En 2021, pour la deuxième année consécutive, le déficit de la France dépassera les 9 % du PIB. Le Ministère de l’Economie estime que les dépenses publiques, hors covid, augmenteraient de 1,5 % l’année prochaine, ce qui augure mal de l’engagement d’une politique d’assainissement du budget. Le calendrier électoral ne devrait pas la faciliter. Dans ces conditions, la dette publique devrait poursuivre sa progression au-delà des 120 % du PIB. Est-ce mortifère ?
Taux d’intérêt et taux de croissance
Pour le moment, tout semble sous contrôle. Les taux d’intérêt restent plus que modérés, inférieurs à 0,2 %, et la croissance s’épanouit. Au nom des fameux critères de Maastricht, le niveau maximal supportable pour la dette avait été fixé à 60 % du PIB. Quand cette barre fut franchie, rien ne se produisit. Symboliquement, il était alors conseillé de ne pas dépasser les 100 % du PIB. Plusieurs pays avaient (manque un verbe ou un mot) avant même la crise sanitaire sans que cela n’entraîne de cataclysme. En soi, comparer l’endettement au PIB n’est pas opportun sur un plan comptable. La dette est un passif quand le second est un flux de créations de richesses. Il faudrait comme pour les acteurs privés prendre en considération l’endettement net pour les Etats et apprécier le poids du service de la dette, c’est-à-dire le montant des intérêts à payer au PIB.
La soutenabilité de la dette dépend donc du niveau des taux et de la croissance de l’économie. Des taux bas comme la France en connaît depuis une dizaine d’années permettent un accroissement de l’endettement. En revanche, l’affaiblissement de la croissance joue en sens inverse.
La dette finance les dépenses courantes
L’autre point clef à prendre en compte est l’efficience des dépenses publiques financées par l’emprunt. Si elles génèrent un surcroit de croissance, elles peuvent être qualifiées de productives. C’est au nom de cette règle que les collectivités locales ne peuvent s’endetter que pour investir. Certes, tout investissement n’est pas un gage de future croissance mais cela limite les risques de dérive budgétaire. Les dépenses en faveur de l’éducation ou de la recherche peuvent être classées dans la catégorie de celles pouvant donner lieu à endettement. Malheureusement, en France comme dans bien des pays occidentaux, les pouvoirs publics ont recours à l’endettement pour financer des dépenses courantes. Les prochaines générations seront ainsi amenées à prendre en charge les dépenses de leurs ainés. Les partisans de la dette publique font le pari que les taux resteront bas sur très longue période. Les banques centrales ne pourraient plus les remonter, faute de quoi elles entraîneraient une crise financière. Le poids croissant de la dette lierait leurs mains au point qu’elles en perdraient leur indépendance.
Les monnaies ne sont pas des îles
L’interventionnisme des banques centrales n’est pas sans limite. Au sein d’une économie mondialisée, les devises ne sont pas des iles. Leur valeur dépend du sérieux des politiques monétaires et budgétaires ainsi que de la force économique du ou des pays sur lesquels elles ont cours légal. Un excès d’endettement improductif serait sanctionné à un moment ou un autre par les investisseurs qui réclameraient comme en 2012 à la Grèce des taux d’intérêt prohibitifs. Même si aujourd’hui les anciennes lois économiques concernant l’inflation, le chômage, les taux d’intérêt sont en suspension, il est dangereux de croire qu’elles seraient devenues totalement inopérantes. A un moment ou un autre, dans un monde aux ressources rares, les critères d’efficacité, de retour sur investissement, de création de richesses reviendront au cœur de la bataille sauf à vouloir imposer un nouveau code de valeurs.
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