Dans l’espoir d’empêcher une arrivée massive de réfugiés, la diplomatie européenne se déploie en Grèce et en Turquie. Mais le président turc, Recep Tayyip Erdogan, affirme ne plus vouloir « de l’argent de l’UE ». Un article d’Euractiv.
Les présidents de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, du Conseil européen, Charles Michel, et du Parlement européen, David Sassoli, se sont rendus mardi 3 mars à la frontière gréco-turque. De son côté, Josep Borrell, le haut représentant de l’UE pour la politique étrangère, effectue un voyage en Turquie pour évoquer la situation dans la province syrienne d’Idlib.
Josep Borrell sera à Ankara les mardi 3 et mercredi 4 mars, accompagné de Janez Lenarcic, le commissaire européen chargé de la protection civile et de la coordination de l’aide humanitaire. Le haut représentant européen analysera la situation dans la province syrienne d’Idlib – à l’origine de cette nouvelle crise humanitaire – et ses conséquences pour la population civile.
D’après un communiqué du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), Josep Borrell et Janez Lenarcic, qui doivent rencontrer les autorités turques à Ankara, discuteront de la situation des réfugiés à la frontière gréco-turque.
Le commissaire Lenarcic poursuivra pour sa part son voyage en Turquie en visitant les installations destinées à l’accueil des réfugiés dans le sud-est de Gaziante, afin d’évaluer les besoins sur le terrain et le soutien que l’Union européenne peut apporter pour faire face au drame humanitaire dans la région.
Les chiffres ne correspondent pas
La Turquie affirme que des milliers de réfugiés et de migrants continuent de franchir la frontière avec la Grèce, alors que la police grecque assure que la nuit a été relativement calme et que depuis samedi, seules 25 000 personnes ont tenté, sans succès, d’entrer dans le pays.
Mardi 3 mars, le ministre turc de l’Intérieur, Süleyman Soylu, a assuré qu’à 06:15 GMT, un total de 130 469 réfugiés avait quitté la Turquie depuis le 28 février. Ce jour-là, le gouvernement a déclaré qu’il ne pouvait plus éviter que les réfugiés franchissent la frontière vers l’Union européenne et qu’il ne tenterait pas de s’interposer.
La situation à la frontière gréco-turque s’est empirée le samedi 29 février à la suite de la décision officielle d’Ankara de laisser des milliers de migrants entrer sur le territoire européen.
Cette annonce a incité des milliers de personnes, dont de nombreux réfugiés de la guerre civile syrienne installés en Turquie depuis des années, à se mettre en route. Leur but : franchir la frontière terrestre avec la Grèce ou rejoindre, à bord de petites embarcations, les îles grecques de la mer Égée les plus proches des côtes turques.
Nombre d’entre eux ont affirmé que la police turque les avait encouragés et même aidés à se rapprocher de la frontière, alimentant les rumeurs selon lesquelles la Grèce autoriserait le passage. En réalité, le gouvernement grec a renforcé la présence policière et militaire à la frontière et a employé la force pour empêcher les entrées sur le territoire.
Les chiffres de la Turquie contrastent avec ceux de la Grèce. Des sources du gouvernement grec ont indiqué à Euroefe que 25 000 personnes avaient été empêchées d’entrer illégalement sur leur territoire depuis samedi dernier.
Au total, 183 personnes ont été arrêtées et certaines d’entre elles (dont le nombre demeure inconnu) ont été condamnées à quatre ans de prison et à une amende de 10 000 euros.
Selon une source policière qui se trouve dans la zone de la frontière gréco-turque, bien que la nuit ait été relativement calme, des milliers de personnes sont encore massées du côté turc de la frontière.
La police turque, qui laisse passer les réfugiés, empêche en revanche la presse de s’approcher de la frontière.
Erdogan dit qu’il ne veut plus de l’argent européen
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré le 2 mars que son pays ne voulait plus de l’argent de l’UE pour aider les réfugiés de la guerre en Syrie et a averti que son pays n’en n’accueillerait plus.
« Les Européens pensent que la Turquie va continuer à s’occuper des réfugiés pendant encore neuf ans. Mais cela n’arrivera pas », a déclaré le dirigeant turc, en référence aux neuf années de conflit dans le pays voisin.
Les dernières mises en garde d’Erdogan ont eu lieu après une rencontre avec le Premier ministre bulgare, Boyko Borissov, qui avait proposé un sommet entre la Turquie et plusieurs pays de l’UE à Sofia dans les prochains jours. Une proposition rejetée par le président turc.
La Turquie accueille plus de 3,5 millions de réfugiés syriens. En 2016, elle a convenu avec l’UE qu’en échange du paiement de quelque 6 milliards d’euros, elle garderait la plupart d’entre eux sur son territoire, principalement ceux qui ont fui la Syrie en raison de la guerre.
« La Turquie a rempli ses responsabilités à l’égard des réfugiés syriens. Mais l’UE n’a pas respecté la déclaration du 18 mars (2016) et continue d’appliquer deux poids deux mesures », a accusé Recep Tayyip Erdogan lors d’une conférence de presse avec Boyko Borissov.
« Ils ont dit qu’ils allaient nous envoyer un milliard d’euros. De qui se moque-t-on ? Nous ne voulons plus de cet argent. La Turquie a dépensé 40 milliards d’euros. Personne n’a le droit de jouer avec l’honneur de la Turquie. L’UE continue d’appliquer deux poids, deux mesures », a affirmé le président turc.
Plus d’arrivées à Lesbos que la moyenne
Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR), plus de 1 000 personnes sont arrivées ces derniers jours sur les îles de la mer Égée. Un chiffre supérieur à la moyenne des débarquements de ces dernières semaines.
Sur des îles telles que Lesbos, des habitants ont attaqué des ONG travaillant avec les migrants et ont également tenté d’empêcher les nouveaux venus de débarquer.
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