Plus d’un million d’euros d’argent européen n’ont pas été utilisés par la France pour s’occuper de l’accueil des réfugiés sur le territoire, apprend-on dans le Journal officiel.
Voilà de l’argent dont les réfugiés ne verront pas la couleur. La France va rendre à l’Union européenne 1,12 million d’euros de crédits non utilisés sur le programme Fonds européen pour les réfugiés, selon un décret paru vendredi 14 décembre, et relayé par le journaliste Pierre Januel sur Twitter.
Selon le Journal officiel, des crédits prévus pour la Mission Immigration, asile et intégration pour un montant de 1 124 013 € en autorisations d’engagement (Æ) en crédits de paiement (CP) sont restitués à l’Union européenne sur le programme Fonds européen pour les réfugiés et la Caisse des Dépôts et consignation sur le programme investissement d’avenir. La raison : ces crédits n’ont pas été utilisés.
Il s’agit d’un montant qui concerne les années 2012-2013 du cadre financier de ce programme qui s’étalait de 2007 à 2013. Ce chiffre ne représente qu’une petite part de l’argent distribué pendant ces deux ans, 22,3 millions d’euros en tout. Ces crédits non utilisés ne sont pas perdus totalement puisque le montant sera réintégré au budget européen ou reporté dans le Fonds Asile Migration et Intégration (FAMI). Mais cet argent non utilisé, alors que les besoins sur le terrain sont importants, passe mal dans le monde associatif.
L’État a trop complexifié les appels d’offres
Pierre Henry, directeur général de l’association France terre d’asile n’est pas étonné par cette situation, même s’il la déplore évidemment. Selon lui, le principal responsable est à chercher du côté de l’État. Car ces fonds européens sont délégués à la France par l’Union européenne. C’est ensuite le ministère de l’Intérieur qui va donner ces fonds aux associations sur le terrain après des appels d’offres. Or, l’État multiplie les contrôles très tatillons pour se couvrir par rapport à Bruxelles, explique Pierre Henry.
Les associations ne veulent plus passer leur temps à répondre à des contrôles répétitifs et chronophages plutôt que de mener des actions sur le terrain auprès de ces populations qui ont besoin d’elles, regrette-t-il. S’il rappelle qu’il est normal de justifier l’emploi de l’argent public, il est anormal de devoir passer son temps à préparer des comptes qui vont être certifiés par des cabinets privés très onéreux. Un aspect que France terre d’asile connaît bien puisque cette association a reçu 1 518 millions d’euros par ce fonds.
Un fonds créé en 2000
Le Fonds européen pour les réfugiés (FER) a été créé en 2000. L’objectif était de regrouper dans un seul instrument les actions en matière d’intégration des réfugiés et d’accueil des demandeurs d’asile », selon le site du ministère de l’Intérieur.
Les actions éligibles à ce financement du FER rentrent notamment dans les domaines suivants : accompagnement et amélioration de l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés (projets d’accueil et d’intégration). Par ailleurs, ce fonds prévoit une réserve financière destinée à soutenir la mise en œuvre de mesures d’urgence visant à fournir une protection temporaire en cas d’afflux massif de réfugiés, ou à soutenir des États membres faisant face à une pression particulière provoquée par l’afflux soudain d’un grand nombre de réfugiés.
Ce fonds a été remplacé en 2014 depuis par le « FAMI » (Fonds Asile Migration et Intégration).
120 000 réfugiés en 2019
Les flux migratoires ont largement baissé depuis 2015, au plus fort de la crise. Mais les États européens ne sont toujours pas parvenus à s’entendre sur une répartition équitable des migrants. Pas plus qu’ils n’ont réussi à réformer le système d’asile, observe pour Ouest-France le chercheur Yves Pascouau, spécialiste des migrations et directeur des programmes Europe de l’association Respublica.
Selon des chiffres officiels présentés par le UNCHR et l’IOM, le nombre de migrants arrivés dans l’UE en 2019 étaient d’un peu moins de 120 000 personnes. La grosse crise est terminée, les arrivées ont dégringolé. Mais rien n’est réglé. Progressivement, la politique de maîtrise des flux migratoires a pris le dessus sur la politique d’asile
, estime Yves Pascouau.