Le gouvernement s’arc-boute sur une réforme conseillée par l’exécutif européen, mais déjà édulcorée, et qui divise profondément en France. Les transports sont paralysés depuis près d’un mois.
Réformer, ou du moins prétendre le faire, notamment pour donner des gages à ses partenaires européens : c’est le pari dans lequel le chef de l’État français semble s’être engouffré. Et dont il peine à sortir.
La réforme des retraites est un point important des recommandations récurrentes de la Commission européenne à la France. L’été dernier, le conseil Ecofin, qui rassemble les ministres de l’UE, avait ainsi souligné le sujet, insistant sur le fait que la réforme pourrait contribuer à alléger la dette publique.
Un mois après le début d’une grève qui paralyse les transports, et une partie des services publics en France, le chef de l’État a réaffirmé lors de la présentation de ses vœux à la nation, le 31 décembre, son intention de mener à bien la réforme des retraites. Une déclaration vécue comme un durcissement du bras de fer par les syndicats.
Une réforme déjà assouplie
Contrairement aux apparences, le gouvernement a déjà lâché du lest dans sa tentative de réforme du régime des retraites. Durant divers épisodes de négociations qui se sont tenus en décembre, le gouvernement a déjà accepté de prolonger ou de conserver certains régimes spéciaux. Ainsi, les policiers ont obtenu un délai conséquent avant l’application du régime général, et conservent la possibilité de partir plus tôt en retraite ; ils réclament désormais les mêmes avantages que les gendarmes, qui eux sont assimilés aux militaires, et ont à ce titre un régime encore plus favorable.
Pour le personnel RATP et SNCF, qui affiche la plus forte mobilisation, le gouvernement a proposé de décaler de 10 ans la date d’application de la réforme, qui ne concernerait que les salariés nés après 1985, contre 1975 pour le commun des mortels.
Dans l’aérien, le personnel naviguant a aussi obtenu des concessions importantes, tout comme les danseurs de l’Opéra de Paris, qui ont actuellement la possibilité de partir en retraite à 42 ans.
Le projet d’un régime général et équitable des retraites prend déjà l’eau, ce qui semble donner des ailes aux syndicats. Le 1er janvier, le responsable du syndicat CGT Philippe Martinez a appelé à la grève générale pour conforter le mouvement. Un appel qui risque toutefois de rester lettre morte.
Pari sur l’essoufflement financier des grévistes
Si le mouvement se poursuit depuis le 5 décembre, soit près d’un mois, et que les Français ont tendance à sympathiser avec les grévistes puisque 51 % d’entre eux les soutenaient fin décembre, le gouvernement parie sur son essouflement.
En effet, la plupart des grévistes ont touché un 13ième mois ou une prime de fin d’année en décembre. Mais un mois de janvier entier sans salaires risque d’être impossible à gérer pour nombre d’entre eux. Ce qui explique que le taux de grévistes ait chuté de 55 % à 8 % à la SNCF depuis le début de la grève. Et les cagnottes organisées par les syndicats sont très modestes par rapport aux besoins.
Risque de décrédibilisation ?
Le gouvernement français pourrait finir par avoir les grévistes à l’usure, mais sans convaincre et sans que les revendications n’aient semblé avoir été entendues. Ce qui serait un signe politique négatif : la décrédibilisation d’Emmanuel Macron à 2 ans des élections présidentielles n’est pas faite pour rassurer les voisins européens, alors que le Rassemblement national, plutôt discret depuis le début de la grève, se tient en embuscade. Et alors que le scepticisme à son égard au niveau international va croissant.
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