Alors que les finances publiques de tous les États membres de l’UE sont désormais en dehors de la zone rouge, la Commission européenne a encore des recommandations de politique économique strictes pour l’Espagne, l’Italie, la Belgique, la Grèce et l’Allemagne.
La fiesta en Espagne…pour le moment
Comme prévu, la Commission a proposé de fermer la procédure de déficit excessif contre l’Espagne. Les États membres devraient donner leur bénédiction à cette recommandation dans les semaines à venir.
Une fois l’Espagne sortie de cette procédure, il ne restera aucun pays au sein du programme de surveillance budgétaire de l’UE, par rapport à 24 pays en 2011.
Le déficit espagnol a fini par passer sous la barre des 3 % du PIB en 2018 (à 2,5 %) et restera sous cette limite cette année et la prochaine.
« C’est la fin du cycle de procédures de déficit excessif qui a débuté avec la crise », a déclaré Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques.
Même si la décision « marque la fin d’un chemin difficile », les problèmes perdurent pour l’économie ibérique, a-t-il ajouté. Avec en premier lieu le haut niveau de chômage dans le pays, le recours généralisé aux contrats temporaires et le haut volume de dette publique.
À cet égard, Madrid fait encore face à une rude bataille pour équilibrer ses comptes publics. Le pays détient le record du plus grand déficit structurel de la zone euro (3 % du PIB, soit environ 36 milliards d’euros). Et depuis 2017, le pays n’a fait aucun effort pour le réduire.
Pour régler ce problème, le vice-président de la Commission en charge de l’euro, Valdis Dombrovskis, a déclaré que l’Espagne devait consentir un effort structurel de 0,65 % de son PIB (soit environ 7,8 milliards) en 2019 et en 2020, soit en augmentant les impôts soit en réduisant les dépenses.
Toutefois, le programme de stabilité soumis par Madrid présente un risque de « déviation importante » de cet objectif, prévient-il.
Drame italien
Après avoir évalué les efforts de l’Italie pour réduire la dette publique élevée (environ 132 % du PIB), la Commission a conclu que le gouvernement avait échoué à réaliser ces efforts imposés.
Il est par conséquent « justifié » de lancer une procédure de déficit excessif en fonction du critère de la dette du programme de stabilité et de croissance, explique Valdis Dombrovskis.
Les États membres devraient décider dans les prochaines semaines d’approuver cette recommandation. La procédure pourrait mener à une amende de 3,5 milliards d’euros pour Rome (ou 0,2 % du PIB italien).
La situation s’est empirée depuis décembre dernier, quand l’exécutif européen a effacé la procédure de sanction contre Rome.
Le commissaire français a souligné que la situation économique de l’Italie en décembre était différente. La croissance était censée atteindre 1,1 % cette année, mais n’a finalement atteint que 0,1 %, soit un point de moins que prévu. De plus, la décision prise à cette période était basée sur des prévisions et des plans budgétaires, alors qu’aujourd’hui il s’agit d’un verdict a posteriori, fondé sur l’exécution budgétaire de 2018, a expliqué le commissaire.
La Commission a soutenu sa décision avec de nombreux chiffres, et en premier lieu avec la dette publique croissante (censée dépasser 135 % du PIB l’année prochaine) et le déficit (3,5 % du PIB en 2020).
Pour Pierre Moscovici, reste à savoir si la procédure de déficit excessif pourrait contribuer à créer une marge de croissance et à assainir les finances publiques.
« Ma porte est ouverte », a-t-il ajouté, en déclarant aux journalistes qu’il était prêt à avoir une « discussion factuelle » avec le gouvernement populiste italien sur la manière d’éviter la procédure de sanction.
En pleine crise avec la France, le président du Conseil des ministres italien est intervenu à Strasbourg au Parlement européen durant une séance houleuse. Les principaux partis ont condamné l’attitude économique et politique de son gouvernement.
Doutes belges
L’Italie n’est pas le seul pays faisant l’objet d’un examen rigoureux. La Commission a également préparé des rapports sur la France, Chypre et la Belgique afin d’évaluer leurs efforts pour équilibrer leurs comptes publics.
Mais contrairement à l’Italie, la Commission a déclaré qu’elle n’avait pas trouvé suffisamment de raisons pour recommander une procédure de sanction contre l’un de ces pays.
La Belgique a été le cas le plus difficile à déterminer. Comme Moscovici l’a reconnu, le pays se trouve « à la limite ». Malgré le niveau élevé de la dette publique (102 % du PIB), le pays n’a pas fait d’effort structurel pour la réduire en 2018 et 2019.
Toutefois, la Commission n’a pas trouvé son analyse suffisamment concluante pour faire passer le pays à l’étape suivante de la procédure de sanction.
C’est la deuxième année consécutive que l’exécutif européen ne parvient pas à prendre de décision concernant la Belgique. Dans son rapport, l’institution blâme « les grandes incertitudes liées aux facteurs clés de la performance budgétaire en 2017 et 2018 », en particulier sur le caractère structurel de l’amélioration budgétaire. Si ces incertitudes sont prises en compte, l’écart significatif semble être « très faible », peut-on lire dans le rapport.
La bonne nouvelle pour la Belgique est que les partis nationaux luttent désormais pour forger une coalition suite à des élections nationales non concluantes le 26 mai dernier.
L’absence d’exécutif pourrait en effet limiter les dépenses publiques, comme cela a été le cas la dernière fois que le pays s’est retrouvé sans gouvernement pendant près de 20 mois.
Retard grec
Après avoir atteint ses objectifs budgétaires ces dernières années, le gouvernement de gauche mené par Alexis Tsipras a reçu de sérieux avertissements de la Commission à cause des dernières mesures anti-austérité annoncées à l’approche des élections anticipées du mois prochain.
Les dernières décisions de la Grèce ne vont pas « dans la bonne direction politique », a déclaré Valdis Dombrovskis. « Il est important de ne pas gâcher les efforts consentis ces dernières années », a-t-il ajouté, rappelant que la dette publique du pays s’élève actuellement à 180 % du PIB, dont l’essentiel est dû à ses partenaires européens.
Pierre Moscovici a également souligné les « retards » dans la mise en œuvre du programme « cash-for-reform » (« du liquide contre des réformes ») lancé en 2010.
La Grèce est sortie de son programme de sauvetage en août dernier. Mais les réductions d’impôts annoncées et les paiements pour les retraités ont mis à rude épreuve les relations entre Athènes et ses créanciers européens.
Valdis Dombrovskis a déclaré que le paquet proposé par Alexis Tsipras annulait une partie du programme de réforme et présentait un risque pour la concrétisation de l’objectif convenu d’un excédent primaire de 3,5 % du PIB pour cette année et au-delà.
Dans le cadre de la stratégie de sauvetage, la Grèce a convenu avec ses créanciers de la zone euro d’atteindre un excédent budgétaire primaire annuel de 3,5 % jusqu’en 2022.
Dépenses allemandes
Le mandat 2014-2019 de cette Commission européenne se termine comme il a commencé : avec un fort accent sur l’investissement. Alors que le principal problème en 2014 était le faible niveau d’investissement par rapport aux volumes d’avant la crise, la priorité est désormais la qualité des dépenses et un meilleur alignement entre réformes et investissements.
Afin de relever ces défis, la Commission a inclus pour la première fois des recommandations d’investissement dans son paquet économique.
L’Allemagne, comme toujours, représente un cas particulier. Selon la Commission, la hausse de l’excédent de l’Allemagne reflète « un niveau d’investissement intérieur faible par rapport à l’épargne dans les secteurs privé et public ».
Par conséquent, la recommandation numéro un pour la plus grande économie de la zone euro est d’accroître les investissements privés et publics, en particulier au niveau local et régional, dans des domaines tels que l’éducation, l’innovation, le haut débit, les transports durables et le logement.
Malgré une augmentation de l’investissement public l’an dernier (7,7 %), la Commission a souligné que le taux d’investissement restait inférieur à la moyenne de la zone euro. L’exécutif européen a ajouté qu’il restait un important arriéré d’investissements publics dans les infrastructures et l’éducation, et a déploré que l’Allemagne n’ait pas profité de conditions de financement favorables.
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