L’Inde et l’Afrique pourront-elles remplacer la Chine ?

L’Inde et l’Afrique pourront-elles remplacer la Chine ?

La croissance de la Chine est attendue à la baisse pour les prochaines années du fait du vieillissement de la population tandis qu’une partie non négligeable du rattrapage économique a été réalisée. Elle est déjà passée en quelques années de 14% en 2007 à 6,6% en 2018, soit le plus faible taux enregistré lors de ces vingt-huit dernières années. Depuis les années 80, la Chine est l’un des premiers moteurs de l’économie mondiale. Son affaiblissement risque d’avoir des répercussions sur celle-ci.

Pour compenser la moindre performance de la Chine, certains comptent sur la montée en puissance de l’Inde ou de l’Afrique constitué de 51 Etats qui ne sont pas tous au même niveau de développement.

Un ralentissement progressif de la croissance chinoise devrait se poursuivre

Avec le vieillissement démographique et des gains de productivité stabilisés autour de 4% par an, la croissance potentielle de la Chine devrait s’effriter progressivement jusqu’à se situer d’ici une dizaine d’années entre 2,5 et 3%. La population âgée de 20 à 60 ans devrait diminuer en Chine de 0,5 à 1% en rythme annuel et cela jusqu’en 2030. Les gains de productivité par tête sont passés de 10 à moins de 5% de 2006 à 2018.

L’OCDE estime que la Chine ne pourra pas compter comme lors des dernières décennies sur les exportations pour maintenir un fort taux d’activité. L’organisation internationale invite les autorités chinoises à accentuer leurs efforts afin de privilégier des stratégies à long terme en faveur de la consommation intérieure et les services. L’OCDE pointe également du doigt la montée des risques financiers du fait du niveau élevé de la dette des entreprises. Elle préconise l’instauration d’un véritable marché unique des produits et du travail, ce qui n’est pas sans poser des problèmes d’ordre politique au Gouvernement. L’OCDE considère que la Chine sera contrainte de se banaliser afin de continuer à recevoir des investissements internationaux. Ainsi, l’abaissement des droits de douane à l’importation, le démantèlement des obstacles non tarifaires et la fin des restrictions à l’entrée des capitaux sont de plus en plus nécessaires pour maintenir élevé le taux de croissance. La réglementation de la lutte contre les monopoles et ses modalités d’application pourraient être renforcées. Les procédures d’accès aux marchés publics pourraient être plus transparentes, respecter la neutralité technologique et être ouvertes à tous les acteurs.

De nouveaux moteurs de croissance peuvent-ils prendre le relais ?

Au début des années 2010, la Chine était à l’origine du tiers de la croissance de l’économie mondiale. Ce poids décline depuis. Afin de maintenir la croissance mondiale autour de 3% dans les prochaines années, des relais sont nécessaires. L’Inde et l’Afrique sont souvent mises en avant. La première dépasse en rythme de croissance la Chine depuis deux ans. Avec une population de plus de 1,3 milliard d’habitants, en augmentation, l’Inde dispose d’un potentiel de croissance assez élevé. L’économie du continent africain devrait être dynamique durant les prochaines décennies en raison de la forte progression de sa population qui devrait passer de 1,2 à 2,5 milliards d’habitants de 2017 à 2050.

Pour le moment, la croissance de l’Afrique reste relativement faible, autour de 3,5 %. Elle demeure très tributaire des matières premières et des problèmes politiques que rencontrent régulièrement les pays de ce continent. Pour jouer un rôle économique majeur, l’Inde comme l’Afrique sont actuellement entravées par leur insuffisance d’épargne.

Cette faiblesse empêche le financement des investissements nécessaires à la croissance. Le taux d’investissement s’élève à 32 % du PIB en Inde quand le taux d’épargne est de 29 % du PIB. Les valeurs respectives en Afrique sont 24 et 19 %. Ce manque d’épargne pèse sur la réalisation des infrastructures et donc sur la croissance ainsi que sur la capacité de rattrapage de ces économies. Si de 1998 à 2018, la Chine a été capable de multiplier par 5 la production d’énergie électrique par habitant, en Afrique, cette dernière est restée stable quand en Inde l’augmentation n’a été que de 20%.

Durant la phase de décollage, la Chine a été capable de dégager d’importants excédents commerciaux qui ont facilité le financement de l’économie. La balance courante était excédentaire de plus de 4 % du PIB au début du siècle. Cet excédent a même atteint plus de 10 % du PIB en 2007. En revanche, l’Inde et l’Afrique connaissent des déficits structurels (respectivement -3 et -3,5 % du PIB en 2018). Ces deux zones économiques sont confrontées à des dettes extérieures élevées (respectivement 18 et 20 % du PIB) quand la Chine dégage une position extérieure positive de plus de 10 % du PIB. L’accumulation permanente d’endettement extérieur conduit à une tendance à la dépréciation du taux de change, qui appauvrit l’Inde et l’Afrique par la détérioration des termes de l’échange. Ces deux zones sont très sensibles à la fois aux variations monétaires et aux variations de taux d’intérêt.

L’activité en Inde et en Afrique est freinée par le niveau d’éducation encore faible de la population. Le taux d’alphabétisation est de 71 % en Inde contre 96 % en Chine. En Afrique, ce taux varie fortement d’un pays à un autre (de 45 % pour le Tchad à 98% pour l’Afrique du sud). En moyenne, il se situe autour de 65 %.

extrait de Lorella Ecodata, lettre d’information économique confidentielle avec l’autorisation de son Président, Philippe Crevel, économiste
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