Le drapeau européen divise l’Assemblée, avec les élections en toile de fond

Le drapeau européen divise l’Assemblée, avec les élections en toile de fond

Faut-il rendre obligatoires les drapeaux français et européen sur la façade des mairies ? L’examen à l’Assemblée de la mesure proposée par les députés macronistes a viré mardi (9 mai) au débat pour ou contre l’UE, à un an des élections européennes.

La proposition de loi, portée par le groupe Renaissance, a été volontairement inscrite à l’agenda le jour de l’anniversaire de la déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950, considérée comme un texte fondateur de la construction européenne.

Mais elle est loin d’avoir soulevé l’enthousiasme au Palais Bourbon, où elle a fait face aux critiques des oppositions, et aux réticences de certains députés de la majorité, notamment au Modem, dubitatifs sur l’intérêt du texte dans le contexte politique actuel.

La motion « de rejet préalable », déposée par LFI et soutenue par les communistes et le RN, a toutefois été rejetée en soirée, avant que le texte n’échappe de peu à des amendements de suppression de son article unique (160 voix contre 169).

Les députés n’ont ensuite pas réussi à achever avant minuit son examen, qui a du reprendre ce mercredi 10 mai.

« Rêve de Frexit »

« Le vote qui sera fait tout à l’heure sera un vote en faveur ou en défaveur de la construction européenne, ni plus, ni moins », a lancé le rapporteur de la proposition de loi, le député macroniste Mathieu Lefèvre, assumant sa portée « symbolique ».

« Ceux qui ont du mal à masquer leur malaise devant le drapeau étoilé ont tout autant de mal à masquer leurs rêves de Frexit déguisé, rouge pour les uns et brun pour les autres », a-t-il poursuivi, ciblant les insoumis et les députés RN.

La secrétaire d’Etat chargée de l’Europe, Laurence Boone, a renchéri dans le même registre: « Je vous mets en garde sur ce que représentent les positions des deux extrêmes de cet hémicycle », a-t-elle lancé, évoquant « un danger pour le projet européen ».

Les députés insoumis ont répliqué en raillant comme les communistes « la tentative de diversion » du camp présidentiel avec une mesure « sans aucune utilité pratique ».

« La manière dont vous envisagez d’imposer la belle idée de l’internationalisme avec ce qu’est en train de devenir la construction libérale de l’Europe va faire détester l’Europe », a tonné le député LFI Alexis Corbière.

Côté RN, le député Jean-Philippe Tanguy a lancé une attaque frontale contre le drapeau étoilé, qui ne porte selon lui « aucun symbole ». « Il n’y a que trois couleurs face auxquelles les Français s’inclinent », a-t-il jugé, « le bleu, le blanc et le rouge ».

A droite, le député LR Philippe Gosselin a fustigé un débat « clivant » et « binaire », qui « crée de la discorde ». Son groupe a proposé de ne rendre obligatoire que le drapeau français.

Le député Modem Erwan Balanant a lui assumé les doutes initiaux de son groupe sur ce texte jugé « pas utile », des hésitations qui ont créé des frictions dans le camp présidentiel. Mais il a estimé que le débat avait finalement eu le mérite de montrer « la haine de l’Europe du RN » et les « arguties » de LFI.

Comme pris en étau, c’est au nom de leur engagement pro-européen qu’écologistes et socialistes ont annoncé qu’ils voteraient en faveur du texte de Renaissance. Tout en déplorant une initiative « opportuniste », selon la députée PS Christine Pires-Beaune, et « pas loin d’un texte politicien » pour l’écologiste Jérémie Iordanoff.

Européennes à l’horizon

Ce débat sur les drapeaux a remis au jour les divergences au sein de la Nupes sur la question européenne, à un an des élections européennes.

A gauche, l’eurodéputée LFI Manon Aubry a suscité la polémique lundi (8 mai) en présentant le drapeau européen comme « une forfaiture démocratique », en allusion au référendum de 2005 sur la Constitution européenne, rejetée par le peuple, mais dont la substance a été ensuite approuvée par l’Assemblée nationale.

Partisane d’un accord pour une liste unique des partis de gauche aux européennes comme lors des législatives de l’an dernier, elle a été attaquée par ses alliés.

« Non, l’Europe n’est ni LE problème, ni une forfaiture! », s’est emporté sur Twitter l’eurodéputé écologiste Yannick Jadot, dont le parti tient à présenter sa propre liste.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a lui estimé dans une tribune que l’ »Europe n’est pas par essence libérale, elle est un espace toujours en construction ». Ajoutant qu’il faut oeuvrer pour y « changer de paradigmes » sans « refuser les compromis ».

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