Lors de son premier discours officiel, la nouvelle Directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a souligné les craintes que lui inspirait la conjoncture économique. Elle a ainsi souligné que si la croissance s’accélérait dans environ 75 % des pays, il y a deux ans, elle ralentit aujourd’hui dans 90 % des pays. À ses yeux, « l’économie mondiale est maintenant en phase de ralentissement synchronisé ». Elle a avoué que la situation n’était pas simple à décrypter. Aux États-Unis et en Allemagne, le chômage est au plus bas mais l’activité économique s’essouffle. Dans certains des plus grands pays émergents, comme l’Inde et le Brésil, le ralentissement est très marqué. En Chine, la croissance s’éloigne progressivement des sommets atteints pendant de nombreuses années.
Ralentissement général
La Directrice générale du FMI a néanmoins indiqué que malgré ce ralentissement global, près de 40 pays émergents ou en développement (dont 19 pays d’Afrique subsaharienne) devraient enregistrer une croissance du PIB réel supérieure à 5 %.
Sans surprise, elle a mentionné la stagnation du commerce mondial parmi les menaces les plus importantes. Pour le FMI, les tensions commerciales sont en partie responsables du net repli de l’activité manufacturière et de l’investissement dans le monde. Les services et la consommation pourraient être contaminés par ces tensions. Que ce soit par le jeu des interdépendance renforcées par la mondialisation ou par les variations de change, de nombreux pays seront touchés dans les prochains mois. À ces facteurs d’ordre économiques s’ajoutent des tensions politiques et géopolitiques. Le Brexit pourrait renforcer les forces récessives en Europe en cas d’absence d’accord d’ici le 31 octobre.
Mur numérique
Le FMI souligne que l’économie mondiale est menacée par des ruptures ou des fractures de première importance pouvant avoir des effets durant au moins une génération. Les décisions en matière commerciale peuvent remettre en cause le développement de certains pays émergents et en voie de développement.
La Banque mondiale dans son dernier rapport indique que le retour du protectionnisme pourrait générer un brutal retour en arrière. L’instauration d’un mur numérique entre l’Occident et l’Orient, obligeant les États à choisir leurs technologies et leurs fournisseurs d’accès, serait préjudiciable à la croissance.
Tous les Etats perdraient lors d’une guerre
Pour le FMI, en cas d’accentuation de la guerre commerciale, tous les États seront perdants. Pour l’économie mondiale, l’effet cumulé des différends commerciaux pourrait représenter une perte d’environ 700 milliards de dollars d’ici 2020, soit près de 0,8 % du PIB, soit l’équivalent de la taille de l’économie suisse.
En lieu et place de la fermeture des frontières commerciales, le FMI appelle à une remise à plat des pratiques commerciales, des subventions, des droits de propriété intellectuelle et des transferts de technologies. Selon l’organisation internationale, les États devraient, venir en aide aux populations touchées par les dislocations liées aux changements technologiques et au commerce.
Les effets négatifs des taux bas
Le FMI réclame une plus grande coordination des politiques monétaires afin de favoriser la croissance et la stabilité financière. L’institution reconnait que la persistance de taux bas s’accompagne également d’effets secondaires négatifs et de conséquences indésirables. La Directrice générale a notamment souligné les risques que cette politique faisait porter aux fonds de pension et aux compagnies d’assurance vie. Le FMI note la montée des risques financiers, nécessitant une surveillance accrue de la part des régulateurs. Dans certains pays, profitant de la faiblesse des taux, les entreprises s’endettent pour financer des fusions et acquisitions au lieu d’investir.
La relance pour ceux qui peuvent
La dette des entreprises à risque de défaut de paiement augmenterait à 19 000 milliards de dollars, soit environ 40 % de la dette totale de huit grandes économies. Cette situation est sans précédent. Par ailleurs, le bas niveau des taux d’intérêt incite aussi les investisseurs à rechercher des rendements plus élevés dans les pays émergents, ce qui expose beaucoup de pays de plus petite taille à une inversion soudaine des flux de capitaux.
Pour éviter la constitution de bulle, le FMI demande aux pays disposant d’une marge de manœuvre budgétaire d’engager des plans de relance. Dans des pays comme l’Allemagne, la Corée du Sud et les Pays-Bas, une augmentation des dépenses, particulièrement pour les infrastructures et la recherche-développement, contribuerait à stimuler la demande et le potentiel de croissance. En revanche, le FMI indique que dans les pays où le ratio dette/PIB est élevé, la rigueur budgétaire reste de mise. Un investissement de 800 milliards de dollars dans le monde au cours des dix prochaines années pourrait générer un bénéfice net total de 7 100 milliards de dollars.
Le FMI pour la taxe carbone
Sur la transition énergétique, la Directrice générale a pris fait et cause en faveur de la taxe carbone. Elle doit être d’un niveau suffisant pour avoir des effets. Elle a mis à l’honneur la Suède qui a adopté une taxe carbone en 1995. Dans ce pays, les ménages à revenu faible ou moyen ont bénéficié de transferts plus élevés et de baisses d’impôts en compensation de la hausse des coûts de l’énergie. Ce virage a contribué à réduire les émissions de carbone de la Suède de 25 % depuis 1995, tandis que sa croissance du PIB a été de75 %.
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