Marine Le Pen joue son avenir politique lors du procès de l’affaire des « assistants parlementaires »

Marine Le Pen joue son avenir politique lors du procès de l’affaire des « assistants parlementaires »

Alors que le Rassemblement national (RN) n’a jamais été aussi influent en France et à Bruxelles, Marine Le Pen et 26 autres personnes doivent répondre de « détournements de fonds européens », lors d’un procès qui pourrait décider de l’ambition présidentielle de la cheffe du parti d’extrême droite.

Marine Le Pen espère, en 2027, pouvoir se lancer une quatrième fois dans la course à la présidentielle. À moins que la justice n’en décide autrement.

À partir de ce lundi 30 septembre, durant deux mois et au terme de dix ans d’enquêtes, la cheffe du RN doit être jugée pour « détournements de fonds européens ». Elle risque jusqu’à dix ans de prison, un million d’euros d’amende, et une peine d’inéligibilité pouvant aller jusqu’à cinq ans.

« Marine [Le Pen] est combative, elle sera très présente au procès, elle veut remettre les pendules à l’heure », explique au journal Mediapart l’avocat Alexandre Varaut, élu au Parlement européen en juin 2024 et assurant la communication du RN sur ce dossier sensible.

Les magistrats soupçonnent le parti d’extrême droite d’avoir, « de manière concertée et délibérée », mis en place entre 2004 et 2016 un « système de détournement » des enveloppes allouées par l’Union européenne (UE) à chaque eurodéputé pour rémunérer ses assistants parlementaires.

Ces derniers auraient en réalité travaillé entièrement ou partiellement pour le parti, lui permettant des économies substantielles de salaires, à une époque où le RN manquait cruellement de liquidités. Le Parlement européen, qui s’est constitué partie civile pour l’affaire, a évalué son préjudice à 6,8 millions d’euros.

Au total, ce sont onze eurodéputés sur des listes du parti, douze individus ayant été leurs assistants parlementaires, ainsi que quatre collaborateurs, qui doivent être jugés.

Parmi les prévenus figurent le maire de Perpignan Louis Aliot, l’ancien numéro 2 du mouvement Bruno Gollnisch, le député Julien Odoul ou encore l’eurodéputé Nicolas Bay, membre du groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) qui a été élu en juin dernier sur la liste de Reconquête.

Marine Le Pen joue son avenir politique lors du procès de l’affaire des « assistants parlementaires »
Marine Le Pen, le 15 septembre 2024 ©EPA-EFE/ANDRE PAIN

Dix ans d’enquêtes

L’affaire avait éclaté en mars 2015, quand le président du Parlement européen de l’époque, le social-démocrate allemand Martin Schulz, avait signalé aux autorités françaises un possible détournement de fonds. Quelques jours plus tôt, le parti d’extrême droite avait publié un organigramme de sa direction dans lequel apparaissent plusieurs assistants censés travailler à Strasbourg.

Depuis, Marine Le Pen crie au complot. « Nous sommes totalement innocents […] Cette affaire a été lancée pour des raisons politiques par [Martin] Schulz », expliquait-elle sur France Inter en 2018.

« Marine le Pen n’est coupable de rien, c’est encore une fois une manœuvre de diversion pour tenter de salir le Rassemblement national, nos électeurs le savent bien », soulignait encore le 26 septembre sur France Info l’eurodéputé Julien Sanchez.

Les documents et les témoignages se sont pourtant accumulés au fil des années.

« Je vous indique que vous aurez le choix de recruter par vous-même un assistant et que le reste de votre enveloppe sera mis à la disposition du mouvement », aurait par exemple expliqué la cheffe du RN lors d’une réunion des nouveaux eurodéputés du parti, le 4 juin 2014, souligne Libération.

Le journal rappelle que plus de 2500 pièces ont été fournies au dossier d’instruction.

Deux cas d’assistants parlementaires pour lesquels de fausses preuves de travail auraient été produites ont encore été révélés par les médias ces dernières semaines. Parmi eux, Jordan Bardella, président du nouveau groupe des Patriotes pour l’Europe au Parlement européen et collaborateur en 2015 de l’eurodéputé Jean-François Jalkh.

Toujours selon Libération, de faux agendas et des revues de presse annotées à la main auraient été confectionnés a posteriori pour prouver l’activité de Jordan Bardella, qui n’a jamais été entendu par la justice dans le dossier des assistants parlementaires du RN.

Le président du mouvement a d’ailleurs rapidement dénoncé les accusations de Libération, qualifiées de « mensongères ».

Les longues semaines d’audition qui s’annoncent seront pourtant pénibles pour le parti d’extrême droite, alors même que les 143 députés du RN et de leurs alliés tiennent entre leurs mains le sort du gouvernement du Premier ministre Michel Barnier, qu’ils sont en capacité de faire tomber à tout moment.

À moins que les audiences ne permettent une nouvelle fois au mouvement de se revendiquer comme « anti-système ».

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