Le Mali en proie aux djihadistes

Le Mali en proie aux djihadistes

Depuis septembre, les combattants de la coalition jihadiste Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (Jnim) ont instauré un blocus sur les importations de carburant à destination du Mali. Les convois de camions-citernes sont pris pour cibles sur les routes, paralysant l’économie nationale et menaçant l’approvisionnement de la capitale, Bamako. Dans une publication en date du 7 novembre sur le site France Diplomatie, le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères invite les Français résidant au Mali à faire preuve de la plus grande vigilance et s’ils le peuvent de quitter temporairement le pays. A ce jour, aucune évacuation par les forces militaires est prévue. On fait le point pour les Français de l’étranger.

Le départ des forces françaises

L’actuelle détérioration du Mali est directement liée au vide sécuritaire laissé par le retrait des forces étrangères. Selon l’Atlantic Council, le pays « s’accroche à l’illusion d’une souveraineté militaire » après s’être coupé de ses alliés et plongé dans un isolement complet.

Lorsque le colonel Assimi Goïta a pris le pouvoir par la force en 2021, il avait promis la « refondation d’un Mali souverain et sécurisé ». Quatre ans plus tard, le constat est inverse : les lignes de front se sont multipliées, l’armée s’est fragmentée, et les groupes jihadistes contrôlent à nouveau de vastes portions du territoire.

Un millier de personnes se sont rassemblées place de L'Indépendance à Bamako, le 10 janvier 2020, pour protester contre la présence des forces françaises au Mali.
Un millier de personnes se sont rassemblées place de L'Indépendance à Bamako, le 10 janvier 2020, pour protester contre la présence des forces françaises au Mali. © Annie Risemberg. ©AFP

Le départ progressif de la France, amorcé en 2022 avec la fin de l’opération Barkhane, a marqué un tournant décisif. Pour l’Institut Montaigne, cette évacuation, survenue le 15 août 2022, a constitué « le changement le plus radical pour les groupes jihadistes, qui ont retrouvé une liberté d’action perdue depuis près de dix ans ».

Autrement dit, la présence française, bien qu’imparfaite, maintenait une pression constante sur les groupes armés. Son retrait a ouvert la voie à une reconquête lente mais méthodique des territoires ruraux par la Jnim et ses affiliés.

A Bamako, la peur a remplacé la routine

Les stations-service sont vides, les files s’étirent jusqu’au soir et les universités ont fermé. Depuis septembre, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaida, bloque les convois de carburant venus du Sénégal et de la Côte d’Ivoire.

Les djihadistes du GSIM justifient cette offensive par des « représailles » à une décision du gouvernement militaire : interdire la vente de carburant hors des stations officielles, dans l’espoir d’assécher leurs réseaux. L’effet inverse s’est produit. Les routes sont devenues des champs de bataille, les camions brûlent malgré les escortes militaires. À Kayes et Nioro-du-Sahel, aux frontières du Sénégal et de la Mauritanie, les villes vivent sous blocus.

Des personnes se rassemblent dans une station-service, alors que la pénurie de carburant causée par un blocus imposé début septembre par les djihadistes du JNIM se poursuit, à Bamako, au Mali, le 1er novembre 2025.
Des personnes se rassemblent dans une station-service, alors que la pénurie de carburant causée par un blocus imposé début septembre par les djihadistes du JNIM se poursuit, à Bamako, au Mali, le 1er novembre 2025. © REUTERS/STRINGER TPX IMAGES OF THE DAY

Pour les Français, plutôt de partir !

Si à ce jour, aucune opération d’évacuation éventuelle des ressortissants français n’est prévue, les services consulaires, de Paris à Bamako, martèlent un seul message « Partir ». Pourtant, les vols commerciaux comme les axes de circulation ne sont pas accessibles.

Actuellement, la présence du personnel diplomatique à l’ambassade de France est maintenue afin de pouvoir apporter toute assistance à nos compatriotes sur place. Aussi, à Paris, le Centre de crise et de soutien, au ministère des affaires étrangères, a activé une cellule dédiée. Celle-ci actualise en direct, en fonction de l’ensemble des informations qui remontent du terrain, la situation sécuritaire.

Mais dix ans après le début de l’intervention française, le Mali reste un laboratoire tragique des limites de la force armée. La présence de la France avait permis de contenir la menace sans la résoudre, et son départ a libéré des forces qu’elle maintenait à distance. Désormais, le Mali vit au rythme des attaques, des coupures d’énergie et des files interminables devant les stations-service. Le pays, jadis soutenu par la communauté internationale, se retrouve pris entre le feu jihadiste et la violence de ses nouveaux protecteurs russes comme chinois.

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