Après l’Assemblée nationale, le Sénat a adopté une résolution reconnaissant la famine de l’Holodomor comme un génocide, provoquant l’indignation de l’Ambassade de Russie en France, qui accuse le Parlement français de « réécrire l’Histoire ».
La résolution a été adoptée par les sénateurs la semaine dernière, mercredi 17 mai, à une très large majorité.
Le texte, porté par la majorité sénatoriale (droite) reconnaît que « entre 1932 et 1933, le régime soviétique a organisé méthodiquement l’ ’’extermination par la faim” — ou Holodomor, selon l’expression ukrainienne — de plusieurs millions d’Ukrainiens ». Elle fut portée à l’Assemblée nationale par la députée des Français de l’étranger de la XIème circonscription des Français de l’étranger, Anne Genetet.
Les élus communistes et un de centre droit ont été les seuls à voter « contre » le texte, tandis que le seul sénateur rattaché à l’extrême droite (Reconquête et ex-Rassemblement national) n’a pas pris part au vote.
L’adoption de la résolution n’a pas manqué de susciter la colère de la Russie, par la voix de son ambassade en France. Elle a dénoncé jeudi (18 mai) la volonté du parlement français de « réécrire l’Histoire et instrumentaliser les événements du passé à des perfides fins politiques ». Fin mars, les députés français ont également adopté une résolution qualifiant l’Holodomor de génocide.
Comme pour prévenir les autres institutions qui entendraient prendre une initiative comparable, « les spéculations politiques au sujet de l’“Holodomor” au profit du régime de Kiev ne font que cautionner sa politique de nature ultranationaliste et néo-nazie », conclut l’ambassade russe en France.
Un génocide récusé par la diplomatie russe
Pour récuser l’accusation d’un génocide perpétré en Ukraine, la diplomatie russe rappelle que les famines des années 1932-1933 ont touché plusieurs autres zones de l’URSS, comme le Caucase du Nord, la Volga, le Kazakhstan. Or, dans le cas de l’Ukraine, ces famines ont été intentionnellement aggravées par le pouvoir soviétique — sur initiative de Joseph Staline — car la zone était entrée en résistance à sa politique.
Ainsi, la « famine organisée avait pour objectifs la négation de l’identité ukrainienne et la disparition de la nation ukrainienne », peut-on lire dans la résolution.
Le texte condamne également « la déportation de centaines de milliers d’enfants ukrainiens en Russie afin de les russifier » pendant l’Holodomor.
Enfin, la chambre haute française déplore que, « malgré une reconnaissance officielle de cette tragédie après la chute de l’URSS en 1991, les autorités russes actuelles réfutent désormais l’existence même de l’Holodomor ».
Par ce vote, le Sénat invite donc le gouvernement à reconnaître l’ensemble de ces faits comme étant un génocide.
Même si les résolutions n’ont pas de valeur juridique contraignante, leur portée est avant tout symbolique — comme la réaction russe en témoigne.
Les Ukrainiens ont, quant à eux, fait part de leur reconnaissance envers les parlementaires français. Dans un tweet, leur président Volodymyr Zelensky s’est réjoui d’une « étape importante vers la restauration de la justice historique et la perpétuation de la mémoire de millions d’Ukrainiens morts de faim ».
L’adoption de cette résolution s’inscrit dans un double mouvement plus large. D’une part, en Europe, plusieurs autres institutions parlementaires ont voté un texte semblable, à l’image de la Chambre des députés du Parlement tchèque, du Sénat irlandais, du Bundestag allemand, et de l’Assemblée nationale française.
D’autre part, en France, plusieurs résolutions en lien avec la guerre en Ukraine ont été adoptées ou doivent être discutées dans les mois à venir. Le parlement français a notamment appelé l’UE à qualifier le groupe Wagner d’organisation terroriste, et a dénoncé la déportation d’enfants ukrainiens en Russie.
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