Le Smoot-Hawley Tariff Act de 1930, initiative du sénateur Reed Smoot et du représentant Willis C. Hawley, constitue la dernière grande période protectionniste des États-Unis avant les annonces de relèvement des droits de douane faites par Donald Trump le 2 avril dernier. En cas d’application de ces mesures, la taxation des importations américaines pourrait atteindre entre 22 % et 25 %. Même en cas de prolongation du moratoire de 90 jours, les droits de douane seraient néanmoins relevés en moyenne de 12,5 points. Avant 2019, les droits de douane aux États-Unis étaient inférieurs à 4 %. Le Smoot-Hawley Tariff Act avait, pour sa part, porté les droits de douane à 20 % en 1930. Par conséquent, cette mesure entraîna une réduction significative — de 15 % à 32 % — des importations américaines.
Dans les années 1930, il fallut quatre ans pour que les États-Unis changent de cap.
En réaction à cette hausse, 25 pays adoptèrent à leur tour des mesures de rétorsion, ce qui provoqua une baisse du commerce mondial et accentua une croissance déjà déprimée. En 1934, le président Franklin D. Roosevelt décida de faire marche arrière et opta pour une politique favorable au libre-échange.
Les différences structurelles entre l’économie américaine de 1930 et celle d’aujourd’hui sont importantes, ce qui laisse présager des effets différents de la hausse des droits de douane. Le taux de chômage était bien plus élevé lors de la crise de 1929 : 8 % en 1930, 16 % en 1931 et 23 % en 1932, contre environ 4 % depuis le début de l’année 2025. L’économie américaine de l’époque souffrait d’une insuffisance de la demande et d’une surcapacité de l’offre. Elle était entrée en récession après l’éclatement de la bulle boursière. En 2025, les États-Unis sont en situation de plein-emploi, ce qui complique la relocalisation d’emplois industriels. Par conséquent, l’effet positif des nouveaux droits de douane sur l’investissement devrait être limité, tandis que leur effet inflationniste pourrait être important. Celui-ci pourrait être renforcé par la politique anti-immigration du président.
Le poids des importations dans le PIB est aujourd’hui bien plus élevé qu’en 1930. En 1931, elles représentaient 6 % du PIB. Actuellement, les importations de biens dépassent 11 %. Mais si l’on inclut les services, ce taux est supérieur à 14 %.
En 2024, les importations des États-Unis se sont élevées à 3 296 milliards de dollars, dont une grande partie provient de pays à faibles coûts de production. De plus, les possibilités de substitution sont limitées et s’accompagnent généralement de hausses de prix.
En 1930, les principaux partenaires commerciaux des États-Unis étaient l’Europe, l’Asie, l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud, avec des coûts de production relativement proches.
Les entreprises des pays avancés ont organisé leur production en chaînes de valeur mondiales.
Depuis une trentaine d’années, les entreprises des pays avancés ont organisé leur production en chaînes de valeur mondiales. La production d’un bien est désormais segmentée entre plusieurs pays en fonction des coûts, de la main-d’œuvre et des ressources. Modifier ces chaînes suppose de détruire des capacités de production dans certains pays pour en créer dans d’autres — aux États-Unis en cas de relocalisation. C’est pourquoi cette transition s’accompagnera presque inévitablement de hausses de prix.
En 1930, l’économie américaine était en pleine déflation ; en 2025, la principale menace est l’inflation. La hausse des droits de douane décidée par Donald Trump aura des effets pervers. Comme ce fut le cas en 1930, mais selon des modalités différentes. Le principal risque en 2025 est l’inflation. Ces droits de douane risquent également d’entraîner un ralentissement de la croissance en pesant sur la consommation des ménages. Par effet de rétorsion, ils freineront aussi le commerce international et la croissance mondiale. Dans les années 1930, il fallut quatre ans pour que les États-Unis changent de cap. Combien en faudra-t-il dans les années 2020 ?
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