Vu de France, tout incite les Français à la sinistrose. Une réforme des retraites qui a mis le pays en ébullition, alors même que les Français figurent parmi les champions mondiaux en matière de temps moyen passé en retraite. Les violences urbaines du printemps vont laisser une facture d’au moins un milliard d’euros. Pour la première fois, la dette publique française a dépassé les 3 000 milliards d’euros. Mais, en cette période d’autoflagellation nationale, il n’est pas inutile de consulter la presse étrangère pour se remonter le moral.
La croissance la plus importante d’Europe
The Economist a ainsi consacré en août un long article aux « succès cachés » de l’Hexagone. Pour le vénérable hebdomadaire britannique, « l’un des grands mystères de la France actuelle » n’est pas notre consommation irraisonnée de grenouilles ou de fromages putrides, mais notre maintien économique en dépit de dépenses sociales record ou d’une mentalité révolutionnaire. « Un pays qui a une aversion pour le changement, un talent pour la révolte et un goût immodéré pour les impôts réussit encore à faire beaucoup de choses bien », constate The Economist, qui rappelle que depuis 2018, la croissance cumulée du PIB français, quoique modeste, est deux fois plus importante qu’en Allemagne, et dépasse celle de ses grands voisins britanniques, italiens et espagnols.
Une productivité au top
Sam Bowman, cofondateur du magazine numérique Works in Progress, a lui aussi, dans une analyse remarquée, tenté de percer ce mystère français. « J’avais l’habitude de m’interroger : pourquoi la France est-elle si riche ? En dépit d’une réglementation du marché du travail notoirement restrictive et d’une fiscalité élevée, la France d’après-guerre a toujours été aussi riche que le Royaume-Uni, voire plus riche. Et elle est nettement plus productive, même si l’on tient compte du taux de chômage plus élevé de la France. » Pour Sam Bowman, « la France se trompe sur tant de choses, et pourtant elle s’en sort plutôt bien dans les domaines qui comptent vraiment ».
Aménagement du territoire et anticipation des besoins
Alors, quel est donc notre secret, selon ces observateurs anglo-saxons ? Il y a d’abord les infrastructures performantes, héritage de décisions historiques avisées. Comme le rappelle The Economist, avec 2 800 kilomètres, notre réseau de train à grande vitesse est l’un des plus vastes au monde. Sam Bowman souligne, lui, que 29 villes françaises ont un réseau de trams, contre seulement 11 au Royaume-Uni. Il salue aussi le réseau autoroutier de l’hexagone : « La France compte près de 12 000 kilomètres d’autoroutes, contre environ 4 000 kilomètres ici, et les autoroutes françaises ont tendance à être plus fluides et mieux entretenues (et les trois quarts sont à péage, ce qui rend les embouteillages beaucoup moins problématiques) ».
Energie décarbonée
Deuxième clef : une énergie abondante et plus décarbonée que chez nos voisins. « La France produit une partie de l’électricité la moins carbonée d’Europe, grâce non pas aux énergies renouvelables mais à son industrie nucléaire, lancée dans les années 1970 », note The Economist.
Le prix de la paix sociale
La France possède aussi des atouts sociaux par rapport aux autres grands pays européens, avec notamment une garde d’enfants bien plus abordable et répandue, ainsi qu’un taux de pauvreté nettement plus bas. Notre taux de chômage, à 7,1 %, est au plus bas depuis quinze ans. « Malgré les réformes de M. Macron, l’Etat français prélève toujours plus d’impôts en pourcentage du PIB que n’importe quel pays de l’OCDE, à l’exception du Danemark, et consacre plus d’argent aux dépenses sociales », souligne The Economist.
Le luxe et les banques
Mais le magazine libéral met également en avant des succès bien plus capitalistes, notamment en matière de luxe, notre grand avantage comparatif: « La France compte plus d’entreprises dans le top 100 mondial, mesuré par la capitalisation boursière, que n’importe quel autre pays européen. Elle le doit en grande partie à ses géants du luxe, dont la rentabilité et l’envergure ont bondi au cours de la dernière décennie. En 2022, les marques de luxe françaises étaient plus rentables que les entreprises technologiques américaines » .
Ces succès ne se limitent aux exportations de sacs en cuir : « La France abrite également une banque parmi les plus valorisées de la zone euro, BNP Paribas ».
Aussi, entre 2017 et 2022, la France a augmenté sa part des exportations mondiales d’armes de quatre points, pour atteindre 11 %. L’année dernière, notre pays a déposé plus de brevets que la moyenne de ses grands voisins européens, et près de deux fois plus que la Grande-Bretagne.
D’ailleurs, The Economist souligne que sur un plateau boisé au sud de Paris, le gouvernement investit des milliards dans un pôle d’innovation autour de Saclay, destiné à devenir un « MIT français ».
Ainsi, même si notre pays est en retard en la matière par rapport aux Britanniques et aux Allemands, il a réussi, avec trois années d’avance, à exaucer une promesse macronienne en atteignant en 2022 le nombre de 25 licornes (des start-ups valorisées à plus d’un milliard de dollars).
Auteur/Autrice
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Loic Pautou est un jeune Français parti en VIE au Vietnam et qui n'est jamais revenu. Propriétaire d'une agence de tourisme à Hanoï, il écrit aussi pour Lesfrancais.press et le Guide du Routard.
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