Un des enjeux du G7, comme l’avait annoncé lesfrancais.press, était l’accord surprise obtenu à la réunion préparatoire de Chantilly sur les projets de taxation des Gafas, projet soutenu par la France et notamment par Bruno Le Maire. Si le ministre américain du commerce, Steve Mnuchin, avait approuvé la volonté de trouver un accord au sein de l’OCDE pour appliquer une fiscalité minimale au multinationales de la sphère numérique, la réaction de Trump, furieux de la création d’une taxe Gafa en France, avait fait savoir qu’en retour, face à cette « mesure stupide », il taxerait les vins français.
Emoi et consternation chez les viticulteurs. Pourtant, la menace visait moins la France que ceux qui voulaient l’imiter, dont le Royaume-Uni, promu meilleur allié des Etats-Unis depuis la prise de pouvoir de Boris Johnson, et quelques autres pays européens qui pouvaient trembler des mesures de rétorsion américaines. On commence par le vin francais, on finit par les voitures allemandes. De quoi faire réfléchir ceux qui avaient soutenu Le Maire, en lui faisant comprendre qu’à l’impossible nul n’était tenu, et qu’ils étaient déjà allés bien loin avec lui.
Entre temps, Amazon avait fait savoir qu’il répercuterait la taxe sur les consommateurs français. Et les distributeurs se plaignaient. Vu l’ampleur des sujets à traiter au G7, on se disait que la position française serait vite lâchée.
Pourtant non. Macron a soutenu son ministre jusqu’au bout, jusqu’à convaincre Trump et trouver un accord avec lui. Les Européens n’ont pas lâché les Français; Macron a mis en valeur Trump durant le sommet ; le tandem Macron-Le Maire a eu l’habileté de plaider pour la doctrine américaine : une clause fiscale américaine (le Gilti, « Global Intangible low-taxed Income »)prévoit un niveau minimum d’imposition (10.5%) pour les bénéfices à l’étranger des entreprises américaines exemptés d’impôt dans leur pays d’adoption.
Pour démontrer que la taxe française ne visait pas les entreprises américaines mais un principe international de justice fiscale, Macron et Le Maire ont proposé que la France rembourse aux entreprises américaines le montant de la taxe française qui serait supérieur à celle qui serait décidée d’un commun accord dans le cadre de l’OCDE. Chacun proteste de sa bonne foi : Si la taxe française est trop élevée, les entreprises américaines auront un avantage puisqu’elles seront remboursées. Pas les autres. Comme ne sont concernées, pratiquement, que les entreprises chinoises et américaines, Trump y voit un avantage. Trump revient avec une faveur pour les entreprises américaines : Un as de la négociation. Et un brave gars, en plus.
Car ce remboursement suppose qu’un accord sera trouvé à l’OCDE. Si le principe en est acquis, ses modalités ne sont pas encore trouvées. On suspectait même les Américains d’avoir accepté la négociation pour la saboter de l’intérieur. L’engagement du Président américain suppose que les Etats-Unis ne bloqueront pas l’accord. D’ici là, la taxe française sera mise en œuvre. Comme, de l’aveu de Le Maire, elle n’avait pour but que de forcer à la négociation, la mission est plus que remplie. La taxe française reste, les vins sont épargnés, l’OCDE est encouragée. Le tandem Macron-Le Maire a fonctionné. Bien joué.
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