreprises, 84 % d’entre eux la considérant comme l’un des trois principaux dangers et 55 % la considérant comme le risque principal. ©GETTY IMAGES/KARL HENDON

Ce dernier pourrait cependant utiliser le bâton des droits de douane afin de forcer le continent à investir en matière de défense et à acheter du gaz naturel liquéfié (GNL) américain.

« Il va probablement négocier pour obtenir plus de revenus [de] l’Europe », souligne-t-elle. « Je ne me prononcerai pas sur l’ampleur de ce phénomène. »

Le rapport Draghi

L’enquête de l’ERT montre qu’une grande majorité de patrons soutient aussi l’appel de l’ancien président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, à stimuler la compétitivité de l’Union, en approfondissant le marché unique et en réduisant le fardeau règlementaire qui pèse sur les entreprises.

Ilham Kadri, vice-présidente de l’ERT, a déclaré que l’enquête mettait en évidence la conviction des chefs d’entreprise que « la mise en œuvre complète du rapport Draghi [sur la compétitivité de l’Union] sera transformatrice, fournissant une plateforme pour faire de l’Europe la destination la plus attrayante pour l’investissement ».

L’étude de l’ERT s’inscrit dans un climat de craintes généralisées concernant l’économie européenne, qui souffre des prix élevés de l’énergie, de faibles niveaux d’investissement et d’une faible demande.

Selon les dernières prévisions de la Commission européenne, le PIB de l’UE ne progressera que de 0,9 % cette année, soit un tiers du taux de croissance des États-Unis.

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé mercredi 27 novembre que la première initiative majeure de sa nouvelle Commission serait une « boussole pour la compétitivité » s’appuyant « sur les trois grands piliers » économiques présentés dans le rapport Draghi, à savoir l’innovation, la décarbonation et la sécurité.

« Le premier [pilier] devra combler l’écart qui nous sépare des États-Unis et de la Chine en matière d’innovation. Le deuxième est l’élaboration d’un plan conjoint pour la décarbonation et la compétitivité. Troisièmement, il s’agit de renforcer la sécurité et de réduire les dépendances », a expliqué la cheffe de l’exécutif européen.

S’exprimant avant l’approbation de sa nouvelle équipe par le Parlement européen, Ursula von der Leyen a fait écho à l’appel de Mario Draghi en faveur d’un environnement plus favorable aux entreprises et d’une plus grande intégration des marchés.

« La grande force du marché unique est qu’il remplace la myriade de normes et de coutumes nationales par un ensemble unique de règles. Nous devons donc revenir à ce que le marché unique fait de mieux, [c’est-à-dire] faciliter les affaires dans toute l’Europe. », a-t-elle déclaré.

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