PARIS – Malgré leurs mutliples remarques concernant la politique européenne la semaine dernière, les américains Elon Musk — propriétaire de X — et Mark Zuckerberg — patron de Meta — n’ont pas été confrontés à une répartie, unanime, de la part des réponses des responsables politiques de l’Union européenne (UE). Jusque là, leurs réponses sont restées plutôt timides.
Lors d’un entretien en podcast avec Joe Rogan — partisan de Donald Trump — samedi 11 janvier, Mark Zuckerberg a qualifié le cadre réglementaire numérique de l’UE de « censure », a comparé la politique de la concurrence à « un tarif presque douanier ». Il a appelé la future administration Trump à défendre l’industrie technologique américaine contre l’application du cadre réglementaire numérique de l’Union européenne.
Les réactions des dirigeants européens sont toutefois restées timides au cours du week-end. Ces derniers rappelant simplement que les géants américains du domaine technologique sont tenus de se conformer aux règles de l’Union en matière de numérique.
Le ministre allemand du Numérique, Volker Wissing, et son homologue française, Clara Chappaz, ont déclaré que leurs gouvernements respectifs prenaient la question « au sérieux ». De plus, ils font confiance à la Commission européenne pour mener une enquête approfondie, évaluer et faire appliquer la loi européenne sur la modération des contenus — le règlement sur les services numériques (DSA).
Commission européenne VS Big Tech américaines
La législation de l’UE est solide, et les Européens peuvent être sûrs que la Commission possède désormais les outils nécessaires pour contrer efficacement les Big Tech américaines, a souligné Clara Chappaz dimanche soir sur France 5.
Sollicitée par Euractiv, l’équipe de la vice-présidente exécutive de la Commission européenne Henna Virkkunen — la principale responsable de l’application du DSA au sein de l’UE — a répondu en renvoyant à un post sur X qui n’abordait pas directement les affirmations de Mark Zuckerberg. Dans un entretien accordé à Politico, la responsable politique a également qualifié de « trompeuses » les allégations de censure du patron de Meta.
Néanmoins, l’appel de Mark Zuckerberg à l’administration américaine pour protéger les grandes entreprises technologiques des règles numériques de l’UE, associé à la menace faite par Donald Trump d’imposer des droits de douane allant jusqu’à 20 % sur les produits de l’UE, soulève de sérieux doutes quant à la capacité politique de la Commission à appliquer efficacement le droit communautaire.
Prise en tenaille par l’instabilité politique en France et en Allemagne, la Commission se trouve en effet dans une position précaire.
L’organe exécutif semble attendre son heure. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ayant été mise à l’écart toute la semaine dernière en raison d’une pneumonie. Le moment est cependant crucial. Et cela malgré la réflexion de l’institution à une éventuelle action en justice contre les grandes entreprises américaines, à sept jours de l’investiture de Donald Trump.
Annonces précédentes
Henna Virkkunen a indiqué que son équipe pourrait lancer d’autres enquêtes sur les violations des règles de modération de contenu de l’UE si les actions récentes des géants américains de la technologie, tels que Mark Zuckerberg et Elon Musk, sont jugées contraires aux règles de modération de contenu définies par le DSA.
Le 7 janvier, Mark Zuckerberg a dévoilé des mises à jour des politiques de modération des contenus de Meta. Cela déclenchant une polémique, en particulier à propos d’une nouvelle fonctionnalité qui pourrait potentiellement étiqueter les membres de la communauté LGBTQIA+ comme des malades mentaux.
En réponse, la Commission examine actuellement les évaluations d’impact soumises par Meta pour Facebook et Instagram. Ces derniers se concentrent sur les changements apportés aux définitions des discours et des comportements haineux sur les plateformes.
La fin du programme de vérification sur Meta
La décision de Meta de mettre fin à son programme de vérification des faits par des tiers aux États-Unis a également suscité des inquiétudes. D’autant plus que l’entreprise n’a pas encore fait d’annonces similaires pour l’UE. Toutefois, dans une interview sur France Info vendredi, Clara Chappaz s’est dite convaincue que Meta se conformerait aux règles de modération des contenus de l’UE dans le cadre de l’accord de libéralisation du commerce.
La Commission a déjà ouvert une enquête formelle sur les plateformes Facebook et Instagram en mai dernier, en raison de préoccupations relatives à la protection des mineurs.
De son côté, Elon Musk a utilisé à plusieurs reprises son réseau social X pour encourager les Allemands à soutenir l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) — un parti d’extrême droite — lors des prochaines élections. Jeudi dernier, il a également échangé avec Alice Weidel sur X, tête de liste de l’AfD, alimentant encore la controverse.
La Commission enquête actuellement sur six violations du DSA commises par X. Notamment au sujet des exigences en matière de vérification, l’accès aux données pour les chercheurs et la transparence de la publicité. Mais également les politiques en matière de discours haineux, la modération des contenus violents et le processus de vérification des faits par les utilisateurs de la plateforme.
En vertu du DSA, chaque violation peut entraîner des amendes allant jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise.
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