La notation réalisée par les agences, Ficht, Moody’s et S&P permettent de mesurer et de comparer la qualité des dettes souveraines. La France est dans l’angle de tir des agences depuis une quinze ans. Moody’s avait déjà placé, en 2011, alors le pays sous « perspective négative ». Le 13 janvier 2012, Standard & Poor’s abaisse alors la note de la France de AAA à AA+, en raison de la montée des déficits et de la vulnérabilité de la zone euro. Fitch et Moody’s suivent durant l’année 2012, la France perdant ainsi son AAA auprès de toutes les grandes agences.
Avec la hausse de la dette publique, l’absence de réformes structurelles et la diminution de la croissance, en 2015, Fitch puis Moody’s placent la note française à AA, avec des perspectives stables mais prudentes. Entre 2017 et 2019, un statu quo fragile s’instaure, la note restant à AA ou Aa2 selon les agences.
En 2020, avec la pandémie, la dette publique progresse, mais les agences ne sanctionnent pas immédiatement la France car tous les pays sont touchés et la BCE soutient massivement les dettes souveraines. En avril 2023, Fitch abaisse la note française de AA à AA-. L’agence souligne la dette élevée, les tensions sociales liées à la réforme des retraites et la difficulté à réduire le déficit. En mai 2023, S&P met la note française sous surveillance négative, alimentant la crainte d’une nouvelle dégradation. La France se retrouve alors avec une note autour de AA- ou Aa2, soit deux crans en dessous du triple A.
De AA- à A+.
Le 12 septembre, Fitch a donc décidé d’abaisser la note de la France de AA- à A+. Cette dégradation est justifiée par la situation des finances publiques dans la deuxième économie de la zone euro et par son instabilité politique. Fitch souligne dans son communiqué que « cette instabilité affaiblit la capacité du système politique à mettre en œuvre une consolidation budgétaire d’ampleur ». Elle estime improbable le retour du déficit public sous 3 % du PIB en 2029.
La dette publique de la France atteint 113,9 % du PIB à fin mars (soit 3 345,4 milliards d’euros) et le déficit prévisionnel pour 2025 est estimé à 5,4 % du PIB. Selon Fitch, l’endettement de la France continuerait de progresser jusqu’à 121 % du PIB en 2027, « sans horizon clair de stabilisation ». L’agence fait basculer la dette publique française dans la catégorie inférieure, de qualité « moyenne supérieure », contre « bonne ou haute » jusqu’ici, ce qui pourrait conduire des investisseurs à vendre leurs titres de dette pour des placements moins risqués et entraîner des hausses de taux. L’augmentation des émissions allemandes dans les prochaines semaines pourrait faciliter ces opérations avec comme conséquence un relèvement des taux pour la France. Le poids du service de la dette devrait donc s’alourdir. Les intérêts de la dette devraient s’élever environ 55 milliards d’euros en 2025.
Les pays conservant encore leur triple A auprès des trois grandes agences sont l’Allemagne, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède, la Suisse, l’Australie, le Canada et Singapour.
Moody’s et Standard & Poor’s présenteront leur notation en octobre et novembre, respectivement. Les marchés financiers ont déjà anticipé de nouvelles dégradations, les spreads reflétant une notation souveraine abaissée.
Auteur/Autrice
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Philippe Crevel est un spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, il dirige, par ailleurs, le Cercle de l’Epargne qui est un centre d’études et d’information consacré à l’épargne et à la retraite en plus d'être notre spécialiste économie.
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