Barack Obama a gagné le prix Nobel de la paix,pour les commentateurs Donald Trump auraitgagné le bonnet d’âne. Peut-être est-ce moins simple : Ils ne méritent ni l’un ni l’autre dedistinction, chacun, à sa façon, allant d’échec en échec. Que signifie le plan Trump ?
Se rappeler sans cesse la première règle de la diplomatie : Toute décision de politique étrangère trouve sa raison en politique intérieure. Un Président gêné par une procédure de destitution au Sénat et un Premier ministre triplement inculpé se sont épaulés, tous deux en campagne, pour présenter un plan de paix reçu comme une déclaration de guerre par les Palestiniens.
La première règle de la diplomatie, la politique intérieure.
Les réactions à ce plan s’expliquent de la même façon. Si la Ligue arabe rejette le plan, les Etats qui la composent saluent les « efforts américains ». Tous sont pris dans des guerres civiles qui ont de plus en plus besoin de l’appui américain et de moins en moins de la cause palestinienne. Seule la Jordanie, sous assistance, le rejette sans ménagement : l’annexion de la vallée du Jourdain la touche directement, sa population est majoritairement palestinienne. Quand aux Européens, ils savent que ce plan n’a aucun avenir. Autant rester poli. La cause palestinienne garde quelques adeptes dans les rédactions et les mouvements de gauche. Mais le Hamas, la corruption, et le soutien à Assad l’ont sapé aux yeux des autres.
Aussi, certaines voix se font entendre pour dire aux Palestiniens : « Prenez ce qu’on vous donne, puisqu’à chaque décennie on vous propose de moins en moins ». Changement : Jusqu’à présent on leur disait: « Refusez, vous aurez plus demain ».
Tout n’est que paradoxe. Ce qui était faux hier peut devenir vrai aujourd’hui, ce qui est gain aujourd’hui, une perte demain.
Le plan Trump serait celui de la droite israélienne ? La voilà piégée. Trump reprend ses propositions, mais accepte un Etat palestinien.D’où le refus d’une frange de la droite, qui rêve du grand Israël et de l’annexion complète de la Cisjordanie. Benny Gantz est le seul qui approuvé dans sa totalité le plan, pour gêner Netanyahou. Toujours la politique intérieure.
Piège pour Israël
Serait-ce le plan de l’Etat-major ? S’il était appliqué, ce serait un danger pour Israël : en faisant de l’Etat palestinien un pays sous tutelle, morcelé, à la souveraineté limité, aux communications contrôlées, il obligerait Israël à en assurer l’ordre, le développement, la sécurité(désarmer le Hamas disent-ils !) avec une population palestinienne pauvre, jeune, croissante. C’est pourquoi l’Etat-major israélien, cachant sa joie, freine les désirs d’annexion de Netanyahou. Comment contrôler cette population et ces territoires ? Israël n’en a pas les moyens militaires, financiers, culturels, humains.
Les Palestiniens vont donc refuser. Ils font même pire : ils coupent le dialogue. Y compris au niveau de la sécurité. Ils ont tort : quelle est « leur » contre-proposition ? Pourquoi ne pas répondre avec le plan du roi Abdallah, approuvé par tous les Etats arabes, ce qui gênerait le Prince Ben Salmane et les Américains? L’attitude de Mahmoud Abbas n’est pas guidée par la paix,mais par la rivalité avec le Hamas et le Djihad islamique.
Le monde musulman en décomposition
Constat tragique : Le monde musulman est endécomposition. Les derniers soutiens des Palestiniens ne sont pas arabes mais perses et turcs. Comme le dit un éditorialiste saoudien, si Israël occupe une capitale arabe, les Iraniens en occupent quatre : Bagdad, Sanaa, Beyrouth et Damas. Et pourtant l’Iran est en révolte et en ruine. Comme Beyrouth. L’Irak se reconstruit en désordre. La Syrie est détruite. Le Yémen est en guerre civile. Comme la Lybie. Une main de fer retient l’Egypte. La jeunesse du Maghreb désespère. De la Mauritanie au Soudan, le Sahelenflamme Musulmans contre Musulmans.
Ceux qui craignaient un affrontement entre le monde musulman et l’Occident devraient réviser leurs craintes et prédictions. L’Islam n’est pas une menace, mais une impasse. Et l’islamisme n’est pas une arme expansionniste mais un désastre suicidaire. Les populations de ces pays vivent un appauvrissement matériel, moral, culturel, psychologique,de longue durée. Tout comme leurs élites devenues logiquement paranoïaques (elles sont menacées) et schizophrènes (elles bravent les interdits en cachette).
Les Palestiniens devraient s’atteler à faire despropositions, si quelqu’un les écoute encore. Sinon leurs enfants connaitront toujours plus de violence et de misère.
L’islamisme, un désastre pour les Musulmans.
Quant aux Israéliens, ils devraient réfléchir. Les Américains, après Trump se seront lassés d’Israël. Le consensus politique américain pro israélien se brise. On le voit avec les Démocrates. Trump ne sera pas toujours Président. « Un jour vint un Pharaon qui ne connaissait pas Joseph ».
Le plan Trump signifie que les Etats-Unis se désengagent. C’est un plan de retrait, qui confie à Israël la garde du Moyen-Orient. Drôle de cadeau à bien y regarder. Les Américains, malgré des milliards de dollars, ont perdu l’Iran, l’Irak, le Yémen, le Liban, et sont en train de perdre la Turquie. Et les Israéliens pensent que le temps joue pour eux ?
La violence, la misère, la guerre entrainentIsraël. Israël tient ainsi depuis des années et des années. Le temps passe. Mais Israël n’a rien gagné. Israël a laissé Gaza et la Cisjordanie parce qu’elle ne pouvait pas les garder. Israël a perdu tout poids au Liban. Aujourd’hui, les opérations militaires israéliennes contre l’Iran sont continues parce que l’Iran est à ses frontières. Les Palestiniens vaincus, Israël est-il plus en sécurité ?
La société israélienne aussi se fracture : entre Tel-Aviv et les habitants des colonies, un mur invisible est en train de se construire. Pour la première fois, les partis religieux sont contestés. Trois élections en un an. Si vous n’êtes pas d’accord entre vous, comment pourriez-vousl’être avec les autres? Avec les Arabes israéliens ? Avec vos voisins ?
Réveil post hypnotique
Je m’étais abstenu d’une rencontre avec Yasser Arafat. Shimon Peres me vit le lendemain. Il me dit : « Je vous comprends mais avec qui ferais-je la paix si ce n’est avec mon ennemi ? » Peut-on faire la paix sans son ennemi ? Begin, Peres, Sharon osèrent. C’est quand on est fort qu’on peut faire la paix. Une victoire n’est durable que si elle est acceptée par l’adversaire.
Au mieux, pour Israël et les Palestiniens, le plan de paix trumpien pourrait servir de un geste hypnotique ericksonien, une fracture zen d’éveil bouddhique. Mais après, il faut se réveiller.
Les Palestiniens ont perdu la guerre. Israël devrait en profiter pour proposer la paix. Directement. Sérieusement.
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