La police londonienne fait son mea-culpa

La police londonienne fait son mea-culpa

Souvenez-vous, il y a un an, un éditeur français, Ernest Moret, fut arrêté à Londres pour terrorisme. Cette semaine, il s’est vu accorder des dommages et intérêts « substantiels » par la police londonienne (Metropolitain police), alors que de nouveaux chiffres révèlent que des milliers de ressortissants étrangers ont été arrêtés dans les ports britanniques en vertu des lois antiterroristes. Pour les Français de l’étranger, on revient sur cet imbroglio qui a conduit notre compatriote en prison.

Arrêté sur le chemin du Salon du Livre 

Ernest Moret, 29 ans, responsable des droits étrangers aux Éditions la Fabrique, a été arrêté à la gare de St Pancras en avril 2023 alors qu’il se rendait au salon du livre de Londres.

Il a été détenu en vertu de l’article 7 de la loi antiterroriste de 2000 et interrogé par des agents antiterroristes pour savoir s’il avait participé à des manifestations antigouvernementales en France et s’il soutenait le président français Emmanuel Macron.

La maison d’édition La Fabrique via un communiqué a déclaré: “Il y a un peu plus d’un an, Ernest notre responsable des droits étrangers était arrêté sur le quai de la gare de Londres par la police antiterroriste britannique alors qu’il se rendait à la Foire du livre qui s’y tient tous les ans. Relâché après près de 24 heures de garde à vue, toutes les poursuites à son encontre avaient finalement été abandonnées, un rapporteur officiel britannique établissait que cette arrestation en vertu d’une législation antiterroriste était injustifiée. Nous venons d’apprendre que suite aux démarches engagées par son avocat, Richard Parry, la Metropolitan Police s’engage à verser à Ernest des dommages et intérêts pour « abus de pouvoir ».”

Comme le souligne Richard Parry dans son communiqué (ci-joint), l’écho donné à cette arrestation et l’élan d’indignation et de solidarité qu’elle avait suscité ne sont pas pour rien dans cet épilogue heureux.

“Dans un moment où la liberté d’expression, de certaines organisations, de mouvements sociaux ou d’intellectuels, est menacée, il nous rappelle que la mobilisation collective paie : justice est faite ! Gageons que cette dispendieuse reculade des autorités britanniques saura refroidir les embastilleurs de toute espèce. C’est l’occasion pour nous de remercier toutes celles et ceux qui nous ont témoigné leur soutien dans cette affaire et nous ont permis de garder le cap sous l’orage..”

Richard Parry 
Manifestation en France de soutien à Ernest Moret en avril 2023 ©AFP

Un “emprisonnement abusif”

Ernest Moret et son avocat, Richard Parry de Saunders Solicitors, ont intenté une action pour faute dans l’exercice d’une fonction publique et emprisonnement abusif. Pour régler le litige sans recours à un procès, le Met a désormais accepté de verser à M. Moret une somme à cinq chiffres plus ses frais d’avocat. M. Parry a également écrit au commissaire du Met, Mark Rowley, pour exiger des excuses pour Ernest Moret.

Cette décision fait suite à une enquête menée par l’examinateur indépendant de la législation antiterroriste, Jonathan Hall KC, qui a déclaré que le traitement réservé à Moret par le Met était « exagéré et autoritaire ». Hall a déclaré que la police ne devrait pas utiliser ses pouvoirs antiterroristes pour assurer l’ordre public. « Les droits à la liberté d’expression et de protestation sont trop importants dans une démocratie pour permettre à des individus de faire l’objet d’une enquête pour terrorisme potentiel simplement parce qu’ils ont pu être impliqués dans des manifestations qui ont tourné à la violence », indique le rapport de Hall.

Richard Parry a, lui, précisé dans les médias : « À notre avis, l’arrestation n’était ni nécessaire ni proportionnée. Une fois la compensation financière réglée, il est désormais temps que la Metropolitain police présente des excuses complètes

Ernest Moret était l’un des 4 525 ressortissants étrangers arrêtés dans les ports britanniques de 2020 à 2023, en vertu de l’annexe 7 de la loi sur le terrorisme de 2000, selon les journaux quotidiens publiés en vertu des lois sur la liberté d’information.

Parmi eux, 1 432 citoyens appartenaient aux alliés du Royaume-Uni dans les États membres de l’UE, dont 334 Irlandais, 192 Néerlandais, 175 Français, 99 Suédois et 94 Allemands.

Un accord sous le sceau du secret 

Le Met a confirmé que la force avait conclu un accord avec Ernest Moret, dont les détails étaient confidentiels.

Dans un communiqué, le Met a ajouté : « Nous avons pleinement coopéré à un examen des circonstances de cette affaire, qui a été réalisé par Jonathan Hall KC, et suite à la publication du rapport, nous avons également volontairement soumis l’affaire au Bureau indépendant de Conduite de la police (FIPOL). L’IOPC a ensuite ordonné à la police du Met de mener une enquête locale et celle-ci est toujours en cours à l’heure actuelle. »

« L’Annexe 7 est un pouvoir important dans la protection des frontières du Royaume-Uni et reste un outil essentiel dans nos efforts pour contrer la menace terroriste et assurer la sécurité du public. Nous restons pleinement déterminés à garantir que nous utilisons ces pouvoirs de manière proportionnée et responsable. »

FIPOL

Pourtant, depuis le Brexit, les arrestations de Français se sont multipliées à la frontière, des filles au pair, des étudiants, etc., accusés de venir travailler clandestinement au Royaume-Uni, loin de l’objet officiel de la fameuse Annexe 7. 

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